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Projet Universitaire Caribéen pour l’Education à Distance Intégrée (CUPIDE)
Caribbean Universities Project for Distance Education (CUPIDE)
Rose-Darline PIERRE - Ingénieure pedagogique en FOAD


Ralphson PIERRE
Technopedagogue, 
Consultant-formateur en Technologies de l’Education et communication numerique
Introduction
 
La formation à distance vue globalement
La formation à distance ne date pas d’aujourd’hui. Du support papier (par correspondance) au support audio et vidéo (cassette), passant par la radio ou la télévision en utilisant les ondes hertziennes, jusqu’à l’ordinateur, ce mode d’enseignement a permis à de nombreux gens de se former. Cependant, avec l’arrivée de l’Internet, ce type d’enseignement a connu un essor phénoménal. Nous pouvons assimiler ce changement de pratiques d’enseignement à l’évolution des technologies et aussi de la société.
 
Difficile de parler de l’état de l’enseignement à distance sans mentionner les noms des pays nord-américains, considérés comme pionniers dans ce domaine. Aux Etats-Unis, The Distance Educational and Training Council (DETC) est la première structure mondiale en matière de e-learning. (Terzian/Béziat, 2007a). Selon ces auteurs, cet organisme bénéficie d’une grande notoriété dans l’accréditation d’autres pays parmi lesquels nous pouvons citer : l’Afrique du sud, le Royaume-Uni, le Canada, qui sont eux-aussi très avancés. Virtual University Campus, compte plus de 2M étudiants adultes répartis dans 128 pays, ce qui fait d’elle, la plus importante structure de formation en ligne. Au Canada, par exemple, ce domaine est très développé et déclaré priorité de l’Etat. C’est pour cela que beaucoup de spécialistes du domaine pensent que le E-learning est une seconde chance pour les personnes en difficultés d’apprentissage.
 
En France, l’enseignement dit « à distance » a commencé dès 1939. C’est un mode d’enseignement mis en place à travers le CNED (Centre National d’enseignement à Distance) par le ministère de l’Education Nationale qui consistait à donner des cours par correspondance aux adultes et aux élèves en « Zone libre [1] » confrontés aux problèmes de scolarité au cours de la seconde guerre mondiale. Aujourd’hui, le CNED forme à tous les niveaux dans le système scolaire français, de l’école primaire au collège, du lycée aux études supérieures et même les formations professionnelles. Il offre jusqu’à 3.000 formations dans des domaines divers et variés.
Dans la Caraïbe, la notion de formation à distance ne connait pas encore un aussi grand essor qu’en Amérique et en Europe mais toutefois, beaucoup d’efforts ont été consentis dans ce domaine. A La Jamaïque, par exemple à travers son université de technologie, pas mal de projets liés à l’innovation et au développement des ressources humaines ont pris naissance. Parmi ces projets, nous pouvons citer le projet CUPIDE qui fait l’objet de notre fiche actuelle
 
A- Contexte du projet
L’accès à l’éducation particulièrement au niveau universitaire est très difficile pour bon nombres de pays de la Caraïbe, tant au point de vue du coût des formations, des turbulences politiques, économiques et sociales et des manques d’infrastructures auxquels ils font face. En Haïti, par exemple, le taux net de scolarisation est d’environ 60%. Parmi ceux qui ont fréquenté un établissement scolaire à peine 2% arrivent à boucler leur cycle secondaire (rapport UNICEF – Haïti 2003). Même les enseignants ont très peu d’accès à l’informatique donc la formation en ligne reste à un état vraiment embryonnaire.
 
Dans l’idée de contourner ces obstacles à l’éducation et d’augmenter les sources d’enseignement, les éducateurs, les décideurs et investisseurs à travers la Caraïbe ont vu dans l’enseignement à distance un moyen supplémentaire et alternatif qui permettrait de satisfaire les besoins en éducation de ces populations. Dans ce contexte, le projet universitaire caribéen pour l’éducation à distance intégrée (CUPIDE) a pris naissance avec pour vision la démocratisation et le renforcement de l’accès à la connaissance et en s’appuyant sur l’opportunité que présentent les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) dans le domaine de l’éducation et de la formation.
 
Depuis 1998, l’UNESCO, à travers son plan « éducation pour tous » et son programme d’ « University Twinning » plus connu sous le nom de UNITWIN manifeste la volonté de jumeler les moyens et capacités technologiques des universités afin de capitaliser les connaissances. Selon le centre d’études caribéennes de l’université métropolitaine de Londres (London Metropolitain University), l’UNESCO compte déjà 16 chaires mais aucun dans la caraïbe.
Conscients des problèmes d’infrastructures technologiques et financiers que rencontrent certains pays de la Caraïbe, l’Unesco et l’université des Antilles occidentales (UWI) de la Jamaïque ont décidé de porter ce projet par devant les bailleurs de fonds internationaux.
 
Objectif du projet
Le projet CUPIDE vise le renforcement et le développement des ressources humaines, des capacités technologiques des universités et la valorisation du patrimoine culturel et scientifique caribéen via l’utilisation des TIC et des programmes d’enseignement à distance.
 
B- Aspects politiques
Faute de moyens financiers, les Etats de la Caraïbe ont du mal à élaborer une politique d’éducation à distance. Cependant, la plupart de ces pays ont dédié une partie de leur plan national d’éducation, à l’enseignement à distance. Toutefois, compte tenu de ces même difficultés économiques et structurelles su-mentionnées, certains gouvernements sont obligés de restreindre le budget alloué à l’éducation, c’est le cas d’Haïti où l’éducation ne représente que 8% du budget national.
 
La plupart des pays de la Caraïbe, notamment la Guyane Anglaise ( 2002-2007), la Jamaïque (2000-2006), la République dominicaine (2003-2012), et Haïti 2008-2030) ont pu élaborer leur propre plan d’action en suivant les recommandations du plan d’action de Dakar en 2000. Il faut souligner que ces plans d’action ont été élaborés par les gouvernements en fonction de leurs besoins en la matière. Ainsi, l’UNESCO et certains organismes internationaux apportent des appuis techniques et/ou financiers dans l’élaboration des projets de développement de l’éducation conjointement avec les acteurs de la région. C’est le cas, par exemple de l’agence universitaire francophone (AUF), qui, à travers AUF-CARAIBES, offre plusieurs diplômes à distance, et collabore avec les partenaires pour la mise en place de plusieurs projets d’enseignement à distance. Ces offres de formation augmentent le nombre d’accès à l’université qui reste un problème majeur dans la région. La compétitivité dans la région est désormais une obligation. Face à la mondialisation, ces « petits pays » doivent nécessairement emboiter le pas vers ce que l’on appelle aujourd’hui : la société du savoir numérique.
 
Si les gouvernements de la région ont du mal à faire entrer l’enseignement à distance dans leur politique d’éducation pour des raisons budgétaires, il est un fait certain que l’éducation publique est et demeure une priorité socio politique selon le rapport du Fond des Nations-Unies contre la Faim et l’Alimentation suite au forum caribéen sur l’apprentissage tout au long de la vie, organisé par la banque mondiale à Sainte-Lucie (16 et17 mai 2008).
 
Certaines universités de la région déploient leur propre politique d’e-formation, soit avec l’aide du projet CUPIDE ou d’autres organismes comme CRDI, le Réseau d’Apprentissage à distance caribéen (RADC), et l’Association des Caraïbes pour l’Education Ouverte à Distance (CARADOL)
 
C- Aspects organisationnels
Géré par l’Université West Indies (UWI) de la Jamaïque et financé par un fond en dépôt Japonais, CUPIDE doit permettre aux universités membres d’être compétitives et rehausser le niveau de la formation à distance dans la zone caribéenne. Par ailleurs, il doit permettre l’élargissement de la participation des ces universités dans la société du savoir tout en réalisant des économies en matières de ressources humaines.
 
CUPIDE collaborent avec cinq (5) universités dans la région : Université Quisqueya (UniQ) qui se trouve en Haïti, Anton de Kom University de Suriname (UdeKUS), Unievrsity of GUYANA de la Guyane Anglaise (UG), University of Technology de la Jamaïque (Utech) et l’université West Indies (UWI) qui pilote ce projet sous l’égide du Project Advirosy Committee, chaire de la communauté caribéenne, ou caribbean common ( CARICOM). 
 
D- Aspects pédagogiques :
La mise en commun des moyens technologiques permet, par exemple, à l’université Quisqueya en Haïti d’utiliser l’infrastructure et les ressources pédagogiques de l’une des universités partenaires du projet CUPIDE pour lancer sa série de lecture à distance. L’orientation pédagogique et le choix du programme dispensé dépend strictement de l’organisme partenaire. Aucune imposition n’est faite par rapport à cela ; cependant, le projet CUPIDE permet aux universités partenaires d’avoir accès à des ressources pédagogiques et des équipements technologiques de qualité. C’est le cas de l’institut de Technologie de la Jamaïque (UTech), qui met à la disposition des étudiants du projet CUPIDE des ressources de l’institut de Massachussetts (MIT) suite à un accord passé entre ces deux institutions. 
 
E- Bilan et difficultés rencontrées
Le projet CUPIDE est lancé en 2003 dans la région sous l’égide de l’UNESCO mais son application s’est faite au fur et mesure dans les universités partenaires. En Haïti, CUPIDE est lancé en 2006 et a pris effet en 2007 via l’université Quisqueya (Uniq). C’est à la Jamaïque que cela a vraiment débuté et depuis, c’est l’université West Indies (UWI) de la Jamaïque qui manage ce projet. Le projet tarde à gagner de l’ampleur à cause des difficultés auxquelles sont confrontés les pays participants.
 
Jusqu’ici, CUPIDE a eu les actions suivantes en coordination avec les 5 universités partenaires :
· L’évaluation et l’analyse des besoins en termes de TIC
· L’analyse des disponibilités et des besoins en terme de formation et ressources humaines ; l’analyse des dispositifs d’enseignement pour les étudiants au niveau universitaire ; l’évaluation des activités collaboratives visant le développement et renforcement de la formation ouverte et à distance,
· La formation de techniciens, de personnel administratif ainsi que d’étudiants en matière de technologie de la formation à distance, particulièrement la plate forme Moodle.
· Le développement d’un portail de e-learning au niveau régional.
· Une assistance technique à chacune des universités membres en ce qui à trait aux outils technologiques de la formation à distance.
 
Difficultés économiques
Comme mentionné plus haut, les pays de la caraïbe sont pour la plupart en voie de développement ou sous-développés donc en proie à des difficultés économiques sans nombre. Le budget de ces pays, tel est le cas d’Haïti par exemple, n’arrive même pas à offrir une éducation primaire adéquate ou à répondre aux besoins de base en santé, il est donc très difficile pour le gouvernement d’allouer une plus grande partie de son budget pour promouvoir l’enseignement à distance assez coûteuse vue le déploiement technologie que cela implique. De plus, les infrastructures déjà inadéquates ne permettent pas à la formation à distance d’atteindre un grand nombre d’étudiants.
 
Difficultés linguistiques
La région caribéenne présente une grande diversité linguistique. La Caraïbe regroupe à la fois des pays anglophones, hispanophones et francophones. Donc, le jumelage des universités de ces différents pays présente une difficulté dans le partage des informations entre des individus parlant des langues différentes.
 
Propositions
Pour palier aux difficultés financières entravant le déploiement et l’évolution du e-learning au niveau de la caraïbe à travers CUPIDE, les organismes chaperons pourraient faire appel à la contribution des secteurs privés des pays où la politique gouvernementale ne permet pas une allocation suffisante à la FAD. Entre autre, au niveau des plus grandes universités de la région, des activités de levées de fonds pourraient être entreprises et les fonds seraient utilisés pour améliorer la situation des autres universités moins capables.
 
En ce qui a trait au problème de langues, il serait peut être utile que chacune des universités membres incluent dans leur curriculum les trois principales langues parlées dans la région. Ainsi, les étudiants auront non seulement une formation additionnelle en langues vivantes mais aussi la capacité de s’approprier les informations disponibles dans n’importe laquelle des universités partenaires et même ailleurs. 
 
Références
 
[1] Zone libre : Nom donné à la partie de la France non-occupée par les Allemands pendant la seconde guerre mondiale.
 
Dernière modification le lundi, 23 janvier 2017
Ralphson Pierre

Technopédagogue, Psychopégagogue, Consultant-Formateur TICE
Spécialiste des Technologies appliquées à l’Éducation 
( E-learning , FOAD, MOOC, Réseaux Sociaux, Autisme, Éducation Spéciale)

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