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Armelle Gilliard est membre associée de la Coopérative d’Activité et d’Emploi Coop Alpha sous la marque La reine Merlin. Coop Alpha est issue de l’Economie Sociale et Solidaire, et est composée de 250 salariés entrepreneurs dont une cinquantaine dans le domaine du numérique. Armelle Gilliard a plus de 20 ans d’expérience dans ce domaine là, et est aujourd’hui experte en open data et maître d’œuvre en projets innovants. Elle est membre du conseil scientifique de l'An@é, a participé à plusieurs événements et débats sur les données. Son regard sur la période actuelle nous a particulièrement intéressé.

Quelles sont vos perceptions sur la période que nous venons de vivre ?

J’ai profité de la période de confinement pour finir quelques missions. J’ai rapidement trouvé qu’il nous était offert une grande opportunité de faire un temps d’arrêt. Temps d’arrêt très utile pour faire le point et s’interroger à ce que je veux vraiment faire. J’ai aussi passé un peu plus de temps au développement personnel et aux joies qu’offrent la vie de famille et la maison.

Le déconfinement n’a pas changé grand-chose à la façon dont nous avons décidé de vivre le confinement. Nous avons le bonheur de sortir librement, et cela est une très grande reconquête.

Nous sommes un petit groupe (j’espère un grand groupe) à vouloir œuvrer à un monde meilleur et cette période a ouvert des possibles. Je sais que nombre d’entre nous devons ou devrons faire face aux effets de la crise économique. C’est déjà mon cas, puisque sans élection, peu de marchés publics, ainsi je suis sans activité rémunérée pour le moment. Je reste dans la bonne dynamique du confinement en essayant de plus cultiver la joie que la peur et en essayant de résoudre/traiter les situations qui se présentent, au moment où elles se présentent. Pour moi, les incertitudes sont trop grandes pour que j’arrive à me projeter, c’est pourquoi je continue le travail d’introspection de sorte à apporter de la certitude à la direction que je veux suivre.

Quelles sont les modifications que vous avez mises en œuvre ?

Elles sont nombreuses et tournent autour du bien-être personnel et familial : qualité gustative des repas, sport à la maison, améliorations diverses du logement, lectures, jeux de société, s’occuper des plantes, travail personnel, apprécier différemment la liberté, améliorations des dynamiques relationnelles familiales et personnelles…et bien d’autres choses de ce genre.

Et enfin pensez-vous que certaines urgences soint à prendre en compte rapidement?

armelleRépondre à l’urgence climatique et aux bien-être de nos contemporains. Pour moi les deux vont ensemble. Ma réponse et un peu courte, je l’admets. Ce sont de bons objectifs. Ils demandent des approches par petites touches. C’est ce que je suis en train de réfléchir. Pour l’instant, difficile d’en dire plus, pour moi pour le moment.

Pensez-vous que les espaces et temps éducatifs, les espaces et temps scolaires soient à repenser ?

Mes quelques amies enseignantes me racontent de bien tristes tableaux de leurs vies de classe. Elles me disent que consoler un enfant tombé, corriger la feuille d’un élève ou chanter deviennent des gestes interdits. Je suis triste, et elles aussi des récits qu’elles me font des transformations opérées par l’aseptisation des écoles.

Cela fait longtemps que je pense que l’école devrait permettre d’être citoyen autonome et actif de mon territoire. Sous les mêmes termes chacun de nous ne met pas les mêmes contenus pédagogiques.

J’ai une vue de l’école qui m’est très personnelle et peut confrontée avec d’autres. Mon approche ne tient pas compte des nombreux débats qui existent sur le sujet. Vous qui êtes très experts sur ces sujets, je vous prie de bien vouloir excuser la naïveté de mes propos. Je rêve que l’école soit un espace de vie heureux, où on apprend comment se sentir bien, où on apprend la méditation, à se calmer, à écouter son corps et à se soigner, à être autonome sur le plan alimentaire….

Où on y apprend à vivre en paix, en harmonie avec les autres, à reconnaitre la diversité dans les autres, à faire des projets avec les autres, à avoir de bonnes et utiles connaissances pour vivre ensemble (gouvernance partagée, communication non violente, découverte des cultures….). On y apprend aussi les bases de la vie quotidienne : comment se nourrir, pourquoi se laver, comment fonctionne les machines qui nous entourent, comment réparer ces machines qui nous entourent…On y apprend aussi comment fonctionne la ville à partir des expériences de notre vie quotidienne pour les plus petites classes : d’où vient l’eau, comment sont gérer mes déchets, qu’est ce qui doit être mis en œuvre pour que je puisse regarder la télévision….

Je pense que les élèves ne devraient pas être passifs par rapport au bâtiment école. Ils devraient en connaitre les différents aspects et participer à son amélioration. Donner des opportunités de passer du faire au savoir et inversement. Si la peinture d’une classe a besoin d’être refaite, passer quelques semaines à mettre en place le projet : quel budget, quel volume de peinture, comment commander la peinture, comment est-elle fabriquée, quels sont les métiers qui sont impliqués, quels sont les acteurs qui permettent ces activités…

Ainsi pour les enfants, l’école serait vécue comme un patrimoine commun auquel ils participent vraiment. Le projet de l’école partirait de la vie quotidienne de l’élève, lui ferait prendre conscience que sa vie est reliée à celles de nombreux autres acteurs. Que les acteurs publics et les acteurs privés ont des rôles différents mais complémentaires.

Il pourrait y avoir des sujets récurrents d’une année sur l’autre pour lesquels les élèves apprendraient de plus en plus, petit à petit. Par exemple dans les petites classes on pourrait comprendre comment poussent les tomates, comment on les cuisine. A la fin du primaire et au début du collège comprendre l’économie de la tomate en France. A la fin du collège en comprendre la production mondiale et ses impacts écologiques. Au lycée il pourrait y avoir un travail la chimie des différents impacts des formes de culture sur le produit final. Cet exemple n’est qu’illustratif, mais il permet de comprendre l’idée : approfondir le sujet et d’en voir toutes les facettes.

Je m’imagine, peut-être une fois encore naïvement, que les élèves dans une telle école seraient joyeux d’apprendre et aimeraient y passer du temps. Trop rares sont les enfants qui disent aimer l’école pour ce qu’on y apprend. Ils souhaitent aller à l’école pour voir d’autres enfants. C’est une belle partie de l’équation mais il en manque un pan important celui des bonheurs et plaisirs d’apprendre. Peut-être que d’autres approches pourraient atteindre cet objectif : où enfants et adultes auraient de l’enthousiasme à vivre dans cette école de la joie.

Dernière modification le mercredi, 03 juin 2020
Desvergne Marcel

Vice-président de l’An@é, responsable associatif accompagnant le développement numérique. Directeur du CREPAC d'Aquitaine,  Délégué général du Réseau international des universités d'été de la communication de 1980 à 2004, Délégué général du CI’NUM -Entretiens des civilisations numériques de 2005 à 2007, Président d’Aquitaine Europe Communication jusqu’en 2012. Président ALIMSO jusqu’en 2017, Secrétaire général de l’Institut du Goût de la Nouvelle-Aquitaine.