fil-educavox-color1

Dans son livre, La Vie en gris et rose, le célèbre cinéaste aux multiples talents revient sur son enfance marquée par la violence et la pauvreté. Il tutoie le lecteur et on le suit au fil des pages, découvrant des conditions de vie très difficiles, mais surtout les ressources de son imaginaire et de sa créativité. 

L’école pour s’en sortir

Le ton n’est pas larmoyant, les mots sont simples, le style direct. Takeshi Kitano (né en 1947) nous parle en toute intimité. Il se confie et illustre chaque chapitre par des dessins enfantins colorés.

Coûte que coûte, dans le Japon d’après-guerre, le petit garçon souhaite vivre une enfance « ordinaire » mais il n’échappe pas à l’humiliation. Takeshi Kitano évoque les petites choses qui lui semblaient importantes. Chaque événement de vie constitue un court chapitre. Ce spectacle pendant lequel un conteur racontait des histoires ponctuées par des images, il ne pouvait se l’offrir, mais il faisait tomber une balle pour s’approcher et l’entendre.

Une nuit, il suit son frère aîné et sa mère, tous deux chassés par le père qui reproche des lectures tardives et donc l’éclairage de la pièce unique dans laquelle vit la famille. Sous un lampadaire, le petit garçon voit son frère aidé par sa mère pour la lecture. Elle se tient debout derrière lui avec une imposante lampe carrée de bicyclette qui éclaire chaque page. L’enfant est stupéfait par une telle volonté. L’école pour s’en sortir, l’école pour fuir une vie misérable ! 

« Préserver indéfiniment ma sensibilité d’enfant »

Il décide d’étudier alors qu’il ne s’intéressait qu’aux jeux pour échapper à son existence de « gosse de peintre ». Il deviendra animateur de télévision, comique, acteur, réalisateur, artiste-peintre… sans oublier d’où il vient. 

Ce livre en « gris et rose » décrit toutes les frustrations de cet enfant prêt à tout pour jouer : le gobelet rouge - couleur des filles au Japon -, sorti avec grande honte pendant les repas de l’école ; ce train acheté par petits bouts sur plusieurs mois mais qui dès le premier essai s’enflamme sur le tatami. 

L’image du père, un marginal, est très présente dans toute son œuvre. Cette autobiographie révèle la poésie de l’enfance, la force de Takeshi Kitano.

Phrases de l’épilogue : « Je voudrais préserver indéfiniment ma sensibilité d’enfant. Aussi mature, aussi riche que je devienne, je veux rester intègre, fidèle à moi-même, à ma vérité. »

Fatma Alilate

La Vie en gris et rose de Takeshi Kitano

128 pages, Éditeur Picquier poche, 7, 50 €

Traduit du japonais par Karine Chesneau

Dernière modification le jeudi, 08 février 2024