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Le Bett Show est le plus grand salon éducatif européen. Il rassemblait la semaine dernière un millier d’exposants et, comme tous les ans depuis 2005, j’y ai passé une journée. En une journée, on a le temps de voir à peu près la moitié des stands, la plupart d’assez loin. J’ai donc pu rater des choses intéressantes, mais voici les principales tendances – illustrées – du salon.

La réalité virtuelle

 

Bett RV2

Jamais, je n’ai vu un Bett avec une telle concentration de nouvelles technologies. Au moins 200 stands consacrés à la robotique (nom de code  STEM : Science, Technology, Engineering and Mathematics). Sous ce terme fourre-tout, on peut caser un peu tout et n’importe quoi, évidemment.

Des dizaines de stands consacrés à la réalité virtuelle – mais personne, sur le salon n’a été capable de m’expliquer en quoi l’expérience « immersive » proposée, dont j’admets qu’elle est parfois en tous points remarquable, améliorerait en quoi que ce soit le niveau ou même les connaissances de l’élève. Poser cette question paraît même un peu incongru.

Personne ne semble remarquer que la première conséquence de ces lunettes 3D  est de rendre l’enfant aveugle en le coupant de son environnement réel. Une des tendances actuelles de l’école semble être d’éloigner l’enfant du réel, alors qu’elle devrait au contraire permettre à l’enfant d’appréhender le réel. Il y a trois ans, l’Education Nationale a tout fait pour que l’éclipse, un des phénomènes naturels les plus grandioses ne soit pas vue des élèves. En 2016, le pays de Pasteur a interdit la dissection en classe de sciences naturelles au nom du fumeux « respect du vivant » (terme utilisé tel quel sur le site de l’Education Nationale).  De la maternelle à l’enseignement supérieur, il y a peu de phénomènes plus faciles à observer, plus riches à commenter, plus propres à susciter des vocations que l’éclipse ou la dissection des grenouilles. Les lunettes 3D symbolisent de façon quasi- parfaite l’évolution, au niveau mondial, de l’école vers un certain obscurantisme – terme à prendre ici dans un sens on ne peut plus littéral. Cet « en avant vers le passé » avance masqué derrière une apparence de modernité (ici, les nouvelles technologies et le principe de précaution).

Bett RV

J’ai tout vu au Bett – Non, tu n’as rien vu.” – Extrait de “Bett 2018, mon amour”.

L’absence d’intention pédagogique

Pour un grand nombre de technologies proposées au Bett, la fonctionnalité « intelligence artificielle » est glorieusement mise en avant. Beaucoup de sociétés proposent ainsi des cursus scolaires adaptatifs et personnalisés grâce à l’intelligence artificielle et aux « algorithmes adaptatifs » (adaptive learning). Mais s’avèrent incapables d’informer sur la nature et l’étendue des choix faits par l’ordinateur pour proposer le contenu à l’élève. Là aussi, poser la moindre question semble incongru. « L’algorithme est adaptatif, mon bon Monsieur, que voulez-vous qu’on vous dise de plus ? »

De tout ceci, on peut tirer une première règle générale :

Plus l’accent est mis sur la technologie dans une présentation, plus l’intention pédagogique est absente – dans la plupart des cas, le délire technologique ne fait que purement et simplement masquer l’absence totale d’intention pédagogique.

Que verrez-vous au Bett l’année prochaine ?

La conséquence de cette règle est la suivante :

Comme la plupart des sociétés ne cherchent qu’à recycler les technologies qui font le buzz actuellement pour les présenter dans un contexte vaguement éducatif, il est extrêmement simple de prédire de quoi seront faits les Bett 2019, 2020, 2021.

Je prédis en vrac, dans le désordre: les applications de la blockchain à l’éducation (whatever that means), le « machine learning » et les objets connectés (qu’on rencontre d’ailleurs d’ores et déjà assez fréquemment).

Article publié sur le blog de Speechi

Dernière modification le mercredi, 07 février 2018