Prudence ?
Une requête sur un moteur de recherche permet de récolter quelques pages de sites académiques à propos de la Concertation nationale sur l’orientation.
On peut remarquer tout d’abord une incertitude sur la dénomination de l’opération. Les quatre pages récoltées sont dénommées différemment :
- La concertation territoriale sur l’orientation dans l’académie de Normandie, https://www.ac-normandie.fr/la-concertation-territoriale-sur-l-orientation-dans-l-academie-de-normandie-130155
- Concertation régionale sur l’orientation en Auvergne-Rhône-Alpes, https://www.ac-lyon.fr/concertation-regionale-sur-l-orientation-en-auvergne-rhone-alpes-129430
- Journées régionales de l’orientation et de la découverte des métiers, https://www.ac-aix-marseille.fr/journees-regionales-de-l-orientation-et-de-la-decouverte-des-metiers-125720
- Concertation orientation, https://www.ac-nantes.fr/concertation-orientation-127469
Leur contenu est bien pauvre. Chacune décrit très rapidement l’organisation du dispositif. Les participants sont pour la plupart anonymisés : « les acteurs de l’orientation ». Seule, la page de la Région académique Provence-Alpes-Côte d’Azur et la Région Sud PACA indique la participation de « Marie-Florence Bulteau Rambaud, Vice-Présidente de la Région Sud ». On y trouve également une vidéo musicale, et sur les autres pages des académies, parfois des photos, comme s’il fallait attester de l’existence de ces réunions.
Mais silence sur la teneur des débats. Effet d’une demande du ministère et de quel ministère, celui qui a lancé la Concertation (Genetet) ou bien de l’actuel (Borne) ? À moins que ce ne soit l’effet d’une prudence des recteurs eux-mêmes ? Mais l’unanimité dans cette présentation neutralisée est bien curieuse. Ajoutons ce nombre minime de quatre régions académiques sur les treize nationales ayant publié une page sur leur site !
Si on regarde sur les sites des régions, c’est le silence. Une requête ne récolte aucune page consacrée à cet événement. À moins que l’information soit particulièrement cachée dans les sites des régions. Ajoutons que le site de Régions de France est également silencieux.
La position de la région Île-de-France
L’AEF a rendu compte de la concertation tenue en région académique Île-de-France par un interview de Anne Père-Brillault, secrétaire générale de l’agence francilienne pour l’orientation Oriane[1]. Nous n’avons pas pour le moment l’expression du point de vue rectoral ou d’autres participants à cette « concertation ». En voici le résumé proposé par la dépêche : AEF – 14 02 2025/Dépêche n° 726340
Orientation : « Il faut faire une place aux territoires » (agence Oriane, Région Île-de-France)
C’est pour « réaffirmer la pertinence de la décentralisation en matière d’orientation » que la Région Île-de-France a participé à la concertation régionale sur ce thème, indique à AEF info Anne Père-Brillault, secrétaire générale de l’agence francilienne pour l’orientation Oriane, lors d’une interview en février. La question n’est donc pas « qui fait quoi, mais plutôt comment » précise-t-elle, estimant que, si l’État et l’Éducation nationale sont « la colonne vertébrale du système d’orientation », il faut ensuite « faire place aux territoires ». Face au constat d’absence de pilotage politique national, elle met en avant « la nécessité absolue de guichet unique ». De cette concertation, Anne Père-Brillault espère que « l’État et l’Éducation nationale comprennent tout l’intérêt d’avoir délégué cette compétence ». Interrogée sur la plateforme Avenir(s), elle regrette que « l’Onisep ne travaille pas avec les régions ». |
On sent quelques frictions et amertumes de la Région. Ceci va nous donner l’occasion de replonger dans le texte de la loi de 2018[2] qui établissait entre autres une nouvelle relation entre l’Éducation nationale et les régions.
Le Code du travail modifié
La loi concerne tout d’abord la formation professionnelle des adultes, puis l’apprentissage. La section 1 y est consacrée et modifie le Code du travail. La section 2 porte sur l’orientation et l’offre de formation et s’ouvre par l’article 18 (Articles 18 à 26), et c’est toujours le Code du travail qui se trouve modifié, en particulier son article L. 6111-3[3] qui se trouve réécrit ainsi :
« -Toute personne dispose du droit à être informée, conseillée et accompagnée en matière d’orientation professionnelle… »
« Le service public de l’orientation tout au long de la vie garantit à toute personne l’accès à une information gratuite, complète et objective sur les métiers, les formations, les certifications, les débouchés et les niveaux de rémunération, ainsi que l’accès à des services de conseil et d’accompagnement en orientation de qualité et organisés en réseaux. Il concourt à la mixité professionnelle en luttant contre les stéréotypes de genre. »
« L’État et les régions assurent le service public de l’orientation tout au long de la vie… »
L’État définit, au niveau national, la politique d’orientation des élèves et des étudiants dans les établissements scolaires et les établissements d’enseignement supérieur. Avec l’appui, notamment, des centres publics d’orientation scolaire et professionnelle et des services communs internes aux universités chargés de l’accueil, de l’information et de l’orientation des étudiants… »
« La région organise des actions d’information sur les métiers et les formations aux niveaux régional, national et européen ainsi que sur la mixité des métiers et l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes en direction des élèves et de leurs familles, des apprentis ainsi que des étudiants, notamment dans les établissements scolaires et universitaires… » « Pour garantir l’unité du service public de l’orientation et favoriser l’égalité d’accès de l’ensemble des élèves, des apprentis et des étudiants à cette information sur les métiers et les formations, un cadre national de référence est établi… » « Avec le concours de l’établissement public national…, elle élabore la documentation de portée régionale sur les enseignements et les professions et, en lien avec les services de l’État, diffuse l’information et la met à disposition des établissements… »
Le texte institue d’abord un droit personnel, détermine l’organisme qui y répondra, la participation de l’État et des régions à cet organisme, puis la répartition des responsabilités de l’État et des régions qui ne sont pas de même nature.
Une remarque en passant
Dans ce texte du Code du travail, il est fait mention des « centres publics d’orientation scolaire et professionnelle » et non pas des Centres d’information et d’orientation. Lorsque l’on recherche dans le Code de l’éducation, on trouve dans la partie législative, l’Article L313-5[4] ainsi formulé :
« Les centres publics d’orientation scolaire et professionnelle peuvent être transformés en services d’État. Lorsqu’il est procédé à la transformation de ces centres, les dépenses de fonctionnement et d’investissement de ceux-ci, précédemment à la charge du département ou de la commune à la demande desquels ils ont été constitués, sont prises en charge par l’État.
Cette mesure ne peut entraîner de changement dans l’affectation, au centre transformé, de locaux n’appartenant pas à l’État. L’usage de ces locaux par le service nouveau donne lieu à versement d’un loyer. »
Le Centre d’information et d’orientation apparait dans la partie réglementaire du Code de l’éducation avec l’article D313-7[5] (Version en vigueur depuis le 24 mai 2006) :
« Les centres d’information et d’orientation publics sont créés par arrêté du ministre chargé de l’éducation dans le cadre des districts scolaires mentionnés à l’article D. 211-10. Dans les districts les plus importants, il peut en être créé plusieurs.
Dans le domaine de l’information et de l’orientation, le centre apporte son concours à l’ensemble des actions menées dans le district. Il assure l’accueil, la documentation et l’information du public scolaire et non scolaire, procède aux consultations nécessaires et collabore avec les services chargés de l’emploi des jeunes. »
Une curiosité qu’il faudrait clarifier.
Donc pour ce qui en est de la Concertation nationale sur l’orientation… Les réponses au questionnaire envoyé aux acteurs de l’orientation n’ayant pas été rendues public pour la plupart, et de même pour la teneur des échanges au cours des réunions dans les régions académiques, il nous faudra attendre le document de l’IGÉSR, à la condition qu’il soit rendu public.
Bernard Desclaux
Article publié sur le site : Le blog de Bernard Desclaux » Blog Archive » La concertation nationale en région. Silence on tourne !
[2] LOI n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000037367660/
[3] Article L6111-3 du Code du travail https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000037385609
[4] https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006071191/LEGISCTA000006095794/#LEGISCTA000006095794
[5] https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006526550?dateVersion=05%2F03%2F2025&nomCode=2nLdeA%3D%3D&page=1&pageSize=10&query=%7B%28%40ALL%5Bt%22Centre+d%27information+et+d%27orientation%22%5D%29%7D&tab_selection=code&typePagination=ARTICLE&typeRecherche=date