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L’École branchée poursuit sa participation à la mission d’exploration sur le numérique de l’AQPDE, à Poitiers. Aujourd’hui, on aborde des préoccupations, mais aussi des ressources d’encadrement.

Dans l’organigramme français, le numérique occupe la place suivante :

Tout d’abord, il y a le ministère de l’Éducation nationale, qui comprend différentes directions, dont la plus importante est la direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO). Une direction du numérique pour l’éducation (DNÉ) a été créée en 2015 et fait partie de la DGESCO. Avant 2015, le numérique était un « bureau », soit hiérarchiquement beaucoup moins important. Plusieurs estiment que le fait qu’il ait été promu en direction est probablement symbolique, pour montrer qu’on y accorde une grande importance.

Dans les régions, on retrouve des entités territoriales appelées les Académies. À l’échelle du Québec, elles correspondraient à de « super commissions scolaires », comme si un regroupement de CS dans une région avec un pouvoir décisionnel plus grand que les CS individuellement. Leur chef est appelé le recteur. Ce dernier possède dans son équipe une personne clé pour le numérique, appelée le DANE (délégué académique au numérique éducatif). Ce dernier participe à la définition du plan de développement du numérique pour l’Académie.

Des expérimentations d’équipement massif depuis 2001

L’instauration du numérique en France se fait par accélérations suivies de coups de freins.

Par exemple, en 2008, suite à une volonté politique, le département de la Corrèze a procédé à l’équipement massif des élèves de 6e année (équivalent à la 6e année chez nous, mais faisant partie de l’école secondaire) et acheté 13 000 tablettes et ordinateurs portables.

Plus tard, suite à une inspection générale, on a constaté qu’au final, l’équipement était : 

  • Dans la classe : très peu utilisé;
  • Dans l’établissement : en majorité, l’interdiction était totale (on le stockait dans une armoire) ou conditionnelle (avec certains cas d’exception);
  • Hors établissement : très utilisé, mais de façon trop ludique. 

À la maison, on vivait un grand changement.

Auparavant, l’ordinateur familial avait sa place au salon et son utilisation se faisait sous supervision. Avec les portables, les jeunes s’isolaient dans leur chambre et les parents ne savaient pas comment intervenir, ni s’il le devait, puisque l’équipement venait de l’école.

Dans le département des Landesle plan lancé en 2001 a permis d’équiper en ordinateurs portables les collégiens de 4e et 3e année (équivalent chez nous aux 2e et 3e années du secondaire).

Dix ans plus tard, une inspection a permis de réaliser que, selon les indicateurs retenus : 

  • Dans la classe : usages riches et diversifiés dans les disciplines, mais trop rares en documentation;
  • Hors établissement : comme en Corrèze. 

Alors, si ces expérimentations n’ont pas été 100 % concluantes, doit-on arrêter?

Selon les acteurs rencontrés, la réponse est non puisque le numérique fait partie de la vie, on ne peut le nier, et tous sont d’accord pour dire que l’école a beaucoup à gagner. On cherche cependant encore les meilleures façons d’y parvenir.

Des réflexions philosophiques autour du numérique

Tout comme chez nous, de nombreux débats ont lieu quant à la place du numérique dans l’éducation.

Parmi les débats, différentes réflexions ont émané, dont celles-ci :

– Petite Poucette, de Michel Serres, comprenant notamment le concept « d’externalisation de notre mémoire » comme conséquence du numérique

– Internet est un pharmacon, par Bernard Stiegler, représentant à la fois le pire et la meilleure des choses (comme en pharmacie, où un médicament soigne souvent quelque chose tout en déréglant autre chose);

– L’humanisme numérique, de Milad Doueihi, théologue qui s’est intéressé à la notion d’amitié vs la technologie;

– La gouvernance algorithmique (big data), par Dominic Cardon, qui se demande « à quoi rêvent les algorithmes, qu’est-ce que ça veut dire être gouverné par les algorithmes »;

– La mutation anthropologique, selon Louise Merzeau, qui estime notamment que l’humain risque de perdre une grande partie de sa mémoire à cause du numérique puisqu’on mémorise moins.

– Apprendre avec le numérique : mythes et réalités, d’André Tricot, un technophile qui véhicule des idées laissant croire le contraire et soulevant certaines controverses.

Quelques outils de gestion de l’éducation en lien avec le numérique

Parmi les nombreuses rencontres effectuées lors de la mission d’exploration, la délégation québécoise s’est fait présenter différentes ressources, outils et cadres qui ont un lien avec le numérique.

En voici quelques-uns, en vrac.

Le Cadre de confiance des services numériques veut assurer la sécurité des systèmes d’information et la protection des mineurs. Les dispositifs mis en place doivent être complétés par des actions de sensibilisation et de responsabilisation des utilisateurs. Il comprend un référentiel Wi-fi (les éléments à prendre en compte lors de la mise en place du Wi-Fi à l’école), un schéma directeur pour les espaces numériques de travail (SDET), des mesures prises par l’éducation nationale pour protéger les élèves mineurs des dangers de l’internet ainsi que des ressources destinées à favoriser la maîtrise et l’usage responsable des réseaux et des services numériques par les enseignants et les élèves.

Le M@gistère est une plateforme de formation continue sous forme de MOOC pour les enseignants, opérée par l’Éducation nationale. Elle permet d’élargir l’offre de formation grâce à un modèle hybride comprenant de nombreux cours en ligne. Elle est particulièrement utile considérant les 18 heures de formation obligatoires par année pour tous les enseignants de l’élémentaire.

Le Référentiel de compétences des métiers de professorat et de l’éducation, mis à jour en 2013, énonce la compétence professionnelle 9, concernant le numérique :

(L’enseignant doit) Intégrer les éléments de la culture numérique nécessaires à l’exercice de son métier 

  • Tirer le meilleur parti des outils, des ressources et des usages numériques, en particulier pour permettre l’individualisation des apprentissages et développer les apprentissages collaboratifs.
  • Aider les élèves à s’approprier les outils et les usages numériques de manière critique et créative.
  • Participer à l’éducation des élèves à un usage responsable d’internet.
  • Utiliser efficacement les technologies pour échanger et se former. 

Le Cahier de texte numérique est un outil obligatoire depuis 2010. Historiquement, c’était une sorte de cahier rempli chaque jour par l’enseignant, qui y consignait ce qui avait été vu en classe et ce qui devait être travaillé à la maison. Lors de ses visites, l’inspecteur demandait à voir ce « cahier de texte ». Maintenant, puisqu’il est en ligne, les parents peuvent le voir, les élèves aussi. Il permet une meilleure information des familles.

Le livret scolaire unique (LSU) est le nom qu’on donne au bulletin. Il suit l’élève et consigne toutes ses notes du primaire à la fin du cycle 2 (équivalent de la 3e secondaire). On a commencé à le rendre accessible en ligne fin 2016 afin que parents et élèves puissent en prendre connaissance lorsqu’ils le souhaitent. Le déploiement se poursuit.

Audrey Miller

Article initialement publié sur le site : https://ecolebranchee.com/2017/09/13/numerique-beaucoup-questions-france/

Dernière modification le dimanche, 01 octobre 2017
Miller Audrey

Sur Twitter : @millaudrey
Audrey est rédactrice en chef de L'École branchée. Elle s'implique dans l'organisation d'EdCamp Québec et du Rendez-vous des écoles francophones en réseau (REFER), ainsi qu'au sein du conseil d'administration de l'AQUOPS. En dehors de cela, elle est consultante en communication et formatrice en technologie éducative.