Le déroulement
Ces procédures se déroulent en fait sur l’ensemble de l’année scolaire, à chaque niveau du secondaire, de la sixième la première.
Le premier trimestre est consacré à l’information des élèves et des parents. L’objet de l’information est double : sur le fonctionnement de la procédure, et sur l’objet de la demande d’orientation, les formations proposées.
Ensuite les parents sont invités à formuler des vœux d’orientation pour le conseil de classe du deuxième trimestre qui répond à ces vœux.
S’il y a des désaccords, le dialogue s’engage, mené en particulier par le professeur principal.
Enfin les parents formulent des vœux définitifs qui sont examinés au conseil de classe du troisième trimestre. Si la réponse apportée n’est pas en accord avec la demande, les parents peuvent faire appel en choisissant l’une des deux voies de recours possibles : l’examen d’appel et la commission d’appel.
Le résultat du recours s’impose.
Voilà le déroulement prévu des nouvelles procédures qui recevront quelques aménagements, précisions, etc. jusqu’à aujourd’hui. Mais avant de suivre l’examen de ces évolutions, que nous verrons dans les posts suivants, on peut déjà repérer les difficultés d’application de ces nouvelles procédures en suivant les différentes étapes.
Les difficultés autour de l’information
Il y a deux aspects dans la période d’information, au cours du premier trimestre essentiellement.
L’information des élèves se fait en classe et donc à la place des cours, la plupart du temps celui du professeur principal. Selon les établissements, l’accord doit être pris avec le chef d’établissement qui organise le plan de « passage en classe » ou avec les enseignants. Jusque dans les années 80, il y avait souvent plusieurs passages en classe. Une séance d’ouverture des dossiers de l’élève avec des productions de la part des élèves à l’alimenter (des questionnaires, des tests). Une séance dite sensibilisation à l’orientation, et une séance proprement d’information. Le dispositif prenait donc un temps important sur le temps d’enseignement, et nécessitait un peu de négociation… Très souvent, au début de l’application des NPO, ce fut les directeurs de CIO qui négocièrent le principe des plans d’interventions avec le chef d’établissement.
Retenons que, et encore aujourd’hui, le temps concret de l’intervention du conseiller, du PsyEn aujourd’hui, est toujours objet de négociation. Il ne va pas de soi. Il « prend » souvent sur le temps d’un autre professionnel.
Mais il y a également l’information des parents.
L’établissement organisait une réunion d’information des parents d’un niveau, à laquelle le directeur de CIO ou le conseiller était invité. L’information sur les « poursuites d’études » pouvait plus ou moins être développée par le personnel d’orientation, mais souvent en « concurrence » de celle apportée par d’autres chefs d’établissement accueillant les futurs élèves. Le point délicat était souvent la partie réglementaire, autrement dit l’explication des droits et devoirs de chacun, nous en verrons plus tard quelques exemples.
Les difficultés du dialogue
Le temps du dialogue entre la réponse du conseil de classe et la formulation de la demande définitive avant le conseil de classe du troisième trimestre est très court.
La fenêtre temporelle des rencontres est étroite ! Mais surtout cette posture de dialogue est très « nouvelle ». Il faut rappeler que jusqu’en 1959, les décisions concernant la circulation des élèves s’imposent aux familles. L’institution est fermée, les parents sont tenus à distance. Ce n’est qu’à partir de 1959 avec la réforme Berthoin que les parents sont invités à indiquer, en fin d’année, leurs vœux d’orientation pour leurs enfants. L’idée de dialogue qui suppose une forme d’égalité de position entre les interlocuteurs est peu admissible dans le monde de l’Éducation nationale, même à la suite de 1968. Et le « dialogue » est le plus souvent un temps de persuasion. Les collègues de l’époque (mais sans aucun doute également ceux d’aujourd’hui) reçoivent l’injonction de voir le « petit X pour lui trouver une solution », et le professeur principal va chercher à faire accepter la « décision » du conseil de classe.
La question du temps et du moment de la rencontre (le professeur principal et les parents ou entre le conseiller et l’élève et ses parents) se pose également (et toujours aujourd’hui). Il y a un jeu rarement en accord entre le temps de travail des uns et le temps personnel des autres. S’accorder sur l’horaire de cette rencontre est déjà un problème. Et à l’époque la prise de rendez-vous suppose également un engagement temporel, on s’écrit, on se téléphone. Pronote et son immédiateté n’est pas encore là.
Autour de la décision d’orientation et de sa contestation
Avant d’aborder ce thème, il faut peut-être se poser la question de l’identité du décideur, le fameux conseil de classe. On peut renvoyer à de nombreux travaux[1] concernant les conseils de classe. Nous allons pointer simplement quelques « problèmes » que je vais simplement lister. Qui fait partie du conseil de classe ? Nous verrons les manières de revenir sur cette question. Et associé à cette question il y a celle du droit à la parole qui compte. Qui participe à l’élaboration de la « décision » ? Qui en règle le déroulement et le fonctionnement ? Et sur cette dernière question, il y a une réponse simple : aucun texte réglementaire n’organise le conseil de classe.
Concernant la décision d’orientation du conseil de classe, il y aura des évolutions concernant la détermination du champ de la décision. D’autres questions porteront sur la nature, la formulation arrêtée par le conseil de classe. Est-elle une « décision » s’imposant ou une proposition que les parents peuvent ou non accepter ?
Enfin on s’intéressera aux évolutions concernant la contestation. Les Nouvelles procédures d’orientation ont opéré un renversement de posture. Jusque-là, il n’y avait pas de contestation organisée. La circulaire de 1890 indiquait qu’en cas de doute, l’élève était invité à un examen en septembre. L’institution l’autorisait à se « rattraper », elle ne pouvait pas se tromper, ce que le recours suppose au contraire. D’où les grandes résistances constatées sur le terrain pour mettre en œuvre ces recours.
Le paysage est planté, nous pouvons poursuivre l’histoire. Vous pouvez également voir la vidéo de ma conférence au GREO, intitulée « PEUT-ON SE PASSER DE PROCÉDURES D’ORIENTATION (SCOLAIRE ET PROFESSIONNELLE) DANS UNE SOCIÉTÉ DÉMOCRATIQUE ? »
Il s’agit d’une présentation-discussion autour de mon livre « Orientation scolaire : les procédures d’orientation. Mises en examen. Quel débat dans une société démocratique ? », Préface de Claude Lelièvre, Collection : Orientation à tout âge, L’Harmattan, 2020. https://www.youtube.com/watch?v=phnwUb3i2n8
Bernard Desclaux
[1] BOUMARD (Patrick). — Un conseil de classe très ordinaire. — Paris : Stock, 1978. —
MARCHAND (François). — Evaluation des élèves et conseils de classe. — Paris : Epi ; 1979. — 357 p. ; 24 cm. — (Hommes et Groupes).
Baluteau F. dans Le conseil de classe : peut mieux faire ! Paris : Hachette, 1993
BOUMARD (Patrick). – Le conseil de classe, institution et citoyenneté (préf. de G. Mialaret). – Paris : PUF, 1997. – 152 p.
Mas, Y. Pour une analyse sociologique du conseil de classe, article paru dans la revue D.E.E.S n° 111 en juin 1998.
Béatrice Mabilon-Bonfils et Virginie Calicchio dans Le conseil de classe est-il un lieu politique ? Paris : L’harmattan, 2004.
Mabilon-Bonfils, B. & Calicchio, V. (2004). Stratégies d’acteurs et de pouvoirs dans l’école : qui décide dans les conseils de classe ?. Carrefours de l’éducation, 18, 2-17. https://doi.org/10.3917/cdle.018.0002
Bernard Desclaux et Jacques Vauloup, Le conseil de classe, entre justesse, justice et justification », in Odry D. (cord.) L’orientation, c’est l’affaire de tous – 1. Les enjeux. Série « Dispositifs » de la collection « Repères pour agir. Second degré » RDP d’Amiens, 2006.
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