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En 1907, John Dewey est partisan de partir de l'expérience de l'enfant.

J'ai pris un livre dans ma bibliothèque et jai trouvé : « Abandonnons la notion de programme comme quelque chose de fixe, de tout fait, en dehors de l’expérience de l’enfant ; cessons aussi de concevoir l’expérience de l’enfant comme quelque chose de figé ;

considérons-la comme quelque chose de fluide, d’em­bryonnaire, de vital ; nous nous rendrons compte que l’enfant et le programme d’études sont simplement deux limites qui définissent un processus unique. Tout comme deux points définissent une droite, la position de l’enfant et les faits et les vérités des études définissent l’enseignement. C’est une reconstruction continue, allant de l’expérience actuelle de l’enfant à ces ensembles de vérités orga­nisées que nous appelons les “études”. »

L’École et l’enfant (1907). Paris, Editions Fabert, 2004, p.65

« Ce sont les tendances naturelles et les désirs qui doivent être au point de départ. Mais il n’est pas de croissance intellectuelle sans quelque reconstruction, quelque refonte des impul­sions et des désirs, à partir de leurs premières manifestations. Cette refonte implique l’inhibition des impulsions sous leur forme première. L’alter­native est la suivante : ou bien une inhibition imposée du dehors, ou bien une inhibition qui se fait grâce à la réflexion et au jugement personnels.

Le vieux dicton : “Si vous voulez penser, arrêtez­-vous”, trouve sa place en psychologie. Car la pensée suppose l’arrêt du toutes les manifestations impul­sives jusqu’à ce que l’impulsion soit mise en rapport avec les autres tendances actives, de manière que soit conçu un plan plus cohérent et plus compré­hensif. Quelques-unes des autres tendances actives aboutissent à l’usage de l’œil, de l’oreille, de la main qui permettent des observations objectives ; d’autres s’éveillent au rappel de ce qui s’est produit dans le passé.

La pensée est donc un ajournement de l’action immédiate et, dans le même temps, elle est un contrôle interne de l’impulsion par l’union de l’obser­vation et de la mémoire, laquelle union est au cœur de la réflexion. Ce qu’on vient de dire explique le sens de la locution rebattue “auto-contrôle”. Certes, le but idéal de l’éducation, c’est la création en chacun d’un auto-contrôle. Mais le simple retrait de tout contrôle externe ne suffit pas à garantir la création d’un auto-contrôle. Il n’est pas difficile de tomber de Charybde en Scylla. En d’autres termes, il est facile d’échapper à une forme de contrôle externe pour se retrouver à l’intérieur d’un autre contrôle externe encore plus dangereux. Les impul­sions et les désirs qui ne sont pas ordonnés par l’intelligence sont sous le contrôle de circonstances accidentelles et extérieures. Il se peut qu’il y ait plus à perdre qu’à gagner à échapper au contrôle d’autrui pour s’en remettre au pur caprice personnel, c’est-à-dire à la merci d’impulsions qu’aucune intel­ligence n’éclaire.

Un être dont la conduite ne connaît d’autre maître que le caprice a, tout au plus, l’illusion de la liberté. Il est dirigé par des forces sur lesquelles il n’a aucune espèce de prise. »

Expérience et éducation (1938). Paris, Armand Colin, 1968, p. 115-116.

John Dewey, philosophe père du pragmatisme, annonce la couleur dès 1907. Il faut repenser l'autorité.  Aucun goût pour la permissivité mais on ne  peut négliger l'expérience. C'est ce rapport à l'expérience (qu'est-ce que l'on met derrière?) qui doit être aujourd'hui penser...

Dernière modification le vendredi, 15 mai 2015