Ils mettent tout d’abord en exergue des difficultés du métier dont il ne faut pas faire fi : la dégradation des conditions d’exercice de la profession est pointée par 88% des sondés ; la faiblesse de la rémunération (nettement inférieure à celle des enseignants chez nos voisins européens) est dénoncée par 69% des sondés ; les relations trop lointaines avec le ministère de l’Education nationale par 79% ; la formation est jugée insuffisante…rien de très nouveau dans tout cela mais ces ressentis pèsent sur la profession et constituent autant de freins à son adaptation aux missions de plus en plus nombreuses que lui confie la société. Ces freins doivent être desserrés en dépit de la crise économique en vigueur, en dépit des autres priorités issues des états d’urgence sécuritaire et sociale. Il s’agit, bien sûr, d’un investissement indispensable pour assurer la place de chacun dans un monde transformé par la révolution numérique, indispensable pour notre démocratie elle-même.
Il faut ensuite retenir de ce sondage les éléments les plus positifs c’est-à-dire porteurs d’un fort potentiel d’évolution de la profession. Ce sont, en particulier : la fierté des enseignants d’exercer leur métier, soulignée par 80% d’entre eux ; l’impérieuse nécessité du travail en équipe ressentie à 70%, la motivation, sous tendue par la volonté de transmettre et de voir la réussite des élèves, pointée à 59% ; les bonnes relations établies avec les élèves (91%) et leurs parents (75%). Nous avons là les leviers, les points forts sur lesquels peut être établie une stratégie de changement.
En effet des statistiques de ce type n’ont d’intérêt véritable que si elles débouchent sur des décisions et des actions et nous savons tous qu’il y a là une urgence d’autant plus réelle que le temps de l’évolution dans l’éducation ne peut pas être l’immédiateté pour aussi pressé que l’on soit. Certes, le déficit relationnel entre le ministère de l’éducation nationale et les enseignants du premier degré procède, au moins en partie, d’une coupure plus générale entre le politique et le citoyen. A tous les niveaux, le pouvoir de décision apparaît comme étant de plus en plus éloigné des préoccupations des acteurs de terrain et exercé par des hommes et femmes déconnectés de leurs administrés. Néanmoins les liens peuvent et doivent être renoués et rien ne pourra se faire sans que soit recréé un vrai rapport de confiance. Concernant l’éducation, les personnels d’encadrement et les corps d’inspection doivent être clairement missionnés dans ce sens. A 93%, les enseignants, déjà majoritairement satisfaits de leur relation avec leur inspecteur (54%), souhaitent que s’établisse une relation de confiance.
Au vu de ces indicateurs, il semble possible d’établir, sans réforme ajoutée, les termes d’un contrat passé entre le ministère et les professeurs sur des bases négociées dans un climat apaisé. C’est une évidence que des enseignants motivés, disposés à travailler ensemble et bénéficiant d’un crédit important auprès des élèves et de leur famille peuvent transmettre de mieux en mieux savoirs et valeurs, développer plus efficacement compétences diverses et esprit critique, asseoir le vivre ensemble dans une société maintenant multiculturelle et en réseaux. C’est également une évidence que la reconnaissance financière de leur rôle est une condition nécessaire pour qu’ils se sentent moins seuls à porter les défis de l’Ecole. C’est une autre évidence que la formation, et la formation d’équipe en particulier, doit apporter une aide précieuse, un soutien et un réconfort.
Un tel contrat serait un contrat gagnant. Même si la procédure pour l’établir s’avère longue …on peut formuler le vœu que des discussions s’engagent rapidement.
*http://www.snuipp.fr/IMG/pdf/Rapport_Harris_-_Les_preoccupations_des_enseignants_en_2015_SNUipp_.pdf
Dernière modification le lundi, 25 janvier 2016