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en réponse à l’article de Pierre Frackowiak - En réponse à l’article de Pierre Frackowiak : une école qui peine à s’engager dans le 21ème siècle - Il y a dans l’article de Pierre Frackowiak un point d’appui.Nous vivons une mutation de civilisation et l’école doit se reconfigurer pour le 21 ème siècle.

De là cette situation où la refondation prometteuse se heurte à un faisceau de résistances massives à tel point que le ministre doit amortir les implications d’une finalité dite avec prudence. Cette prudence elle permet le déni de ceux qui ne veulent pas lire ce qui est écrit, faire comme si cela n’existait pas pour éviter le conflit latent radical. L’amortissement favorise la focalisation sur des questions accessoires même importantes pour éviter le dévoilement des implications de ce qui est écrit. On peut faire comme si l’accessoire était l’essentiel et l’essentiel accessoire, très secondaire. Détournement du sujet, détournement de l’objet de la refondation.

Il reste que le ministre veut établir des dispositifs qu’il met hors de contrôle de l’Education Nationale. Instance des programmes auprès du premier ministre, Instance d’évaluation de l’école indépendante, Ecole de formation du professorat et de l’éducation (et sa panoplie de métiers futurs), Ecole des hautes études de l’éducation nationale pour éclairer les français, Rôle des régions et des acteurs des communautés locales... Pour qui sait lire des moyens stratégiques se mettent en place pour que la nation et ses responsables puissent reprendre en main une institution repliée sur ses propres fins. C’est une institution monstrueuse dont les membres sont dans l’ensemble aveugles sur les enjeux et les conditionnements auxquels ils se sont voués corps et âmes pour beaucoup.

Un analyseur est la mutation de civilisation qui ébranle les édifices d’un monde en fin d’histoire. Parmi tous les pays impactés, la France est particulièrement désignée pour vivre la plus grande difficulté de par ses rigidités historiques et l’école en est le symptôme.

La mutation un exercice de prospective humaine.

Le passage d(une civilisation centrée sur les représentations mentales et le magistère de la raison à une civilisation du Sens centrée sur l’homme en tant que personne en voie d’autonomisation, vivant au sein de communautés engagées dans le Sens du bien commun et de mondes virtuels qui augmentent la réalité commune par le jeu des relations de proximité à distance. Internet en est le laboratoire. 

Trois renversements de logiques sont en jeu. 

  • Passage d’une logique de conformation associée à l’universalisme rationaliste (19ème siècle) à une logique d’autonomisation responsable des hommes et leurs communautés. Le premier blocage par exemple entre la posture disciplinaire centrée sur le savoir formel et la problématique pédagogique centrée sur la personne. Les experts en conformation vivent cela comme un effondrement intolérable de leur valeur et de leurs compétences. Ils ne le tolèreront pas ou s’effondreront moralement si on n’entreprend pas une analyse des fondements épistémologiques.
 
  • Passage dune logique du réalisme fataliste du matérialisme à une logique à une logique du virtuel et du développement des virtualités humaines dans l’édification de l’homme et des mondes humains. « Les choses sont ce qu’elles sont fatalement » à « tout est projet, engagement et développement des qualités humaines ». Le combat contre l’adversité et la nécessité se trouve disqualifié par les enjeux de développement humain, une pédagogie de l’humanité où vivre c’est devenir et non survivre. Les anciens combattants ne lâcheront pas prise, défendront la forteresse assiégée, prêts à un fort Chabrol s’il le faut. L’action humaine change de logique passant du rapport de force à la culture des richesses humaines. 
 
  • Passage d’une logique individualiste à une logique de participation communautaire. L’émancipation de l’individu, l’apologie des droits individuels (sans les devoirs), le relâchement des contraintes morales et économiques ont favoriser l’idéal d’une souveraineté individuelle d’un libre arbitraire d’autant plus désirable et revendiqué que l’école en est le contre point. L’école de l’égalité est resté celle des mérites individuels soutenus par les conditionnements socio-culturels pour la sélection des élites. L’implication du tissu relationnel dans les activités et les situations communautaires à la place de la détermination administrative de l’Etat central met les personnels de l’Education Nationale dans une double contrainte. Sortir de la dépendance formelle de l’Etat pour entrer dans une dépendance responsable dans la communauté locale. L’individualisme nourri d’abstraction se trouve confronté à la responsabilité personnelle en communautés là ou toute profession se détermine. Crise des valeurs radicale.

 

Nous avons là trois sources d’une crise majeure dont la violence des symptômes peut être à la mesure des remises en question historiques. Pourquoi tant de tensions ? Parce que les positions traditionnelles font commerce avec le sacré. En effet l’école républicaine s’est définie en confrontation avec la religion catholique et son projet a été de remplacer cette religion par une religion républicaine. Le livre de Vincent Peillon : « Une religion pour la République » est très éclairant là-dessus. Seulement il y a plusieurs conceptions de la « religion républicaine ». Il y a celle du père du concept de la laïcité Ferdinand Buisson et son libéralisme spirituel et il y a celles qu’il dénonce comme dogmatismes de remplacement du dogmatisme catholique et sont nommés : le rationalisme, le matérialisme, le positivisme, le jacobinisme, le scientisme... Voilà le problème, un problème de guerre de religion à l’intérieur même du modèle républicain et au lieu même de ce qui en fait le coeur : l’école.

La solution c’est la mutation de civilisation du monde actuel et un des moyens en est son laboratoire : internet. Mais c’est un autre chapitre.

Dernière modification le jeudi, 04 décembre 2014
Nifle Roger

69 ans chercheur indépendant.

Fondateur de l’Humanisme Méthodologique

Auteur du livre "Le Sens du bien commun" éditions du Temps Présent. Travaille sur la prospective d’une mutation, sur les plans politique, économique, éducatif, celui de la gouvernance communautaire, du développement approprié etc. sous l’angle d’un humanisme radical à contre courant des anti-humanismes contemporains.