NeujPro : On les prétend tantôt désengagés, en politique notamment, tantôt très engagés, sur l’environnement par exemple. Les jeunes s’engagent-ils ?
T. A. L’engagement des jeunes est varié et je ne pense pas qu’on puisse dire que les jeunes sont désengagés. Seulement cet engagement prend de très nombreuses formes dont la reconnaissance, et la valorisation est à géométrie variable.
Ainsi, si je prends les dispositifs mis en place par la loi de 2017 pour la valorisation de l’engagement dans les universités, un pompier volontaire, un réserviste, un représentant étudiant ou bien encore un jeune entrepreneur pourra bénéficier d’un statut dérogatoire et d’une valorisation. Certes, après une procédure parfois longue, mais ce sera possible (même si toutes les universités ne l’appliquent pas). A contrario, un étudiant engagé dans une association locale, ou bien faisant partie du COJ par exemple, se verra refuser toute application du dispositif en place.
L’engagement, outre son aspect humain, est vecteur de développement de compétences.
C’est en cela qu’il est, et doit, être reconnu, surtout face à un milieu professionnel qui fustige l’étudiant diplômé mais sans expérience, et refuse l’accès au jeune avec de l’expérience, mais sans diplôme.
Certaines des formes de cet engagement ne sont pas ou peu prises en compte. Certaines sont parfois jugées péjoratives (engagement politique/engagement déconnecté du cursus scolaire…), d’autres sont invisible (familles à charge). En l’absence d’outil de reconnaissance et de valorisation universel, la situation semble inextricable. Les dispositifs existants se faisant concurrence voire se contredisant.
Quels sont les facteurs qui peuvent freiner l’engagement ?
T. A. J’ai fait partie de ces jeunes qui ont l’opportunité et la chance de s’engager facilement, mais ce n’est pas donné à tous. Que ce soit pour des raisons de mobilité, de soutien du cadre familial, ou bien encore de moyens financiers. A titre d’exemple, pour pouvoir continuer à être engagé, notamment au COJ j’ai demandé un régime d’étude spécifique, qui m’a été refusé. On m’a alors dit que je n’avais qu’à, soit arrêter mes études, soit basculer en enseignement à distance. Enseignement à distance qui est payant (plusieurs milliers d’euros, même si vous êtes boursier comme je l’étais).
Parallèlement, à l’image des Français avec la vie politique (il suffit de regarder les taux de participation aux élections), certains jeunes commencent à perdre foi dans le système. Comme toujours ce n’est pas le cas de tous les jeunes. Mais j’ai de nombreux camarades qui sont dépités du fonctionnement du système actuel. Que ce soit des jeunes engagés dans des dispositifs de participation aux politiques publiques ou des jeunes n’ayant jamais participé à cela.
En découlent deux conséquences, soit cela les pousse à d’autant plus s’engager pour faire eux-mêmes bouger les choses de l’intérieur, soit au contraire ils délaissent leur engagement.
Les jeunes ont envie de participer à la construction du monde dans lequel ils vivent mais les « consultations de jeunes » matière de politique publique sont trop souvent de façade, et leur manque de résultats tangibles renforce ce sentiment de ne pas être écouté. Ce qui est d’autant plus frustrant quand cela concerne les thématiques spécifiques à la jeunesse, bien qu’à mon sens toutes les thématiques concernent les jeunes…
Théo ABADIE interviendra à NeujPro le 19 octobre à 16h00 dans le cadre de la table-ronde « Regards croisés sur les politiques d’engagement ». Le programme