Une offre diversifiée de services, outils, ressources et plateformes numériques et dispositifs est proposée aux écoles et établissements. Etat et territoires : Quelle approche systémique ? Quels rôles et quelles contraintes pour les Ed Tech, les collectivités et les établissements ? Quels sont les enjeux sociaux et pédagogiques ? Quelle prise en compte des disparités territoriales ?
Extraits :
Michelle Laurissergues : Se poser la question des politiques éducatives dans le cadre d’un service Public du numérique dans le cadre scolaire n’est pas simple. L’éducation ne se résume pas uniquement à des apprentissages scolaires et le numérique a apporté avec son horizontalité une complexité sans précédent. La culture numérique, la culture scientifique et l’adéquation avec la culture plus globale à l’échelle de l’Europe et du monde se sont imposés avec des défis culturels, environnementaux et démocratiques.
Les acteurs des collectivités, de l’Etat, les acteurs du monde économique, tous les acteurs éducatifs ont des défis majeurs à relever. Nous avons réuni sur cette table ronde quelques -uns d’entre eux pour évoquer leurs projets, leurs contraintes et leurs missions et poser les conditions d’une approche plus systémique : Cécile Collet, Proviseure du lycée professionnel La Morlette, Sébastien Gouleau, Délégué régional académique au numérique pour l’éducation Nouvelle-Aquitaine, Loïc Lapeyronnie, Principal Bordeaux Belcier, Philippe Mittet, Directeur Général adjoint, Pôle Éducation - Citoyenneté, au Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine.
Les rôles et les missions en ce qui concerne le numérique en milieu scolaire
L'Etat : La direction du numérique pour l'éducation a pour mission l’impulsion et l’accompagnement de la transformation numérique du système éducatif, au bénéfice de la communauté éducative comme des agents.
"Elle définit la politique de développement du service public du numérique éducatif. Elle en assure le déploiement et la valorisation. "
La stratégie du numérique pour l’éducation pour la période 2023-2027:
- Renforcer la coopération nationale et locale entre les acteurs de l’éducation, autour de projets pédagogiques mobilisant le numérique là où il est pertinent ;
- Développer les compétences numériques des élèves, c’est-à-dire, d’abord, leur enseigner la citoyenneté numérique, en développant l’esprit critique et renforçant l‘éducation aux médias et à l’information ; ensuite, leur transmettre un socle de compétences numériques renforcées ; enfin, promouvoir l’attractivité des spécialités et baccalauréats menant aux métiers du numérique
- Fournir aux professeurs une offre claire mêlant outils et ressources numériques pour mettre davantage le numérique au service de la réussite des élèves ; encourager leur usage en proposant davantage de formations et d’accompagnement, afin que les enseignants puissent s’en saisir facilement et de manière la plus pertinente possible
- Développer la robustesse, la sécurité, l’accessibilité, la qualité et l’écoresponsabilité des outils informatiques du ministère, pour simplifier le travail des agents et accroître ainsi la qualité du service rendu.
Service Education, recherche et formation, orientation - Région Nouvelle-Aquitaine
Michelle Laurissergues : Monsieur Philippe Mittet, comment décline t-on ces objestifs en région, quelles sont vos spécificités, vos compétences partagées avec l'Etat ?
Philippe Mittet : Le travail qui doit être réalisé par une collectivité comme la nôtre, c'est rappeler le nombre de lycées, approximativement 300 lycées, avec des lycées "napoléoniens " et des lycées comme celui qu'on vient de livrer le lycée du Barp, collège- lycée général et technologique, projet mené avec le Département de la Gironde, avec architecture intégrée à l'environnement et construction HQE (Haute qualité environnementale). C'est également s'assurer que chaque établissement ait du haut débit et que la partie réseau soit répartie dans toutes les salles. C'est un socle de référence sans lequel on ne peut rien faire.
Ensuite, les logiques peuvent être variables selon les collectivités. Nous avons fait le choix de mettre des ordinateurs à disposition, (200 000 élèves, 100000 ordinateurs, 10 Millions d'euros d'équipements) ensuite on travaille avec les sevices du Rectorat pour les outils, Espaces Numériques de Travail, et des espaces de mutualisation et des ressources numériques sont mis à disposition.
La question qui se pose : comment fait-on pour prolonger le travail avec l'aide du numérique quand les enfants ne sont plus dans les établissements ? La continuité est un sujet sensible, un travail à poursuivre.
La question du bâti : la construction et l'aménagement des établissements en fonction des projets, continuent-ils à se développer ?
Monsieur Gouleau : L'aménagement avec intégration du numérique se développe avec un accompagnement.
A noter le site Archiclasse : https://archiclasse.education.fr/
La salle de classe se déplace, on a développé l'enseignement à distance, on pourra être sans doute, à l'avenir, en capacité de développer les techniques d' immersion.
Je voudrais revenir sur cet objectif qu'on a tous qui est d'éveiller à l'esprit critique. Pour relever ce défi là on a besoin de tout le monde. Ce document montre l'écosystème qu'on peut faire notamment dans les Teritoires Numériques Educatifs où on cherche notamment à travailler avec les parents.
Au sein des TNE on travaille avec les Ed Tech qui proposent des ressources qui s'appuient sur des données... comment les valoriser les stocker les sécurise, qui le fait ? Comment produire des ressources qui peuvent correspondre à éléver le niveau des élèves. C'est une vision holistique des acteurs en effert seils, on ne fait rien.
Comment construire un écosystème engagé : définir nos souhaits comment renforcer la mise en relation des élèves, développer des communs numériques partagés...Développer la citoyenneté, s'engager dans un dispositif de développement de compétences numériques...
De multiples questions se posent sur l'abondance des ressources, des plateformes numériques, et logiciels multiples proposés, validité, éthique, accès pour tous...
Tout d'abord, comment s'en emparer ?
Madame Collet : Naturellement, sans l'injonction des enseignants, les élèves ne vont pas spontanément dans l'ENT. Cependant ils ont des pratiques numériques et même, un certain nombre d'élèves veulent être influenceurs. Au risque de s'exposer sans avoir les codes et a connaissance des risques. Comment devenir un citoyen accompli, capable d'affronter les éléments et de se confronter au monde réel et numérique ?
En lycée professionnel ceratins enseignants sont rompus aux pratiques du numérique, et certains vont parfois se trouver démunis.
Certains élèves qui sont dans la filière aidants pour le grand âge seront-ils suffisamment formés pour aider eux-mêmes aux démarches numériques ?
Les connexions à l'ENT dans les classes commencent à augmenter alors comment avoir un écosystème efficace ? autant de questions sur lesquelles nous travaillons.
Monsieur Mittet : Sur la question de l'ENT, c'est un outil scolaire qui entraine donc une distance de la part des élèves. Mais comment ne pas trop s'éloigner de la forme personnelle ? Utiliser le numérique avec un esprit critique ...Comment valider une information ? Il s'agit bien de donner aux jeunes à voir d'autres univers et accepter divers supports. La formation des enseignants en ce sens est fondamentale.
En ce qui concerne les projets on peut évoquer l'entreprise Ubisoft qui a des ojectifs éducatifs. Comment apprendre d'une manière plus ludique.
Cet expérimentation crée le lien entre le monde scolaire et le monde numérique des jeunes.
En ce qui concerne un usage trop important avec le numérique, nous avons qu'il vaut mieux une diversité des supports plutôt qu'un temps exclusif avec le numérique. Dans les lycées professionnels les simulateurs existent, les jumeaux numériques se développent.
La continuité entre usages scolaires et usages des jeunes. Le byod est une évolution à envisager dans les années à venir...
Faire ensemble ...Les concertations territoriales en sont un des leviers.
Pour l'intégralité des échanges la vidéo
En conclusion
Le premier constat fait par l'ensemble des acteurs, est le développement d'une communauté culturelle s'appuyant sur une dynamique entre partenaires éducatifs.
Le second constat partagé, est que notre société est devenue celle des flux avec des Intelligences artificielles qui changent les équilibres dans les territoires et les accès aux connaissances, avec des réseaux sociaux qui bouleversent nos rapports et une Ecole qui est centrée encore plus sur les acquisitions des savoirs fondamentaux (sans exclure le domaine du Numérique), afin que les jeunes puissent devenir des citoyens éclairés (une Ecole qui élève, émancipe et qui protège).
Le premier principe dégagé lors des échanges, au-delà des difficultés constatées dans les domaines des équipements et dotations en matériel, de la formation des personnels, de l'appropriation par les élèves des outils mis à disposition... est la création d'un "Ecosystème" (approche systémique partagée par les acteurs), facilitant la continuité entre les usages scolaires des outils numériques et les usages personnels : pour ce faire développer les concertations et coopérations entre partenaires éducatifs prenant en compte l'équipement à adapter aux besoins des jeunes (ordinateur personnel...), les réseaux et connections des bâtiments (salles, CDI...), les ressources numériques et les démarches d'enseignement ( créer des scénarios pédagogiques avec des supports d'activités adaptés, rendre les élèves cognitivement actif...) pour augmenter les compétences numériques des élèves et l'attractivité des filières numériques.
Les ENT ne sont pas pleinement utilisés par les élèves, sauf par une mobilisation par leurs enseignants. Certains milieux familiaux sont éloignés de la culture numérique et le rôle de l'école est de mettre en place les moyens pour que tous puissent s'approprier ces outils ; c'est une priorité pour devenir un citoyen du 21° siècle en lien avec un principe d'équité éducative...
Les outils scolaires peuvent permettre de construire les compétences dans le domaine du numérique utilisables par les jeunes dans leur vie quotidienne en dehors de l'Ecole : c'est un travail essentiel des équipes éducatives pour réussir cette transposition entre outils numériques scolaires et outils personnels, ce qui implique également des formations d'enseignants adaptées (évolution des ENT, offres numériques partagées avec les acteurs locaux, stratégie numérique plus globale sur un territoire, ingénierie pédagogique s'appuyant sur des références scientifiques, avec une méthodologie rigoureuse...).
Le second principe, complémentaire et directement articulé au précédent, est la confiance à instaurer ou restaurer avec les familles, au cœur d'une stratégie visant l'égalité entre les territoires : concevoir les modalités de collaboration avec certains parents en rupture avec le monde scolaire, consolider les liens avec les jeunes et leurs familles par un accueil physique renforcé mais aussi par l'appropriation d'applications accessibles présentées en milieu scolaire et exploitable sur les temps personnels (un partenariat avec les entreprises est à développer de manière plus spécifique). Dans cette perspective également, poursuivre la lutte contre le harcèlement et prévenir les addictions aux jeux vidéo...
Le troisième principe, très bien interrogé par la conférence de Anne CORDIER, mais également abordé lors de cette première table ronde, est l'EMI (Education aux médias et à l'information), démarche ancienne dans le monde scolaire, qui est à nouveau au centre des préoccupations des professionnels de l'enseignement et de la formation : éduquer à l'information (apprendre à rechercher et vérifier un information et les sources, réfléchir à un cadre éthique de la formation, développer une culture de la documentation...), développer un esprit critique, réfléchir sur les modèles économiques des réseaux sociaux en lien avec notre démocratie (accès aux informations sans filtre, modèle libéral, contrôle de l'Etat...), au regard du "désordre informationnel" actuel avec certaines familles très démunies face à ces enjeux...
Cette première table ronde a mis en évidence des enjeux essentiels pour nos institutions et structures partenaires, avec un réel enthousiasme des participants à s’engager ensemble pour construire un environnement ajusté aux réalités actuelles et plus juste pour tous les jeunes.
L’ampleur des mutations qui nous attendent ne nous permet de négliger aucun outil pour changer les approches éducatives. L’innovation, l’imagination, la collaboration s’imposent pour les politiques publiques de demain.
Dernière modification le jeudi, 12 septembre 2024