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Le 25 août, dans le cadre de la 16ème édition de RURALITIC, à Aurillac, Sébastien CÔTE a animé la matinée "ÉDUQUER AVEC LE NUMÉRIQUE". Sous la pression de la crise sanitaire, les écoliers, collégiens, lycéens et étudiants de France ont été projetés brutalement dans le monde fantastique de l’e-éducation ! Personne n’était vraiment prêt… Une fois l’épreuve passée, comment, et sous quelles conditions, le numérique apporte-t-il un vrai plus pour l’égalité des chances scolaires des jeunes ruraux ?

Témoignages de collégiens,  lycéens, leurs professeurs, leurs encadrants pédagogiques

  • Oui aux écrans pour surfer.
  • Oui à la présence du smartphone, téléphone, sauf exception dans les classes. Son émergence est réelle, même si certains enseignants l'interdisent pendant leurs cours.
  • Oui aux réseaux sociaux, même s'ils posent des soucis.
  • Oui aux écrans pour jouer.
  • Oui à la nécessité d'impliquer les enseignants.
  • Oui à l'utilisation des écrans pour communiquer.

Comment ont-ils vécu l’arrivée brutale du numérique éducatif dans leurs pratiques scolaires? Comment apprendront-ils demain? Comment enseigneront-ils demain? L'expression des élèves filmé(e)s ont permis de prendre en cause la réalité des pratiques dans l'éducation et de démontrer l'impliquation des enseignants.

Vers l'organisation de " l'école numérique "

Le débat à permis d'écouter plusieurs personnes responsables de notre système éducatif. 

Maryline LUTIC, Directrice des services départementaux de l’Éducation nationale du Cantal.

Elle a insisté sur l'obligation de travailler ENSEMBLE, toutes écoles concernées.

Mireille BRANGÉ, Coordinatrice nationale de la Stratégie Enseignement et Numérique, Secrétariat Général Pour l’Investissement, services du Premier ministre.

Elle propose les réponses de l'Etat pour cette sortie de crise avec une stratégie concernant les enseignants et le le numérique et un investissement massif avec les collectivités, de la maternelle au supérieur puis sur la formation toute la vie. Dix nouveaux départements sont concernés en cette rentrée. Les ressources numériques pour les écoles sont portées par CANOPE. Il y a nécessité d'une formation, de cours à distance, de dispositifs comme les classes inversées, sans oublier l'accompagnement des parents. Dans le Cantal les collectivités et l'Etat font un travail en commun. Il y a nécessité de contenus et méthodes articulés pour les actions pédagogiques.

Fabien FERRAZZA, Directeur secteur public de Docaposte.

La Poste doit se positionner dans les flux d'échanges en proposant des plateformes de divers contenus. Depuis 30 ans elle propose des écosystèmes globaux, en particulier dans le primaire, pour le numérique éducatif. Cette année 186 écoles, en secondaire et primaire se sont dotées de leurs plateformes.

Hervé BORREDON, Vice-Président Education de l’ AFINEF.

Crée en 2012, avec une centaine de membres, ses actions impliquent l'articulation nécessaire de l'Education nationnale, des Collectivités et le secteur Industriel. Et se sont essentiellement les collectivités qui payent.

Olivier MICO, Directeur général d’ Easytis.

Nous distribuons des ressources et matériels permettant de développer des compétences dans le numérique. La robotique pédagogique est mise en avant, ainsi que le travail sur l'hybridation permettant d'associer les tiers lieux.

Florent MAS, Chargé du développement et des partenariats de Mobidys.

L'enrichissement collectif s'exprime par la création de plateformes dans plus d'une centaine de collèges. L'action s'organise auprès des élèves, des parents et des enseignants, avec par exemple le projet en cours de développement du manuel numérique (format FROG).

Thierry de VULPILLIERES, co-fondateur Évidence B.

Leur travail concerne l'intélligence artificielle. 3 chocs s'articulent : Tous les rapports qui se sont créés avec le confinement impliquant des décrochages, une adaptabilité numérique au maximum, un numérique support du savoir fondamental. Comment grâce à l'intelligence artificielle, aider chaque élève ? Les expériences menées, par exemple à Singapour, sont révélatrices de notre monde de demain, en particulier entre le personnel et le collectif.

François MOREL, Directeur de Canopé Auvergne.

Il y a une nécessité de travailler en commun. Nous avons besoin de médiateurs selon les comportements en réseau. Nous sommes dans un système avec tous les acteurs du numérique. Nous vivons une révolution et CANOPE est au service de tous les acteurs du terrain. Un besoin de se rencontrer pour agir est nécessaire.

De même, l’An@é, avec son média Educavox a accompagné les acteurs de l’éducation durant toute la période de confinement total ou intermittent. La situation que nous avons connue pose un certains nombre de questions.

  • Michel PEREZ, Président de l'An@é (en visio) : 

Quelle est la situation de l’école numérique en France?

Les problématiques sont culturelles, sociales et éducatives

 Le numérique est un fait culturel et social global

 Les pratiques culturelles et sociales des jeunes ont radicalement changé : risque de rupture entre la jeunesse et l’école.

 L’équipement des familles pas toujours adapté aux travaux scolaires

 Hybridation des enseignements : difficile alternance présentiel et distanciel «école/maison »

 Difficultés liées à la mise en oeuvre des  solutions numériques disponibles : réseaux, serveurs, connexion à distance, outils de visioconférence etc.

 Il y a un impératif d’éducation citoyenne et d’égalité républicaine

 Quelles sont les solutions disponibles?

Les plans d’équipement : ils ne sont pas à la hauteur des besoins, car ils ne peuvent répondre aux enjeux et résoudre les inégalités sociales et territoriales.

Plan écoles numériques rurales (2010),

Plan écoles numériques innovantes et ruralité (2019) 3.791 écoles et 3.570 communes  : à peine 20% des écoles rurales

Label Ecoles numériques (2020) destiné aux communes rurales < 3500 hb: 15M €

Socle numérique de base 2020 dans le cadre du Plan de relance, continuité pédagogique. Appel à projet pour un socle numérique de base dans les écoles élémentaires (préconisé par la Cour des Comptes 8/07/19). Doté de105 millions d’euros.Soutenir la transformation numérique : Équipement, ressources, accompagnement.

Territoires numériques éducatifs, rentrée 2020. Deux premiers départements concernés, l’Aisne et le Val d’Oise, 27,3 millions d’euros. Rentrée 2021, 10 nouveaux départements en lien avec Canopé et La Trousse à Projets.

On constate un foisonnement d’initiatives locales :  un paysage très hétérogène pour ce qui concerne le numérique éducatif à l’école primaire, sans régulation nationale.

Si la dépense moyenne annuelle par élève est passée de 8,24 euros en 2012 à 30,03 euros en 2017, le financement des petites communes est trois fois moins élevé que celui des plus grandes. Une analyse qui traduit "de véritables inégalités territoriales »[1][1].

Les moyens mis en oeuvre par ces différents plans sont peu de choses face à l’immense défi de mettre l’école en phase avec la société d’aujourd’hui.

Nous avons deux possibilités : les solutions technologiques ou la continuité éducative

A. Le solutionnisme technologique.

Nous nous référons à deux ouvrages : Le Bluff technologiquede Jacques Ellul et Le Mirage numérique d’Evgeny Morozov.

La technique peut-elle résoudre les problèmes de l’humanité, et donc de l’école, comme le suggère l’idée de « solutionnisme technologique » ? Ce concept illustre une pensée qui résulte d’un processus logique (voire syllogique) bien décrit par Jacques Ellul (Le Bluff technologique 1989) puis repris par Evgeny Morozov :  « Le mouvement est alors le suivant : en présence d’un problème social, politique, humain, économique, il faut l’analyser de telle façon qu’il devienne un problème technique (ou un ensemble de problèmes techniques) et à partir de ce moment-là, la technique est l’instrument adéquat pour trouver la solution. »

Lorsqu’il s’agit d’éducation, à l’An@é, nous pensons qu’il ne suffit pas de traiter les effets du hiatus scolaire en installant des réseaux et des tablettes partout, mais qu’il est indispensable  d’agir en profondeur sur les causes des décrochages scolaires, des échecs de l’enseignement à distance, agir sur les modalités pédagogiques via le numérique, instaurer une continuité éducative. La relation est essentielle entre tous les acteurs de l’éducation : enseignants, familles, collectivités, associations pour un continuum éducatif et pas seulement pédagogique.

En effet, nous savons que « L’introduction des technologies numériques à l’école, ce n’est pas seulement faire les mêmes choses autrement, c’est une manière de repenser tout l’enseignement ».

Et nous pensons que «La culture numérique doit être au service de l’égalité des chances pour une insertion dans la société économique et culturelle», comme le disait Anne Cordier lors de notre table ronde sur In Fine.

B. La continuité éducative : elle inclut tous les acteurs de l’éducation.

Nous devons poser le problème en termes de continuité éducative et pas seulement pédagogique : Le numérique n’est pas la solution, mais seulement une partie de la solution : la solution est à la fois pédagogique, éducative et politique. Il faut se souvenir que le numérique est un amplificateur de la pédagogie, pas la solution.

Il y a nécessité d’une intervention via une large concertation au sein de comités locaux des partenairesde l’éducation numérique incluant (cf. niveau national) : les enseignants, les familles, les associations (mission de service public et Tiers Lieux), les collectivités territoriales, les autorités académiques. Nous savons qu’il en existe, mais il faut aller plus loin.

Il convient de partager les enjeux de l’éducation au et par le numérique, intégrer une médiation numérique pour les enseignants et les parents, travailler localement, ce que ne permet pas vraiment le plan « Territoires numériques éducatifs », très limité et quelque peu coercitif.

Une gestion plus globale des temps et des espaces pourrait mettre en concordance l’école et les temps de vie sociale. Ce sont de vrais choix de société.

Plus on se trouve dans des zones isolées, plus les questions relatives à laccès au numérique se posent. Il faut accélérer les processus d’équipement et en même temps créer et faire vivre des « Tiers-lieux » d’animation qui permettent lalphabétisation numérique et linclusion numérique de la société, afin de combattre aussi l’illettrisme numérique. L’éducation citoyenne est au cœur des choix faits par ces élus.

 

Rose LEMARDELEY, Responsable du Pôle éducation de la Banque des Territoires.

Il faut créer une continuité entre les jeunes et les territoires. Au delà des éléves, il faut intégrer les parents. Ainsi nous accompagnons les projets. De nouveaux appels à projet, pour le numérique inclusif sont lancés.

Florence DUBESSY, Vice-Président du Conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes à l’éducation et aux lycées.

La Région s'est impliquée sur le cablage et les infrastructures, le raccordement à la fibre, les équipements informatiques et audio-visuels, l'exploitation et la maintenance de 90000 postes et 47000 logiciels. La Région a veillé à ce que l'ENT fonctionne et à prêté 1 300 ordinateurs, en veillant à l'augmentation de la WI-FI. Le rôle de la Région est d'acompagner les choix pédagogiques des enseignants.


[1][1] Rappel : Selon le rapport des IG de juillet 2018. Sur les 34 968 communes de France : 17 706 écoles sont situées dans l’espace rural : 36% des écoles ; 1 422 509 élèves sont scolarisés en espace rural : 22% des élèves. Nous savons donc qu’1 école sur 3 et 1 élève sur 5 se trouvent dans l’espace rural.

Sont-ils assez pris en considération?

Dernière modification le dimanche, 01 mai 2022
Desvergne Marcel

Vice-président de l’An@é, responsable associatif accompagnant le développement numérique. Directeur du CREPAC d'Aquitaine,  Délégué général du Réseau international des universités d'été de la communication de 1980 à 2004, Délégué général du CI’NUM -Entretiens des civilisations numériques de 2005 à 2007, Président d’Aquitaine Europe Communication jusqu’en 2012. Président ALIMSO jusqu’en 2017, Secrétaire général de l’Institut du Goût de la Nouvelle-Aquitaine.