Ensemble, nous avons choisi de nous adresser à des élèves de troisième et de seconde, un âge sensible pour les premières dépendances. Il ne s’agissait évidemment par de faire de la prévention par la peur (peu efficace), mais de susciter la réflexion et le dialogue autour des consommations et des dépendances.
Voici le canevas de cette activité de 3 heures environ. L’opération nous semble avoir bien fonctionné sous cette forme, — qui reste certainement à améliorer.
Étape 0 : tirage au sort et installation
Il est intéressant de tirer au sort les élèves participants. Le hasard permet une meilleure représentativité des participants, en comparaison au volontariat, qui mobilise généralement des profils peu variés (ce principe a d’ailleurs un enjeu considérable en politique, comme le montre l’essai décapant de David Van Reybrouck, Contre les élections).
Il est intéressant aussi de mélanger les niveaux scolaires, les élèves ayant généralement trop peu d’occasion d’échanger entre niveaux différents.
J’ai donc établi un tableur contenant les noms de tous les élèves de troisième et de seconde de notre école. J’ai ensuite utilisé un outil de classement aléatoire (Random Generator sur Google Spreadsheet) et sélectionné les quarante premiers numéros d’élèves de troisième et les quarantepremiers numéros d’élèves de seconde. Les conseillers d’éducation se sont chargé de transmettre les convocations individuelles aux élèves.
La salle de réunion, suffisamment grande pour accueillir 80 élèves, a été équipée avec :
- un projecteur,
- un ordinateur connecté,
- un microphone.
Les élèves ont été répartis en dix tables de huit personnes (quatre élèves de troisième et quatreélèves de seconde), cinq tables étant « francophones » et cinq autres « anglophones » (dans mon établissement européen il y a 8 sections linguistiques !).
Diaporama de la séance
Étape 1 : quiz
Première séquence : un petit questionnaire de cadrage. Quatre affirmations doivent être évaluées comme vraies ou fausses : 1) le cannabis est légal en Belgique ; 2) le cannabis est une drogue douce ; 3) l’alcool ce n’est pas de la drogue ; 4) il est légal de boire de l’alcool avant 18 ans.
Après chaque affirmation, les groupes disposent de deux minutes pour déterminer la bonne réponse et ses raisons. La collecte des réponses est réalisée avec l’application mobile plickers(que je présente ici), permettant aux groupes de répondre en présentant un code imprimé et de projeter immédiatement les statistiques des réponses sur l’écran de la salle.
A partir des résultats, l’intervenante fait une reprise et un cadrage factuel et définitionnel (avec traduction en anglais pour les élèves non francophones).
Cette séquence permet d’élaborer la notion d’usage problématique, au-delà de la nature des substances.
Étape 2 : atelier sur l’influence
Cette séquence vise à faire prendre conscience et à réfléchir aux mécanismes d’influence dans les groupes. Le dispositif est très simple et joyeusement efficace (il est documenté en ligne, notamment par Infordrogues).
• On dispose sur chaque table une assiette de chips (des pringles : irrésistible !).
• On attribue des rôles aux élèves :
- quatre élèves tiennent le rôle de « consommateurs » (ils peuvent manger des chips et doivent convaincre les « abstinents » d’en consommer),
- deux élèves tiennent le rôle de « abstinents » (ils ne doivent pas manger de chips et doivent contre-argumenter),
- deux élèves tiennent le rôle d’ « observateurs« .
• Le défi dure sept minutes.
Une fois le temps écoulé, on invite les « abstinents » à venir rendre compte de leur expérience. Les animateurs peuvent aider les « abstinents » à formuler et analyser leur vécu. On souligne ainsi les mécanismes de l’influence du groupe et la difficulté d’y résister.
« Concernant la consommation de substances psychotropes, hormis la première consommation d’alcool qui semble encore se dérouler dans le cadre familial, l’initiation des jeunes aux substances telles que le tabac, le cannabis et l’ecstasy est généralement réalisée avec leurs pairs. Les chiffres concernant l’invitation à consommer du cannabis montrent que la proposition émane le plus souvent des amis et des copains. » (Source : Infordrogues)
On souligne aussi le droit et la liberté de résister à la pression, et comment cette liberté est renforcée par la construction d’une argumentation solide.
« [Ce jeu] vise à faire réfléchir (chaque jeune) sur l’importance du choix individuel par rapport à la pression des pairs au sein d’un groupe tout en (lui) apprenant les moyens de faire ce choix en individu qui prend ses décisions de façon autonome, libre. » (Source : Infordrogues)
Ici, on demande à chaque groupe d’identifier toutes les motivations pouvant amener à des consommations dépendantes. Le remue-méninge dure sept minutes.
Ensuite, un représentant de chaque groupe est invité à donner une ou deux motivations. Chaque proposition est placée sur une carte d’idées (mindmeister) projetée à la salle.
Puis on mène un exercice collectif de catégorisation pour regrouper les motivations sous trois grandes catégories : le lien social, le plaisir et l’auto-thérapie.
S’il reste du temps, on peut encore proposer une activité de remue-méninge pour définir la notion de dépendance, et encore une autre pour imaginer des alternatives permettant de répondre aux motivations de manière non dépendante.
Avez-vous réalisé des activités similaires dans vos établissements ? Nous reprendrons volontiers ce dispositif dans le futur et nous serions très heureux de l’améliorer.
Article publié sur le site françois Jourde
Dernière modification le lundi, 22 juin 2015