fil-educavox-color1

Article publié par Jacques Dubois en creative commons, initialement publié sur Prodageo
 
Quand deux personnes ne sont pas d’accord sur les critères pour juger de la qualité d’une réalisation, on risque de tomber dans des situations frustrantes. C’est souvent le cas quand un de mes enfants propose de faire de la cuisine …
 
 
Hier, mon fils sort tout fier de la cuisine en déclarant "Ça y est ! j’ai fini de préparer le gâteau au chocolat pour le dessert !" Pourtant, dès que je rentre dans la cuisine, je m’écrie "Non, mais ça va pas ! Tu as vu dans quel état tu as mis la cuisine ! Tu viens tout de suite ranger et nettoyer tout ça !"
 
Comme vous pouvez l’imaginer, nous n’avons pas les mêmes indicateurs de fin de tâche ni les mêmes critères de réussites. Dans le rôle du père, j’ai trois critères de réussite (les 3 B) :
 
· mon enfant mène son projet jusqu’au Bout,
· dans la Bonne humeur,
· et me rend une cuisine propre qui Brille.
 
J’attends de mes enfants qu’ils respectent ces critères qui sont à mes yeux non-négociables. Si ces trois critères sont validés, je considère que l’enfant a réussi son défi. Je me permets alors de rajouter deux critères ‘bonus’ qui ne sont que valorisant pour l’enfant :
 
· le gâteau est Beau !
· le gâteau est Bon !
 
En clair, si le gâteau est moche et pas terrible, cela n’enlève rien à la réussite de l’enfant (on pourra prendre le temps de discuter de la recette par la suite).
 
1 – Que s’est-il passé ?
 
Dans la situation initiale, mon fiston n’a pas intégré les bons critères et il s’est concentré sur le bonus. Je n’ai pas pris le temps de bien expliciter ces critères et de m’assurer qu’ils étaient bien intégrés par l’intéressé. A leur décharge, ça n’est que très récemment que j’ai pris le temps d’y réfléchir (et de vous partager dans ce billet ces pensées toutes fraîches…) Il va donc me falloir leur expliquer mes attentes lorsqu’ils se mettent à cuisiner car nous n’accordons pas la même valeur au rangement de la cuisine. L’image du pèlerin pourra peut-être les aider à s’organiser (en nettoyant la vaisselle sale au fur et à mesure par exemple).
 
2 – Suivre une recette, c’est une compétence !
 
C’est vrai, suivre une recette est une compétence qui a son importance (que l’on retrouve dans la vie professionnelle quand on suit une procédure). Cependant, je préfère souvent laisser un adolescent mener son projet culinaire seul et prendre le temps de relire avec lui la démarche adoptée en analysant le produit fini. J’aime lui laisser une certaine autonomie, quitte à ce qu’il se trompe : je ne vois pas l’erreur comme une faute à sanctionner mais plutôt comme une occasion d’apprendre.
 
3 – C’est bien beau tout cela, mais quel est l’intérêt d’en parler ici ?
 
Il me semble que l’on retrouve des situations très comparables dans de nombreuses formations ou situations professionnelles, où les critères de réussites et les indicateurs de fin de tâches ne sont pas explicités. Souvent des tâches annexes et fastidieuses sont attendues mais pas clairement demandées (comme le rangement de la cuisine), ou alors on est autant regardant sur la démarche adoptée que sur la production finale (notion de critères et de bonus).
 
L’idée est donc de préciser les objectifs et les critères comme dans l’alignement constructiviste de Biggs qui demande d’avoir une cohérence entre les objectifs visés, les critères d’évaluation et les méthodes (ou démarches) adoptées. Une telle approche permet de s’assurer du sens de ce que l’on propose, ce qui renforcera la motivation des participants.
 
Ces différents points (et un peu plus) sont présentés dans le dernier numéro du tableau : Evaluer, une compétence qui rime avec "éthique" qui mérite le détour. Enfin, nous avons plusieurs fois proposé à nos étudiants de définir les critères d’évaluation et de construire la grille avec eux, cela s’est toujours révélé très riche. Il faut bien garder en tête que la modification des comportements ne va pas s’effectuer du jour au lendemain. Tout cela doit se travailler dans la durée : les objectifs doivent être atteints à la fin de la formation, il n’est pas obligatoire de les atteindre avant … Et dans le cas d’un parent, Dieu sait si la formation est longue !
 
Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une bonne année ! De mon côté, je m’en vais partager ces réflexions à mes enfants, autour d’un gâteau au chocolat !
 
Jacques Dubois
@jackdub
Crédit photo gateau au chocolat CC-BY-SA 3.0 Heinhurd
Dernière modification le jeudi, 16 octobre 2014
An@é

L’association An@é, fondée en 1996, à l’initiative de la création d’Educavox en 2010, en assure de manière bénévole la veille et la ligne éditoriale, publie articles et reportages, crée des événements, valorise les innovations, alimente des débats avec les différents acteurs de l’éducation sur l’évolution des pratiques éducatives, sociales et culturelles à l’ère du numérique. Educavox est un média contributif. Nous contacter.