Il n'est plus envisageable d'imaginer qu'un simple copier/coller de ce qui est fait en enseignement général constitue une réponse à l'intégration du numérique dans les pratiques pédagogiques des enseignants des filières professionnelles. Par ailleurs l'intégration des nouvelles technologies au sein des filières professionnelles ne peut se limiter à la facilitation des objectifs de nature factuelle ou conceptuelle (séance de technologie) mais doit également prendre en compte l'atteinte d'objectifs de nature procédurale et métacognitive.
Nous avons d’ores et déjà manqué la précédente révolution; celle des pédagogies actives, laquelle aurait vraisemblablement facilitée l’intégration des nouvelles technologies. La filière restauration semble l’avoir compris et les travaux d’ores et déjà réalisés constituent un excellent début, cependant le numérique ne peut se résumer à la mise à disposition de quelques vidéos, fiches techniques médiatisées ou encore de l’usage d'un TBI (par ailleurs trop souvent utilisés en tant que simple vidéoprojecteurs).
L’intégration du numérique au sein des filières technico-professionnelles doit pouvoir reposer sur des modalités de formations et des modalités pédagogiques adaptées ; Facilitant ainsi la tâche aux enseignants qui se lancent et qui pourront en conséquence dans un premier temps se concentrer sur le contenu.
Les nouvelles technologies doivent permettre à terme :
- De personnaliser les parcours de façon rétroactive et proactive.
- Favoriser et développer les feedbacks et les interactions.
- Augmenter la durée d’exposition aux savoirs.
- Gérer les compétences et connaissances.
- Favoriser le développement de compétences cognitives de haut niveau.
- Faciliter l’insertion professionnelle.
- Apprendre en tout temps et en tous lieux.
- Rendre actif cognitivement.
- Favoriser la coopération et la collaboration etc.
- Rendre interactives et multimédias les séances dans une relation de plusieurs à plusieurs et pas seulement dans une relation de un à un.
Mais également de
- Faciliter la personnalisation des parcours (également d'un point de vue technique) par une gestion et une connaissance réelle des compétences de nos apprenants permettant de surcroît d'étendre cette individualisation aux périodes de formation entreprise.
- Faciliter l'insertion professionnelle
- Faciliter la formation tout au long de la vie et la création de réseaux personnels d'apprentissage techniques
- Accroître les relations entre les entreprises et les équipes pédagogiques
- Permettre la régulation non seulement de savoirs mais aussi de savoir-faire (car cela est désormais possible).
- Soutenir la performance technique et l'approche par compétences etc.
La tentation est grande de vouloir s’auto-féliciter, en faisant croire à tous que nous sommes dores et déjà parvenus à intégrer le numérique au sein de nos pratiques, concrétisé en cela par l'usage des fonctionnalités de base d'une quelconque ENT, ou encore par la mise en place ici ou là de quelques ressources ou travaux ; Cela serait confondre « Intégration et Usage » et pourtant cela semble en prendre le chemin...
Par ailleurs suite aux expériences que je mène sur le terrain, il s’avère indispensable, de sensibiliser les apprenants à ces nouvelles pratiques, dès le début de leur formation et si possible de façon interdisciplinaire. Ils doivent comprendre en effet qu’il s’agit d’une volonté commune à l’ensemble des acteurs de leur formation, depuis l’académie jusqu’aux professeurs en passant par la direction et l’administration. Cette volonté devrait pouvoir également se vérifier par la mise à disposition d’un minimum de matériels. Cependant si cette dernière n'est pas vérifiée il existe malgré tout des solutions et notamment certaines modalités issues du BYOD que j'utilise d'ailleurs chaque jour.
Si les travaux que je mène aboutissant à la conception de modèles d’usages en correspondance avec les types de séances technico-professionnelle (transposables aux autres filières), constituent au vu des résultats une réponse efficiente à une intégration du numérique réfléchie au sein des pratiques pédagogiques des enseignants des filières professionnelles, le plus difficile reste à faire; Poursuivre le développement de ces usages en les rendant toujours plus efficients et cela en tenant compte des évolutions sociales et techniques. Il convient à mon opinion pour y parvenir de mettre en place une veille pédago-numérique active, spécifique aux filières professionnelles et techniques afin de tenir compte des spécificités pédagogiques et didactiques.
L’intégration des nouvelles technologies est un véritable challenge pour beaucoup d’enseignants des filières professionnelles, il est par conséquent fondamental d’être en mesure de leur démontrer les bénéfices professionnels et personnels dont ils peuvent tirer profit, ce qui bien entendu contribuera à leur volonté de s’impliquer toujours davantage. Pour ce faire ils devront bénéficier d’accompagnements non seulement en termes de formations signifiantes aux outils mais aussi et surtout au niveau des méthodes pédagogiques permettant de mettre en œuvre les premiers avec efficience.
L'intégration du numérique au sein des filières professionnelles ne doit pas être ce que sont les effets spéciaux au cinéma mais reposer sur de réelles modalités de formation et pédagogiques.
En ce qui me concerne, plus qu’une façon de faire et de penser, le numérique est finalement une façon d’être, qui se matérialise en notre capacité à utiliser les nouvelles technologies pour créer des activités d’apprentissage, à la fois signifiantes, « activantes » et contextualisées, mettant en œuvre des interactions diverses ayant pour objectif le développement et le soutien de compétences.
Benoît Martinet (Enseignant et ingénieur en pédagogie multimédia)
Dernière modification le vendredi, 22 mai 2015