fil-educavox-color1

Le ministre du secondaire vient d’annoncer sur RTL que la ministre du supérieur planchait sur un nouveau système. Emmanuel Macron, de son côté, déclarait dans son interview au Point  " Nous ferons en sorte que l’on arrête de faire croire à tout le monde que l’université est la solution pour tout le monde. Et on ne tirera plus les gens au sort ".

Il semble que la pensée complexe se simplifie en haut lieu finalement. Peut-on résoudre les problèmes d’ " orientation dans le supérieur " simplement à partir de la question de l’affectation ou de la répartition ?

Les composantes de l’orientation

Simplifions, à notre tour pour commencer. On peut représenter le problème de l’orientation avec ce schéma :

Demande         Système de d’attribution         Offre de formation

Que recouvre " la demande " ? Chaque lycéen formule tout un ensemble de demandes qui souvent recouvrent des intentions bien différentes avec divers critères : s’éloigner ou au contraire rester près de chez soi ; accord avec ses capacités scolaires ou volonté d’explorer de nouvelles matières, choisir une formation qui permette de s’insérer rapidement, ou repousser l’insertion ; etc… Et " la " demande est une combinaison entre celle du jeune lui-même et celle de ses parents. La sienne est un effet des « ambitions » parentales.

L’offre est en fait une combinaison d’offres produites par divers acteurs, l’état, mais aussi les régions qui favorisent ou non l’implantation de divers organismes de formation, divers groupes financiers supportant des écoles plus ou moins grandes, diverses organisations territoriales et économiques, etc … L’entrée dans ces diverses formation relève de contraintes différentes, financières, sélectives, « de droit » (par l’obtention du baccalauréat).

APB est le système qui gère la quasi-totalité des affectations dans les formations du post-bac. Ce système a pris la succession du système RAVEL mis en œuvre à la fin des années 80. Schématiquement, il permet de recevoir l’ensemble des demandes des lycéens et de produire, pour chaque formation une liste ordonnée de demandeurs.

Avant ces outils informatiques, le lycéen envoyait des dossiers dans divers organismes, parfois il passait des concours, et en attendant les réponses, il faisait un beau matin la queue pour s’inscrire dans une université.

Aujourd’hui le lycéen se trouve confronté à une tâche extrêmement complexe car tout est virtuel et possible. Très peu de limites matérielles sont visibles. Il peut matériellement multiplier les demandes, ça ne coûte rien. Comment se renseigner réellement sur la nature de ces multiples formations ? Comment élaborer une stratégie d’inscription (mettre en ordre par exemple ses demandes) lorsque l’on ne connait pas le « mode de calcul » d’APB ? D’où les réclamations pour rendre public l’algorithme de l’application. Ce qui fut fait d’ailleurs, mais sa complexité étant telle, que sa connaissance ne peut réellement aider.

L’orientation, des actions organisées

L’orientation est une affaire d’état depuis longtemps et en particulier au sein du système éducatif.

C’est bien sûr l’organisation de la circulation des élèves, notamment grâce aux procédures d’orientation et d’affectation. C’est aussi l’organisation même de ce système et la répartition des offres de formations. Ce sont les formes d’aides organisées, proposée ou imposées aux élèves et aux familles. Et depuis le milieu des années 90, c’est l’éducation à l’orientation qui est promue. J’ai largement écrit dans ce blog sur les difficultés concernant ces différentes « actions organisées » et je ne vais pas reprendre ici les arguments.

Mais les difficultés d’orientation observées à l’articulation du secondaire et du supérieur ont sans doute quelque chose à voir avec l’état dans lequel les élèves y arrivent, état sans doute produit au moins en partie par l’ensemble de ces actions organisées tout au cours de leur cheminement dans le supérieur.

Et quand je parle d’ « actions organisées », je parle aussi des actions non-réalisées… Quand on compare les textes (circulaires) et les mises en œuvre…

L’orientation, un choix rationnel ?

On peut aussi se poser cette question. Les difficultés d’orientation sont souvent présentées comme étant des « erreurs » d’orientation.

Une erreur suppose qu’il existe une solution qui aurait pu être trouvé à la condition d’avoir la bonne information, le bon raisonnement, la bonne volonté de « bien » faire. Admettons temporairement cette conception. Peut-on envisager un instant qu’il soit possible d’informer totalement ? Peut-on envisager que cette quantité d’informations puisse être assimilée ? Que chaque lycéen puisse « raisonner » de manière adéquate à partir de ces informations ? Et on peut poursuivre ce questionnement.

Autrement dit l’orientation ne peut être réduite à un choix rationnel.

Et que dire des " 60% d’échec en fac " ? Allez lire l’article de Camille Stromboni : " Les 60 % d’échecs à la fac masquent une réalité plus complexe ".

Méfions-nous des mondes rationnels, justes, parfaits.

Bernard Desclaux

Dernière modification le lundi, 04 septembre 2017
Desclaux Bernard

Conseiller d’orientation depuis 1978 (académie de Créteil puis de Versailles), directeur de CIO à partir de 90, je me suis très vite intéressé à la formation des personnels de l’Education nationale. A partir de la page de mon site ( http://bdesclaux.jimdo.com/qui-suis-je/ ) vous trouverez une bio détaillée ainsi que la liste de mes publications.
J’ai réalisé et organisé de nombreuses formations dans le cadre de la formation continue pour les COP, , les professeurs principaux, les professeurs documentalistes, les chefs d’établissement, ainsi que des formations de formateurs et des formations sur site. Dans le cadre de la formation initiale, depuis la création des IUFM j’ai organisé la formation à l’orientation pour les enseignants dans l’académie de Versailles. Mes supports de formation sont installés sur mon site.
Au début des années 2000 j’ai participé à l’organisation de deux colloques :
  • le colloque de l’AIOSP (association internationale de l’orientation scolaire et professionnelle) en septembre 2001. Edition des actes sous la forme d’un cd-rom.
  • les 75 ans de l’INETOP (Institut national d’étude du travail et d’orientation professionnelle). Edition des actes avec Remy Guerrier n° Hors-série de l’Orientation scolaire et professionnelle, juillet 2005/vol. 34, Actes du colloque : Orientation, passé, présent, avenir, INETOP-CNAM, Paris, 18-20 décembre 2003. Publication dans ce numéro de « Commentaires aux articles extraits des revues BINOP et OSP » pp. 467-490 et les articles sélectionnés, pp. 491-673
Retraité depuis 2008, je poursuis ma collaboration de formateur à l’ESEN (Ecole supérieure de l’éducation nationale) pour la formation des directeurs de CIO, ainsi que ma réflexion sur l’organisation de l’orientation, du système éducatif et des méthodes de formation. Ce blog me permettra de partager ces réflexions à un moment où se préparent de profonds changements dans le domaine de l’orientation en France.
Après avoir vécu et travaillé en région parisienne, je me trouve auprès de ma femme installée depuis plusieurs années près d’Avignon. J’y ai repris une ancienne activité, le sumi-e. J’ai installé mes dernières peintures sur Flikcr à l’adresse suivante : http://www.flickr.com/photos/bdesclaux/ .