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Un de perdu, dix de retrouvés. Enfin presque. Ou pas. Comme ce qui est arrivé dans une école où en pleine canicule une dizaine de ventilateurs ont été offerts par un parent d’élève et aussitôt repris par l’Inspection Académique. Réactions indignées et outrées sur les réseaux sociaux. Incompréhension totale. Il fallait s’y attendre.

 

Certes, on peut tenter de comprendre la position de l’Inspection car, en effet, on ne met pas n’importe quel matériel électrique dans une école et il y a peut-être un certain règlement à respecter. Je me fais l’avocat peu convaincu car, à circonstances exceptionnelles, fonctionnement exceptionnel.
 
En termes d’image, à l’heure où le moindre pet de lapin se retrouve sur les réseaux sociaux, peut-on encore imaginer avoir ce genre de réaction sans que cela ne retombe massivement sur la g… ? Dans une agence de comm, on dirait que « c’est la faute du stagiaire ». Ni plus, ni moins.
 
Mais, surtout, ce qui m’indigne c’est cette absence d’argument qui prévaut trop souvent dans la société française. On n’explique pas ou alors qu’après du bout des lèvres et nombre de polémiques naissent de situations où tel ou tel acte, tel ou tel comportement est interdit. Point barre. Pourquoi ? On n’en sait rien mais c’est comme ça. Avez-vous déjà eu droit à la remarque classique « on ne met pas ses coudes à table » ? Il y a 99,999999% de chances que votre « agresseur » ne fasse que répéter bêtement une tradition vieille de plusieurs siècles. Demandez-lui la raison profonde de cette remarque, le « pourquoi », et profitez du silence ambiant. Nulle question de style, de tenue à table. Cette remarque nous vient du Moyen Âge où, selon la première hypothèse, lors des repas, les convives étant nombreux et la place limitée, il valait mieux ne pas poser les coudes sur la table et ainsi s’étaler et gêner ses voisins. Selon la seconde hypothèse, certains convives, gagnés par l’ambiance « chaleureuse » du repas, pouvaient masquer une dague derrière leur coude. Ne pas mettre les coudes sur la table permettait d’avoir les mains bien en évidence. Résultat : des générations d’enfants traumatisés par une remarque dont la justification n’a plus cours.
 
J’ai tenté récemment d’en savoir plus sur un papier qui m’était réclamé par un service administratif. Je voulais connaître le « pourquoi » car, de prime abord, cela ne me paraissait pas logique. Plusieurs services m’ont renvoyé vers le service supérieur car « c’est le service ### qui demande », ce qui ne répondait absolument pas à ma question. J’ai fini par avoir la réponse et une justification tout à fait intéressante qui m’a fait regarder ce document administratif non plus comme un énième truc « ras-le-bol » à remplir mais comme un document utile. Parce que l’on m’a fourni le « pourquoi ».
 
L’exemple des ventilateurs est symptomatique de cette éducation que l’on délivre encore trop souvent. Un pourquoi arrivé trop tard et franchement peu justifié dans ce cas si ce n’est de respecter une sacro-sainte hiérarchie. Avec les enfants (et avec les adultes aussi), même si c’est parfois fatiguant et que l’on a plus envie de s’en tenir à « parce que c’est comme ça », il reste important - et c’est tout l’enjeu de la communication positive - d’expliquer. Pas sûr que vous arriviez à convaincre et il faudra peut-être en passer par une case un peu plus sévère mais, au moins, le message est passé et argumenté. Il permet de donner le libre choix de respecter ou non les règles en connaissance de cause et de faire ses propres expériences… Souvenir de cet adolescent à qui j’avais pourtant longuement expliqué les dangers d’un fer à souder et qui a préféré vérifier par lui-même en mettant le doigt là où ça fait mal… Au propre comme au figuré...
Dernière modification le vendredi, 19 juillet 2019
Cauche Jean-François

Docteur en Histoire Médiévale et Sciences de l’Information. Consultant-formateur-animateur en usages innovants. Membre du Conseil d'Administration de l'An@é.