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Bon, vous connaissez l’histoire maintenant. Elle fait le buzz sur les réseaux sociaux depuis quelques jours. À tel point que la presse en ligne s’est emparée de l’affaire.
Je ne veux pas y revenir. Je vous ai mis en bas de cette page les liens vers l’article de Slate ainsi que vers d’autres billets de blogues qui commentent le fait ou reproduisent la première version du billet supposément censuré.

J’ai, de la même manière et pour ma part, demandé à Ghislain Dominé, puisqu’il s’agit de lui, dit @lannoy29 sur Twitter — ne cherchez pas, il a supprimé son compte — s’il m’autorisait à reproduire ici-même l’intégralité de son article. J’aurais évidemment commenté la chose car je ne sais pas vraiment me retenir, dans ces moments-là.

Je n’ai reçu aucune réponse de Ghislain. Je le comprends. J’ai l’impression qu’il souhaite prendre quelques distances avec tout ça. Je n’écrirai donc pas cet article.
[Mise à jour : En fait, Ghislain n’était pas défavorable à une republication. Néanmoins, je ne le ferai pas pour deux raisons : le billet en cause est déjà largement reproduit, notamment dans les liens en bas de ce billet, et, par ailleurs, la version disponible dans le cache des moteurs n’est pas la version définitive]

En revanche, puisqu’on est entre nous, je peux dire quelques mots du billet que j’aurais aimé écrire à cette occasion… 

J’aurais aimé par exemple évoquer le comportement insupportable de certaines franges — je me refuse à mettre toutes et tous les cadres dans le même « sac » — de l’encadrement administratif comme pédagogique. Non contents de freiner des quatre fers et en catimini — je sais, c’est acrobatique — pour la mise en œuvre de certaines réformes venues d’« en haut », je pense par exemple à la réforme des lycées, au socle commun et, plus récemment, à l’école numérique, ces cadres entretiennent et nourrissent leur inculture générale, dont la numérique n’est qu’un élément, en assouvissant un autoritarisme fébrile, stupide et définitivement obsolète. Quand c’est aux dépens de ceux qui innovent et inventent la pédagogie d’aujourd’hui, c’est d’autant plus inadmissible.

Demain, ils feront la même chose pour les programmes, les examens, les méthodes d’enseignement… d’autres réformes indispensables encore.

Il devrait être possible, pour avancer, de faire sans eux.

De faire au moins sans ceux qui s’avèrent incapables de s’adapter, de changer de posture, de cesser de donner des réponses avant que les questions aient été formulées. Je disais tout récemment, dans un article (1) où je proposais, à l’arrivée du numérique, de nouvelles missions aux inspecteurs pédagogiques, qu’il leur faudrait se changer en animateurs de communautés en ligne et qu’ils devraient faire montre de beaucoup de disponibilité, d’humilité et d’attention. 
Il devrait être possible de faire sans ceux qui n’en seront pas capables.

Et, pour revenir à notre cas d’école, si j’avais pu m’exprimer à ce sujet, j’aurais dit que les hiérarques concernés en ont particulièrement manqué de disponibilité, d’humilité et d’attention. Si le billet de Ghislain avait été polémique, ce qu’il n’est pas, s’il avait été sévèrement critique, ce qu’il n’est qu’à peine, tout aurait même pu se régler par la négociation et la compréhension de l’autre. Non, en l’occurrence, nos chefaillons frileux ont, semble-t-il, préféré l’oukase et l’injonction verticale, avec ouverture de parapluie à chaque étage.
C’est juste lamentable…

J’aurais aimé aussi, dans ce billet que je n’ai pas écrit, pouvoir dire ici, en public, devant cet auditoire universel dont je ne cesse de vanter l’heureuse existence, devant vous donc, tout le bien que je pense de celles et ceux dont j’ai négligé les travaux ou oublié de relater les aventures innovantes. En l’occurrence, au-delà du cas de Ghislain, pour lequel j’avais déjà et j’ai toujours de l’estime, j’aurais aimé vous dire que j’aime ce que vous faites, au jour le jour, dans vos classes, vos histoires de pédagogie, vos problèmes, sur vos blogues, sur les réseaux sociaux, sur les estrades des colloques, dans les journaux — les vrais.

Oui, j’aime vos questionnements, vos doutes, vos incertitudes comme dit Ghislain, vos atermoiements, vos connivences, vos échanges, vos productions désintéressées, vos hypothèses, vos interrogations, vos engagements. J’aime tout, je prends tout.

Soyons-en certain, c’est vous qui faites avancer l’école numérique et pas les pénibles évoqués plus haut.
C’est tout cela que j’aurais aimé écrire, si l’on m’en avait donné la permission. 

[Mise à jour : La première version de cet article disponible sur mon blogue joue, comme Ghislain, avec les incertitudes. Certains n’ont pas compris ce jeu. J’ai donc, pour plus de clarté, car tout est vrai, supprimé ces mentions]

Michel Guillou @michelguillou

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Pour aller plus loin et comprendre les faits :
 
Ralentirtravaux, Yann Houry  : L’enseignant, l’enfant et la hiérarchie
Sicestpasmalheureux, François Lamoureux : « De l’incertitude 2.0 » par #Lannoy29
Chronique Éducation, Philippe Watrelot : Critique(s) et engagé(s)
Peut mieux faire !, Laurent Fillion : Médiocrités
[Mise à jour : Depuis, la presse a largement commenté ces faits. Reportez-vous aux articles de Libération, de l’Express et de France3 Régions (il y en a peut-être d’autres).]
Crédit photo : Abode of Chaos via photopin cc
1. Inspection pédagogique : vers l’animation de communautés en ligne ? http://www.culture-numerique.fr/?p=1749
Dernière modification le samedi, 01 novembre 2014
Guillou Michel

Naturaliste tombé dans le numérique et l’éducation aux médias... Observateur du numérique éducatif et des médias numériques. Conférencier, consultant.