VERS LE HAUT propose son analyse et ses propositions pour faire évoluer le système du baccalauréat, en s’inspirant des examens qui clôturent les études secondaires à l’étranger.
Réformer le bac : que veut faire le Gouvernement ?
Tout en reconnaissant la valeur symbolique du BAC, Emmanuel Macron a proposé lors de la campagne présidentielle de le réformer en profondeur, en privilégiant l’évaluation sous forme de contrôle continu et en réduisant l’examen final à 4 épreuves. Cette proposition repose sur deux objectifs :
- Renforcer le continuum entre le lycée et les études supérieures. A terme, chaque établissement du supérieur pourrait exiger des « prérequis » aux lycéens qui souhaiteraient s’inscrire dans leur filière, avec une note minimale dans les disciplines présentées à l’examen du baccalauréat.
- Economiser du temps et de l’argent
- Le coût de l’examen s’élève à 1,5 milliards d’€[1] par an soit 2,2% du budget annuel de l’Education Nationale.
- L’organisation des épreuves consommerait 8% du temps scolaire pour l’ensemble des lycéens.
- L’échec à l’université coûte très cher.
« Je pense qu’il faut qu’on retrouve son utilité profonde, qui est non pas d’être une forme d’évaluation finale de l’élève, mais (…) un tremplin pour la suite de son parcours […] », déclarait Jean-Michel Blanquer à propos du BAC sur France Culture, le 4 juin dernier.
Décryptage Vers Le Haut :
Au-delà des modalités pratiques de l’examen, ce qui est en jeu, c’est la finalité de l’épreuve et l’organisation de notre système éducatif.
Le BAC servait à l’origine d’examen d’entrée dans le supérieur. Il y avait 10 000 bacheliers par an dans les années 20, 30 000 dans les années 50. Il y en a eu plus de 600 000 en 2015.
Avec un taux de réussite de 88% en 2016 (taux record), le bac est devenu un diplôme auquel devrait en théorie aspirer toute une classe d’âge. Il permet à n’importe quel bachelier de s’inscrire dans n’importe quelle université (sous réserve du tirage au sort et des algorithmes de l’Admission Post Bac – APB).
En changeant de taille, le bac a aussi changé de nature. Pourtant, nous n’en avons pas tiré les conséquences. Cela pose deux questions majeures.
- 1ère question : quel lien entre le lycée et le supérieur ?
Avec le projet Macron, l’enjeu est la continuité entre le Bac-3 et le Bac+3. Et donc une évolution aussi bien du lycée que des conditions d’entrée dans l’enseignement supérieur, notamment à l’université.
Le lycéen pourrait choisir « ses » matières en fonction de ce qu’il souhaitera étudier dans le supérieur. L’université pourrait de son côté poser des critères d’admission.
De la part du Gouvernement, l’objectif serait de diminuer le taux d’échec à l’université. Il faut savoir que :
- Seulement un tiers des bacheliers généraux et 2,7% des bacheliers pro qui entrent à l’université, réussissent leur licence en 3 ans. 56% des bacheliers pro sortent sans diplôme de l’université (contre 9% des bacheliers généraux).
- Le coût annuel d’un étudiant en France s’élève à près de 14 000 euros.
Cette réforme du lycée, de l’orientation et des conditions d’entrée à l’université est encore assez floue et peu assumée du côté de la rue de Grenelle.
- 2ème question : quid de ceux qui n’ont pas le bac ou qui ne seront plus admis à l’université ?
A cette question, le gouvernement ne semble pas encore apporter de réponses, alors même que c’est un enjeu crucial pour une réforme équilibrée, qui profite à tous les jeunes.
Il est primordial de s’assurer que ceux qui ne vont pas jusqu’au bac ou qui ne peuvent accéder à l’université, trouvent leur place dans notre système de formation, à travers des filières qui soient tout autant valorisées, et non à la marge : apprentissage, filières professionnelles et technologiques…
Cela rend indispensable une profonde transformation de notre système éducatif.
Le Bac et au-delà !
Au-delà de l’examen du BAC, Vers Le Haut préconise un changement du système scolaire où tous les talents seraient mieux valorisés.
Un modèle hérité du passé
L’école française a gardé un modèle pyramidal hérité du passé, dont les deux principales finalités étaient :
- L’acquisition par l’ensemble de la population d’un socle de base, sanctionnée par l’obtention du certificat d’études à la fin de l’instruction obligatoire,
- La formation d’une élite, sélectionnée progressivement par des examens et des concours, jusqu’à des études longues fondées sur l’excellence intellectuelle.
Dans ce schéma, ceux qui ne poursuivaient pas leurs études continuaient leur formation dans des écoles professionnelles ou hors de l’école, notamment avec l’implication d’autres acteurs : les employeurs. On se formait à un métier via l’apprentissage, le tutorat informel, « sur le tas »… et cette situation n’avait rien d’honteux, puisqu’elle concernait la majeure partie des jeunes.
L’évolution économique et sociale, avec le déclin de l’agriculture, de l’industrie, les révolutions technologiques, l’aspiration à une plus grande ouverture sociale de l’élite… justifiaient une évolution de notre système de formation.
La massification du nombre de bacheliers aurait dû conduire à une évolution du système
Mais l’allongement progressif de l’instruction obligatoire, puis la transformation du BAC en certificat d’études nouvelle génération (avec l’objectif de conduire 80% d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat) aurait dû conduire à une réflexion de fond sur l’évolution de ce schéma pyramidal, pas seulement à une hausse de moyens.
Au lieu de cela, on a gardé le schéma ancien, avec comme critère de réussite, la poursuite d’études longues, sans trop prendre en considération les élèves qui avaient d’autres talents à faire valoir et qui ne rentraient pas dans le « moule » d’antan. Le déploiement des formations professionnelles est apparu comme un pis-aller. Les employeurs ont progressivement été mis sur la touche et se sont déchargés de leur responsabilité éducative.
Comment passer de la pyramide à l’étoile
Pour intégrer l’impact de la massification de l’enseignement, il faudrait passer d’un système pyramidal à un système en étoile, avec un cœur commun et un souci du développement des talents de chacun, par des parcours de réussite diversifiés.
- Il est impératif de développer les formations techniques et professionnelles comme voies d’excellence. Le changement dépend de l’école mais pas seulement. La revalorisation des filières professionnelles passe avant tout par un changement culturel dans le monde du travail : l’ascension sociale ne doit plus relever seulement du diplôme mais aussi de l’entreprise.
- Le monde du travail (entreprises, associations, fonction publique…) n’est pas assez impliqué dans l’éducation et la formation. Il faut renouer une alliance constructive entre ces univers, pour le bien des jeunes.
VERS LE HAUT PROPOSE
- La suppression de la dénomination « bac général »
- Beaucoup plus de souplesse pour diversifier les parcours et les voies de réussite, sans enfermer les jeunes dans un schéma unique
- Un renforcement de l’orientation tout au long de la scolarité
- La mise en place de programmes « hauts potentiels » dans les entreprises pour les jeunes qui sont embauchés après une formation courte, et que les entreprises veillent à proposer de meilleurs parcours d’ascension sociale à leurs salariés.
- Une politique beaucoup plus volontariste en matière de formation tout au long de la vie, avec des financements facilités pour les salariés qui ont suivi des filières courtes et qui souhaiteraient reprendre leurs études en cours de vie professionnelle.
[1] Etude du SNPDEN (syndicat de chefs d’établissement), juin 2013. Ce chiffre est 30 fois supérieur à l’estimation communément admise par la rue de Grenelle.
Dernière modification le jeudi, 15 juin 2017