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Les minéraux critiques sont essentiels pour le développement des énergies propres elles même incontournables pour assurer l’atténuation du changement climatique. Cependant l’augmentation de la demande, la volatilité de leur prix, font apparaître des goulets d’étranglement de la chaîne d’approvisionnement et des tensions géopolitiques.

Minéraux et métaux essentiels : demande record en 2023 et marché instable

La demande de minéraux critiques a fortement augmenté en 2023, tirée le développement des énergies renouvelables et l’expansion du marché des véhicules électriques. La progression atteint 30% pour le Lithium et 8 % à 15 % pour le nickel, le cobalt le graphite et les autres terres rares.

La demande en cuivre et en aluminium a aussi fortement qui s’est accompagnée d’une extension significative des réseaux électriques et pour assurer la fabrication des moteurs de voitures électriques dont les ventes mondiales ont augmenté de 35 %.

Paradoxe apparent, bon nombre des ces matériaux ont vu leur prix baisser nettement : -75 % pour le lithium et – 30 % à – 45 % pour le cobalt, le nickel et le graphite. Cette chute des cours résulte d’une croissance de l’offre, notamment en Afrique, Indonésie et Chine, qui a largement dépassé la demande, d’une part, et de la correction d’une hausse disproportionnée en 2021-2022, d’autre part. Toutefois des fluctuations de prix, surtout à la hausse, sont prévisibles à l’avenir comme on va le voir plus loin.

Turbulences en vue

D’après le rapport publié par l’Agence Internationale de l’Energie le 17 mai 2024 il faut s’attendre à des déséquilibres entre l’offre et la demande au cours de la prochaine décennie. En se basant sur les capacités de production existantes et en construction d’ici à 2035, il apparaît qu’elles ne pourraient pas couvrir plus de 70 % des besoins en cuivre et 50 % des besoins en lithium et que la balance que offre/demande pour le cobalt et le nickel est à peine équilibrée. Si les capacités totales de production de graphite et de terres rares sont suffisantes, leur concentration géographique n’en garantit pas la disponibilité, pour mémoire : plus de 90 % du graphite et 77 % des terres rares raffinées proviennent de Chine.

Croissance du marché et bénéficiaires

La transition énergétique par le déploiement de production d’électricité issue des énergies renouvelable de l’énergie va peser de plus en plus sur la demande globale de minéraux critiques qui pourrait tripler d’ici à 2030 et quadrupler en 2040. Les croissances les plus fortes sont attendues pour le lithium à cause de son utilisation dans les batteries et pour le cuivre qui devient un constituant essentiel des automobiles à raison de 50 à 100 kg par véhicule. En valeur, le marché des principaux minéraux de la transition énergétique (cuivre, lithium, nickel, cobalt, graphite et terres rares) pourrait passer de 270 milliards de dollars en 2023 à près de 800 milliards de dollars d’ici 2040 dont plus d’un tiers pour le cuivre.

Les principaux bénéficiaires de cette explosion du marché seront l’Amérique Latine dont la production de minéraux critique dépassera 100 milliards de dollars en 2030, L’Indonésie capitalisera sur sa place de premier producteur mondial de Nickel, la république démocratique du Congo consolidera sa position de premier pays producteur de Cobalt et la Chine produira plus de 80 % des terres rares consommées dans le monde.

Quadrature des risques

La concentration de ce secteur minier particulier doit surtout être observée à travers le prisme de la propriété des infrastructures d’extraction. Les entreprises américaines et européennes jouent un rôle majeur pour les approvisionnements en cuivre et en lithium, tandis que les entreprises chinoises ont un rôle plus important pour la production de nickel et de cobalt, bien que ces minéraux soient extraits hors de leur frontière. Bien évidement ce n’est pas neutre sur le plan géopolitique.

L’évolution de la demande et la fluctuations des cours de ces matières premières influencent le rythme des investissements dans de nouvelles capacités de production à court-moyen terme et le risque de rupture d’approvisionnement ne peut être exclus.

Les risques environnementaux des activités minières ne se limitent pas à pollution des sols des sites d’exploitation. Sans prévention de la pollution de l’eau et de l’air, l’augmentation de de l’extraction des minéraux critiques pour assurer la transition énergétique deviendra une menace pour des écosystèmes distants. De plus les opérations de raffinage ne peuvent faire l’impasse sur la réduction de leur intensité carbone, notamment quand elles ont recours à de l’électricité produite par des centrales à charbon.

La hausse de l’extraction des minéraux critiques s’accompagne aussi d’un risque d’inflation d’effets socio-économiques délétères (conditions de travail indignes, corruption,…) si les codes et contrats miniers ne sont pas révisés pour garantir les droits des mineurs et la transparence de la gestion des ressources et de sa valorisation.

Quel avenir ?

La part des énergies renouvelables dans la production mondiale d’électricité à dépassé 30 % en 2022. La tendance restera orienté à la hausse avec le développement des ressources photo-voltaïques et éoliennes à conditions de maîtriser l’usage des minéraux critiques dont elle dépendent.

La diversification et l’innovation sont les meilleures stratégies pour gérer les problèmes de dépendance des chaînes d’approvisionnement. Parallèlement aux indispensables investissements dans l’exploration et l’exploitation de gisements nouveaux, on ne pourra pas faire l’impasse sur la prévention de leur impact socio-économiques et environnementaux, ainsi que que sur l’optimisation du recyclage et la substitution par d’autres matériaux plus abondants et plus équitablement répartis sur le globe.

Xavier Drouet

https://hommesetsciences.fr/transition-energetique-perspectives-critiques-pour-les-mineraux/

(Commentaires sur le site )

Principales références

Global Critical Minerals Outlook 2024, International Energy Agency

World Energy Outlook 2023, International Energy Agency

Dernière modification le vendredi, 24 mai 2024
Drouet Xavier

Xavier DROUET, 63 ans, est ancien élève de l'École Normale Supérieure où il a étudié la Physique et la Biochimie. Il est aussi Docteur en Médecine.
Après une carrière scientifique dans la recherche académique, appliquée et industrielle, il a dirigé plusieurs sociétés à fort contenu technologique pendant 15 ans et consacré 8 années à soutenir la recherche, l'innovation et le développement économique au niveau régional et national à des postes de direction au ministère de la Recherche et dans les services du Premier Ministre en France.
Depuis 2015 il exerce une activité d'expertise et de consultant pour accompagner des projets de créations ou de croissance d'entreprises de la microentreprise unipersonnelle à la start-up «techno».
Il est également auteur et conférencier (sciences, économie, stratégie) pour le compte d'entreprises, d'organisations de diffusion de la culture scientifiques et de media d'information pour les professionnels ou le « grand public ».

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