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La série de photographies C’était l’été de Maximilien Schaeffer présentée au Festival Planches Contact à Deauville évoque la fugacité du temps et fait référence à la littérature. Maximilien Schaeffer a suivi les traces de Marguerite Duras à l’Hôtel des Roches Noires à Trouville-sur-Mer. Des textes caviardés proviennent de La Recherche de Marcel Proust et font naître de nouvelles phrases en résonance à ses sources d’inspiration.

Une jeune femme en maillot de bain rouge souvent de dos pose à la piscine olympique de Deauville, aux planches et en bord de mer au Havre, formant de délicates figures géométriques. Elle peut être accompagnée d’une petite fille.

C’est par la photo que Maximilien Schaeffer souhaite suspendre le temps.

Photographe depuis une dizaine d’années, il évolue dans le collectif de photographes La Clic (Essonne) et le collectif d’artistes Hélium de la Vallée de Chevreuse (Yvelines).

Fatma Alilate : Peut-on dire que vous êtes un photographe littéraire ? Vous insérez des textes de La Recherche de Marcel Proust dans votre exposition.

Maximilien Schaeffer : En fait, je déconstruis pour reconstruire ce que je souhaite dire. C’est ce travail que j’ai fait à partir des textes de Proust. Pour mon projet au Festival Planches Contact, ma série est en lien avec l’univers de Marguerite Duras et notamment son livre L’été 80.

FA : Vous pouvez y revenir ?

MS : Libération lui avait commandé des chroniques. Elle passe un été dans son appartement aux Roches Noires duquel elle observe tous les jours des personnes de sa fenêtre et un enfant. C’est un été particulièrement pluvieux. Cet enfant est dans une colonie de vacances, il est seul et il n’arrive pas à jouer avec les autres enfants. Il a du mal à nouer des relations.

FA : Elle était très observatrice et l’enfance est aussi un de ses thèmes.

MS : Exactement. Ce livre a été très nourrissant pour ce travail. Car il coïncide avec ce que je veux exprimer : les rendez-vous manqués, un décalage au monde, l’absence.

FA : Il y a quatre, cinq photographies qui représentent la vue des fenêtres des Roches Noires.

MS : C’est une observation contemplative. Et j’ai pu entrer aux Roches Noires qui est désormais un ensemble de résidences privées.

FA : Pourquoi le choix de la photographie ?

MS : Un moment donné ça a été mon moyen d’arrêter le temps. Je vois le temps qui avance, qui passe.

FA : Vous êtes jeune. Vous avez cette conscience du temps qui passe depuis longtemps ?

MS : Depuis une dizaine d’années.

FA : Le titre de votre série C’était l’été est plutôt mélancolique.

MS : Ce titre traduit un ressenti. C’était l’été, je m’en réjouissais, il est passé sans que je m’en aperçoive.

FA : On pense à Proust, ce sont des traces de souvenirs.

MS : Proust c’est le sommet du souvenir. Je ne connais pas d’autres auteurs qui soient capables de fournir autant de détails. Il fait vivre le souvenir à quelqu’un qui ne l’a pas vécu lui-même.

FA : Vous le relisez ? Il y a cinq, six pages caviardées qui encadrent vos photographies.

MS : Oui, je mets des marque-pages. Au cours de mes lectures d’A la recherche du temps perdu, j’ai une façon de voir la page dans son ensemble. Des mots m’interpellent, je regarde si autour il y a d’autres mots pour construire mon propre récit à travers Marcel Proust.

FA : Vous avez choisi les Roches Noires, la plage du Havre, et la piscine olympique de Deauville qui est à côté du Point de Vue où vous exposez.

MS : Des travaux se sont déroulés dans cette piscine. Une photo est présentée dans l’exposition mais j’en ai réalisées d’autres que je souhaite exposer.

FA : Comment avez-vous procédé pour cette série ?

MS : C’est une série composite. Il y a de la chambre photographique, du moyen format, des photos argentiques et du numérique.

FA : Vous avez tout mis.

MS : Oui. Habituellement, je travaille avec l’argentique. Mais là, le temps était compté. C’était pour moi une grande nouveauté. Avant je travaillais sur des projets au long court, j’avais le temps de tout faire mais pour cette expérience, il y avait cette contrainte temporelle de six mois pour finaliser un projet. C’était aussi une source d’apprentissage.

FA : Qu’avez-vous retenu de cette expérience photographique ?

MS : Je retiens une aventure, un défi et une certaine manière de grandir dans la photographie.

FA : Ce sont aussi des échanges avec les photographes ?

MS : C’est vraiment super de rencontrer autant de photographes avec des profils différents.

FA : Et des personnalités différentes.

MS : Exactement. Parfois c’est difficile, mais c’est surtout enrichissant.

Propos recueillis par Fatma Alilate

Festival Planches Contact - Deauville
Du 19 octobre 2023 au 5 janvier 2025
Maximilien Schaeffer

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Maximilien Schaeffer, Festival Planches Contact Deauville © Fatma Alilate

Dernière modification le mardi, 12 novembre 2024