Ouverte aux étudiants de toutes disciplines et de tous niveaux, cette D School ( D pour Design ) se donne pour objectif de former à l’innovation selon la discipline du « design thinking » : les projets sont définis en étroite collaboration avec les industriels et représentent des enjeux réels ; la scénarisation joue un rôle clef dans la création, le développement et la dynamique d’un écosystème. En clair il s’agit bien de transformer les pédagogies des enseignants, avec un positionnement sur les enjeux liés au développement durable.
La première D School voit le jour dans la Silicon Valley en 2004. David Kelley, l’un des cofondateurs d’IDEO, un cabinet de conseil spécialisé dans le design et l’innovation, également professeur de Mechanical Engineering à Stanford, s’appuie sur les procédés du design thinking dans sa société comme dans ses travaux universitaires. Il souhaite enseigner à Stanford ces nouveaux procédés qui consistent à appliquer les méthodes utilisées par le concepteur d’un objet, à la compréhension et la résolution d’un problème quel qu’il soit : l’optimisation d’un produit donné, la façon de mener un projet ou de gérer une affaire, etc. L’innovation de rupture va en effet bien au delà de la conception d’objets technologiques comme une commande de télévision, un instrument chirurgical ou une cabine d’avion ; elle est également appliquée à la résolution de problèmes soumis par des organisations gouvernementales.
Grâce aux moyens financiers du chef d’entreprise mécène allemand Hasso Plattner, il peut créer le Hasso Plattner Institute of Design dont le succès n’a pas cessé de croître. Des Instituts semblables sont créés à Potsdam et Helsinki.
Dans la D.School, « les salles de classe ne ressemblent pas à d’austères alignements de tables et de chaises face à un grand tableau noir, mais plutôt à de grandes salles de jeu, où il règne plutôt l’ambiance d’une garderie ou d’une école maternelle. Des post-it multicolores, des feutres, des ciseaux, de la colle et du papier.... Des espaces qui se veulent en fait « très ludiques, ce qui est censé aider d’une part à générer des idées nouvelles - en se débarrassant d’un mode de pensée purement rationnel, et d’autre part de les laisser grandir, se transformer, et enfin de les partager plus librement. »
Véronique HILLEN, la créatrice du projet français et doyenne de la Paris Est D.School a passé plusieurs mois à Stanford en 2008 et reste en contact avec le réseau international ME310 Design Innovation associant les trois plus grandes D.Schools mondiales (Standford, Helsinki, Posdam).
Directrice académique du département « Génie Industriel » de l’École des Ponts ParisTech, Véronique HILLEN est diplômée de l’ESCP Europe (Paris, Oxford, Berlin) et d’un master de l’Ecole Centrale de Paris.
Experte en innovation et stratégie depuis 15 ans, précurseur en France dans la création de formation en éco-innovation à partir du design thinking, elle a toujours travaillé dans un contexte d’équipes multidisciplinaires à l’international sur des projets à forte composante technologique.
Avec la Paris Est D.School, Véronique HILLEN et son équipe ont l’ambition d’inspirer une nouvelle génération de formations en innovation de rupture par de nouvelles méthodes issues du design thinking comme celles formalisées en 2005 à l’Université de Stanford (USA).
Leur mission est double :
- développer les compétences en innovation de rupture des étudiants de toutes disciplines, de tous horizons et de tous niveaux.
- transformer les pédagogies des enseignants intéressés des établissements partenaires et au-delà (notamment du réseau ParisTech).
« L’innovation de rupture telle que nous l’entendons se base, dit-elle, sur l’interdisciplinarité, de l’ingénierie au design, des sciences humaines au commerce. Par essence, elle propose de rompre avec la tradition d’une démarche de conception linéaire en favorisant l’inspiration, l’idéation et l’implémentation comme fondements du projet. Si la recherche de sens et de valeur pour l’utilisateur prédomine toute exploration, il est tout aussi fondamental de valider la viabilité des propositions, leur faisabilité technique, leur réalisme socio-économique, leur durabilité, leur qualité sociale et environnementale.
Chaque problématique est ainsi abordée dans toute la complexité de son contexte, amenant à identifier de nouveaux angles de perception et d’analyses pour en déduire un ensemble d’hypothèses pertinentes, plus ambitieuses que de simples solutions à des problèmes. Chaque piste fait alors l’objet d’expérimentations et de matérialisations permettant d’en comprendre l’impact et d’en saisir les difficultés de mise en œuvre. »
Les espaces de la Paris Est D.School sont hébergés à l’Ecole des Ponts, dans le tout nouveau bâtiment Coriolis. Avant-gardiste, le bâtiment est le fruit d’un travail d’équipe visant à réconcilier technique et architecture, objectifs énergétiques et bien-être ; il produit 32% d’énergie de plus qu’il n’en consomme.
Ces espaces sont des lieux de convergence, d’échange et d’apprentissage, mais ils sont surtout le premier levier sur lequel les enseignants s’appuient pour créer une rupture d’état d’esprit.
On y trouve des espaces projets dédiés à chaque équipe ; l’atelier , qui n’est jamais à plus de 7 secondes de tout espace projet ; l’espace « Fun » qui permet de créer sans autocensure et sans peur de l’échec ; l’espace « Zen » qui facilite les moments d’auto-réflexion ; la salle de brainstorming qui permet de créer un état d’esprit d’exploration collectif ; la bibliothèque, qui contient la matière à réflexion ; la protothèque, source de matière à réalisations ; l’espace social, théâtre d’échanges, de discussions, de ressentis, de débats ; et enfin la cuisine, lieu de restauration, de rencontres informelles, de convivialité…
Les différentes étapes du cycle de réflexion du design thinker sont ainsi itérées, pour arriver à une solution finale qui se veut optimale : empathie, définition, création, prototypage, test. Ces cours originaux permettent aux étudiants de mener des projets aux applications très pratiques et concrètes, en explorant les différentes étapes de la conception à la réalisation, et de s’intéresser aux besoins et aux problèmes rencontrés par les principaux intéressés. Et cela contraste fortement avec la formation très théorique qu’ils reçoivent au cours de leurs études.
Est ce l’occasion de développer un enseignement transversal, qui rassemblerait davantage nos formations, dont la grande qualité technique est parfois stérilisée par leur trop grand cloisonnement ?
Comment développer cette nécessaire multi-disciplinarité des enseignants ?
Ou s’agit-il d’un simple effet de mode ?
Invitée aux conférences Educ Pros animées par Emmanuel Davidenkoff, Véronique HILLEN a bien voulu accepter la publication sur Educavox de la vidéo de son intervention réalisée par l’An@é.
Claude TRAN
Dernière modification le lundi, 10 novembre 2014