Si en 2020 ce fut le cas quand l’instance suprême de la République confia l’information et la décision sur le traitement de la pandémie à des spécialistes principalement épidémiologistes cooptés dans des comités ad hoc et à une industrie privée concurrentielle, il y eut des précédents que Louis Aragon met en scène dans « Les communistes » pendant la guerre de 1940.
Le roman d’Aragon retrace la période qui fut appelé la débâcle.
Aragon souligne que le pouvoir politique a donné tout pouvoir à un corps institutionnel, dans ce cas l’Etat major des armées où les conflits concurrentiels dépendant de choix industriel privé existent. Le résultat fut des injonctions paradoxales qui provoquent dans les espaces collectifs, tant chez les militaires au contact que chez les populations actives, un état d’urgence qui crée le doute entrainant des comportements de stress d’abord proches de la morbidité puis de la soumission.
Dans ce monde bouleversé, Louis Aragon suggère avec des dialogues entre des représentants de la classe politique qu’il existe un autre intérêt supérieur à la guerre contre les armées allemandes du régime nazi : c’est faire la paix avec le régime du troisième Reich par crainte d’un choix politique des français qui privilégierait une république représentative de la pensée démocratique au détriment d’un Etat qui conforte le choix univoque d’une seule idéologie. L’Histoire donne raison au récit de Louis Aragon.
Cette appréhension subjective de 1940 mêlant mes souvenirs personnels à la lecture de la narration de Louis Aragon et à celle des historiens m’a conduit à interroger la situation que nous vivons depuis début 2020, deux ans pour ceux qui savaient que le virus de la pandémie avait fuité en Chine depuis décembre 2019.
Ces interrogations nous pouvons les poser quand nous avons le temps de la réflexion qui combine recherche et controverse. Cet espace de vie donne accès à la fois à des ressources, à des temps de débat et à des temps d’écriture et d’énonciation.
Cette situation n’est pas offerte à tous les citoyens et pourtant nous préjugeons qu’ils possèdent tous pour analyser et réfléchir leur propre rationalité comme le montraient en son temps les émissions les conteurs d’André Voisin Service de la Recherche dirigé par P. Schaeffer 1964-73.
Au cours des année 2020 2021, nous sommes toutes et tous marqués par le risque d’une épidémie venue de Chine sous doute à cause des fuites d’un laboratoire scientifique, et par « l’Etat d’urgence sanitaire » que décréta le Président de la République décret du 17 octobre suivi de la loi de prorogation du 14 novembre.
Pendant cette période, un flux incessant d’informations brèves et de débats aux explicitations limités par l’horloge rend rarement possible une écoute réellement active.
De « ces confettis numériques » nous pouvons en retenir quelques-uns qui montrent le choix d’une doctrine économique basée sur une utilisation technologique qui a pour conséquence une conception d’une organisation administrative et non une réflexion sur l’humain qui est directement impacté par un virus.
Ces « confettis numériques » conduisent à se poser une série de questions sur les propositions suivantes :
- La solution à toute crise serait – elle la relance économique ?
- Faudrait un plan Marshall pour relancer la construction etc… ?
- Les conséquences des choix industriels sont-ils exposés avec leur différente cause et conséquence ?
- Le choix d’un régime politique basé sur la décision d’un cabinet présidentiel validé par un parti présidentiel réussirait-il mieux en temps de crise qu’un régime qui donne la première place au débat démocratique ?
- Des réformes successives basées sur trois principes « l’hôpital entreprise », « le numérus clausus du recrutement des étudiants en médecine », le choix de la recherche développement au détriment de la recherche fondamentale, ne sont-elles pas sans conséquence pour le traitement de la pandémie ?
- Des injonctions successives et contradictoires sur les modes de traitement de la Pandémie, quelles en sont leur finalité ?
La liste serait longue et est alimentée par des sources multiples et contradictoires.
Il en résulte un doute.
Ce doute personnel résulte de la conjoncture de facteurs psychologiques et sociaux. Le plus souvent, il est créateur d’une angoisse qui peut se manifester par des comportements de crainte, d’égarement décisionnel, de soumission à une autorité.
Pour en faire un doute scientifique, l’accès aux connaissances serait nécessaire.
Peut-il être accessible à l’ensemble des citoyens quand dans l’espace politique pose ces deux arguments ?
« Le mal viendrait des idéologies portées par l’enseignement universitaire basé sur la controverse. »
« Le bien serait-il les classes préparatoires et professionnelles à vocation univoque et basées sur une compétition au « mérite ».
Où est l’humain quant au Ministère des finances, « deux néo banquiers (de la mandature précédente dont l’un devint Président de la République et l’autre Secrétaire général de l’Elysée) laissent libre cours à leur goût pour les Légo industriels. Alors que les cessions stratégiques se multiplient, les deux néo banquiers refusent d’utiliser un dispositif renforcé permettant à l’Etat français de contrôler des investissements étrangers et de donner la priorité aux citoyens et employés sur la gestion financière. » (L’OBS, n°2979). L’un devint Président de la République et l’autre Secrétaire général de l’Elysée. L’expression. Légo prend son sens si on le situe dans les applications des algorithmes utilisés par la technologie numérique disponible.
Ces décisions précédant la crise sanitaire se poursuivront pendant la pandémie. L’urgence sanitaire permet à la décision gouvernementale une reconfiguration du travail.
Ce déplacement d’une question sanitaire en une reconfiguration du travail est la conséquence d’une utilisation administrative de la technologie numérique qui facilite la réorganisation des sociétés financières et industrielles.
Parmi les conséquences de ces légo industriels et financiers que des légo administratifs voir législatifs rendent légitimes, nous retiendrons.
- La fragmentation de la population française en catégories. Une contradiction oppose l’aspect théorique des droits humains et du citoyen à la validité pratique de droits et de devoirs que le gouvernement attribue aux citoyens suivant leurs caractéristiques personnelle, sociale et professionnelle en dehors de tout débat sur leur bien fondé.
- L’individuation des intérêts privés par médias interposés utilisant les ressources informatives du numérique éloigne toute participation à la solidarité et au vivre ensemble.
- La perte du sens de la collectivité et de la valeur travail au profit de la concurrence et du mérite détruit toute existence de la personne dans son environnement : de plus une attribution de survie amène celui dont la qualification a perdu toute valeur à se retirer dans son monde privée ((Olivier Schwartz, 1990).
- L’éducation et le droit à la qualification du travail, base de la démocratie, au profit de l’instruction et de la reconnaissance d’une compétence adaptative à des postes en lieu et place de l’Education.
- La place institutionnelle des acteurs de terrain dans la décision politique pour les domaines économiques, industriels et sociétaux est contestée par les groupes d’influence dits « de savoir supérieur » imposant une organisation hiérarchique (le cœur des anges).
Le débat et la controverse qu’il ne faut pas confondre avec « la pédagogie » même quand elle prend la forme d’une andragogie, manquèrent. Ce vide alimente le doute car la rationalité de chacun ne peut s’exprimer et être prise comme un apport à la réflexion collective.
Ainsi, du doute psychologique, au stress, aux questionnements non débattus, à la soumission, un grand nombre de télé spectateurs passèrent à la sidération lors du discours télévisuelle du Président du 21 juillet 2021.
Quand l’expression « langage de vérité » prononcé par le conférencier exprime une certitude, le caractère univoque d’annonce de mesures coercitives, contraintes morales et physiques, n’admet point de débat.
Quand l’énoncé lie la mort annoncée, si les mesures ne sont pas appliquées, à des souvenirs personnels proches, la pandémie enlevant un des nôtres, ou lointains ravivant le souvenir des disparus sont ravivés, il a une forte portée émotionnelle.
La structure du discours télévisé exacerbe les angoisses créées par les informations contradictoires qui ont circulé sur ce média et d’autres auparavant.
Confronté à la description d’une situation critique et d’une annonce coercitive concernant son corps et sa propre liberté de décider, le spectateur de la surface écranique perd toutes ses fonctions vitales et en particulier celles d’analyse et d’esprit critique. Il subit un choc émotionnel proche de l’effet de sidération dont parlent certains psychiatres.
Cela est une des explications possibles au fait que, amplifiées par les médias, les réactions des citoyens et les manifestations qui suivirent se focalisèrent sur la seule partie de l’allocution qui traitait des mesures coercitives destinées à arrêter la diffusion du virus.
Ce fut le cas du plus grand nombre des citoyens.
Mais combien de citoyens eurent le temps de faire la recherche nécessaire pour consulter l’écrit et le lire attentivement pour qu’ils lui donnent du sens en fonction de leur propre rationalité qui lie expérience et savoir ?
Et quand le citoyen accède à la transcription du discours sur le site www.elysee.fr. Il découvre cet avertissement « seul le prononcé fait foi ».
Cette remarque souligne la différence entre la réception d’un message audiovisuel transmis par un réseau numérique et la transcription écrite de l’énoncé d’une intervention. Elle laisse entendre que le protagoniste souhaite conserver toutes les caractéristiques de la diffusion télé visuelle et ses effets.
La prédominance du visuel et du sonore, un rythme d’écoute imposé, les parasites visuels et sonores tels que les gestes et les intonations de l’intervenant, font partie des effets émotionnels recherchés : l’expression « seul le prononcé fait foi » met en garde contre toute lecture du texte extrait de son contexte gestuel et environnemental tel que la solennité des signes de la République.
Sans un accès au texte écrit, le spectateur reste sur son impression. La conséquence est comme nous l’avons dit précédemment : le spectateur sous l’effet de la sidération créée par les informations traumatisantes ne peut plus prêter attention à d’autres informations : la charge mentale de la sidération que créent le visuel, le son et les paroles élime toute perception d’autres informations présentes dans le message.
Le retour au texte, temps de lecture et d’analyse, permet d’en saisir la globalité et de le mettre en débat des réactions d’analyste politique comme par exemple celle de Alain Gérard Slama, journaliste historien et essayiste, actuellement membre du Conseil économique social et environnemental : « Le gouvernement avance pas à pas, subit les évolutions de la crise et va à chaque fois un peu plus loin dans les mesures autoritaires et liberticides, finissant par se dédire de ses anciennes promesses.»
Ayant mis à distance les effets du spectacle télévisuel, la lecture apaisée du texte permet de saisir que l’objet de cette allocution n’est pas simplement l’annonce des contraintes décidées pour lutter contre la propagation d’un virus, mais principalement l’exposé des trois convictions de son auteur qui guideront un programme de gouvernement.
La première conviction est « de redevenir une grande nation de recherche, d’innovation, d’agriculture et d’industrie »:
L’expression « ma première conviction » donne la valeur d’une certitude personnelle à la parole présidentielle que confirme la formule « j’ai lancé le mois dernier un plan d’investissement de 7 milliards d’euros en matière de santé : des usines, de la recherche, chez nous en France ».
Des interrogations se posent :
Quel accès le citoyen a-t-il à la connaissance de ces décisions portant sur un plan d’investissement concernant par exemple « l’écologie de production » ?
Que recouvre cette formulation ?
Un exemple nous en est proposé « l’usine géante de batteries pour véhicules électriques ». Comment est-il possible de s’informer de son mode de financement et des conditions de son implantation ?
Quelle place occupent alors les différentes instances constitutionnelles de la République dans la prise de décision ?
De quelle indépendance s’agit-il quand cette finalité lie la France à l’Europe et se centre sur la future Présidence Française de l’Union Européenne ?
Quel débat est proposé au peuple français sur cette ambition ?
La préoccupation de l’Humain se trouve-t-elle définie uniquement par des plans d’investissement et une production industrielle ?
Quelle place occupent les hommes et les femmes dans ce modèle économique ?
La seconde conviction exposée dans ce discours répond à cette dernière question en définissant un modèle social : « Ce modèle social repose sur un fondement : le travail ».
Une compréhension de la notion de travail est ici nécessaire. Elle s’accompagne de la notion de mérite et elle a pour objectif « l’emploi » qui correspond à une insertion dans la production donc à un contrat entre un entrepreneur et un employé.
Cette approche du travail qui fut souvent confortée par des analystes en sciences politiques et en sociologie du travail n’exclut-elle pas de la richesse nationale tout autre conception du travail ?
Quelle place occupe dans cette conviction la Commission Stiglitz-Sen-Fitoussi, souhaitée par le Président Sarkozy, qui souligne l’importance de prendre en compte le travail qui ne répond pas à un emploi rémunéré et contractuel ?
Ne faut-il pas, suite à ces travaux, questionner la place du salariat lié à un contrat qui libère peu de temps et qui répond à l’expression « travailler plus » ?
Quelle place occupent les activités humaines hors du schéma commercial, productif et financier ?
Pourtant, celles-ci sont centrales pour la cohésion sociale et la poursuite de l’existence de l’humanité. Tout au long de la vie, ces activités accompagnent les femmes et les hommes de leur naissance à leur mort, le langage quotidien leur attribue la qualité d’un « travail ».
L’auteur de ce discours associe les termes « travail » et « mérite ».
Dans son sens général, le mérite se définit comme droit d’obtenir un avantage par sa conduite mais aussi comme exposition à subir un inconvénient.
Se pose alors la question de savoir à qui appartient le pouvoir de distinguer dans la société ceux qui sont « méritants » et ceux qui ne le sont pas.
Rien n’indique quel processus permet d’élire un individu comme méritant et quelles qualités définissent le décideur qui attribue le mérite.
Cette référence au mérite finit par fragmenter le monde du travail en deux parties opposées : « méritants » / anonymes, décideurs/récipiendaires.
Le mérite se décrète-t-il ?
Est-il un accord décisionnel concernant l’ensemble d’une population ?
Correspond- t- Il à un choix personnel quand la volonté d’acquérir ce droit est un avantage qui distingue le récipiendaire de ses pairs et qui le détourne d’autres investissements qui peuvent servir l’ensemble de la collectivité ?
Des systèmes politiques ont imposé au travail des normes qui définissaient le mérite, ils furent mis en cause par les historiens comme rapprochant le travail de son sens latin, tripalium.
Dans les propos du Président, le travail est le fondement du modèle social français et ce modèle social aurait protégé « nos entreprises, nos emplois, notre culture, de nombreux secteurs exposés, le pouvoir d’achat ».
Qu’en est-il de la protection de la personne humaine ?
Ne dépend-elle que d’un secteur économique ?
C’est peut-être là qu’il faut voir une différence avec d’autres modèles sociaux et sans doute le plus grand écart entre « le modèle social français » élaboré par le Comité national de la Résistance, par le Ministre Ambroise Croizat et Pierre Laroque, premier directeur général de la Sécurité sociale. Ce « modèle social français » donnait la priorité aux hommes et aux femmes. Des travaux vinrent au cours des années qui suivirent compléter l’œuvre entreprise. Cependant, ce « modèle social français » du CNR fut attaqué par les idéologies représentées par le capitalisme et le néocapitalisme.
Cette référence n’est pas nostalgique, elle est simplement la prise de conscience qu’il ne suffit pas de nommer mais qu’il faut aussi savoir débattre avant d’affirmer ses propres convictions.
La troisième conviction définit les priorités de ce modèle social : « La Nation doit répondre à ceux qui ont été le plus touchés par la crise ».
Si la décision appartient à la Nation, qu’en est-il de la République ?
Le Président de la République élu dans un cadre législatif et constitutionnel s’efface–t-il devant un groupe humain caractérisé par son unité et une langue commune ou par une communauté politique qui représente une autorité souveraine sur un territoire déterminé ?
L’histoire ne nous a-t-elle pas appris que la République définie par sa constitution et par son organisation législative approuvée par les citoyens garantit que l’Etat ne laisse pas sa place à une communauté au nom de la Nation ?
Maître du jeu demeure le Président de la République souhaite poursuivre et renforcer ses décisions pour les publics qui ont le plus souffert : « notre jeunesse, nos ainés et les concitoyens en situation de handicap. »
Le projet proposé pour la jeunesse « qui a tant sacrifié » présente plusieurs domaines.
Les investissements pour la petite enfance et l’éducation ne sont pas précisés, de quel ordre sont-ils ?
Le lecteur en saisit les différents aspects en se référant au Ministère de l’Education Nationale. Aucune référence pour conduire l’action éducative n’est faite aux acteurs de terrain qui surent trouver les voies d’une continuité éducative en temps de crise et à leurs propositions.
« Pour nos jeunes adultes, étudiants comme nos jeunes actifs, ou nos jeunes qui sont peu formés, nous avons créé une plateforme « un jeune, une solution ».
On peut noter la forme possessive « nos jeunes » qui ne participe pas à la reconnaissance de leur personnalité et de leur indépendance comme adulte et électeur.
Une plateforme est-elle une aide ? De nombreuses études ont montré l’échec de ces plateformes et les inégalités qu’elles créent ; la psychosociologie insiste sur l’importance des liens sociaux présentiels pendant cette période de la vie comme le soulignent de nombreux enseignants au cours de la crise sanitaire.
Une « formation » est proposée avec comme objectif de trouver un emploi ou de signer un contrat d’apprentissage. Plutôt que de « formation », n’est-il pas question ici d’adaptation à un emploi réglementé par un contrat avec un employeur ?
Deux remarques parmi d’autres s’imposent.
Cette formation, adaptation à un poste de travail, n’est en rien une préparation à la formation tout au long de sa vie qui demande une éducation comprenant un large spectre de disciplines académiques.
Elle nécessiterait sous sa forme contractuelle une importante formation juridique au droit du travail qui devrait précéder toute insertion dans un emploi quel qu’il soit.
Le présent de ce jeune se trouve limité à un seul domaine celui de l’emploi et de son contrat, alors que les aspirations peuvent être multiples à cet âge.
N’est-ce pas le pari de toute éducation de laisser du temps au jeune adulte pour déterminer son orientation et pour connaître les capacités qui lui sont propres ?
Ce pari est toujours gagnant car il permet d’enrichir la société de créations inattendues.
« Le Revenu d’engagement » annoncé par le Président de la République pourrait être une opportunité pour réaliser ce pari si la logique de devoirs et de droits était clairement définie et s’accompagnait d’une confiance en une jeunesse majeure et électrice.
L’ensemble de ces convictions donne lieu à des réformes qui « ne seront pas davantage financées en laissant filer la dette ». Pour cela un nouveau pacte est « de travailler davantage, d’investir ».
Cette proposition part de deux présupposés.
Le premier est une injonction : « Le citoyen doit travailler davantage ».
Cette injonction n’est-elle pas un jugement qui laisse entendre que le citoyen ne travaille pas assez ?
Ne limite-t-elle pas le travail à la production reconnue par la définition du Produit Intérieur Brut traité précédemment ?
La solution est l’investissement qui consisterait à améliorer la croissance.
Qu’est-ce que la croissance ? Est- ce un indicateur qui lie la commercialisation et la production industrielle comme le laisse supposer l’expression « une écologie de production » ?
Pour aller dans le sens des réformes qui « ne seront pas davantage financées en laissant filer la dette » s’ajoute à « travailler plus » la seule solution qui est « de continuer à bousculer le système et les positions établies, les rentes, les statuts ».
Ces propositions donnent un exemple factuel, la réforme de l’ENA, et elles abordent aussi le thème des retraites : ces orientations précédaient déjà la pandémie.
Elles nous rappellent les ruptures de confiance entre la République et les citoyens provoquées en particulier par la proposition de « travailler plus longtemps et partir à la retraite plus tard ».
L’abstention aux votes en est bien un signe majeur.
L’évocation de « Bousculer le système » a aussi un but « le contrôle de notre destin comme Nation ».
Cela signifie que la République Française avec sa Constitution n’est plus le garant du destin de ses citoyens et qu’il est nécessaire de le confier à une communauté, la Nation.
Un exemple nous est proposé celui de la communauté internationale qui n’est pas élue démocratiquement et qui décide « d’une imposition mondiale des multi nationales à 15% minimum, mettant fin aux évasions fiscales et aux paradis fiscaux ».
Dans un processus démocratique, cette information nécessiterait que le texte réponde au minimum aux questions suivantes pour éviter l’effet d’annonce.
Quels éléments composent ce texte pour que nous puissions juger des règlements juridiques qui président à cette décision ?
Quels renseignements avons-nous sur la composition de cette communauté ?
En fonction de l’inquiétude que crée le manque de réponses aux interrogations d’un lecteur, la répétition du terme « Nation » dans le discours d’un Président de la République nécessiterait une étude sémiologique et morphologique de ce texte avec d’autres discours politiques qui font appel à la « Nation ».
Un temps de lecture, de confrontation à d’autres documents, d’écriture permet ce temps réflexif.
L’annonce présidentielle du 31 août 2021 de « Faire de la lecture une grande cause nationale » devrait ouvrir à toutes les générations l’accès aux connaissances qui permettent de formuler des réponses aux questions posées et de saisir les débats qu’elles suscitent. Mais le vocable « Lecture » a un champs sémantique large aussi doit-on s’interroger sur le contenu qui lui est attribué dans cette intervention et sur la relation entre la pratique de la société de l’information à caractère univoque et les réactions psychologiques, sociales et politiques qu’elles suscitent.
Alain Jeannel
Cette conférence est la synthèse d’une série d’articles publiés sur le site EDUCAVOX
https://www.educavox.fr/accueil/debats/la-fabrique-du-doute
https://www.educavox.fr/accueil/debats/face-au-doute-interroge-sans-relache
Dernière modification le vendredi, 21 janvier 2022