Je devrais presque parler à l’imparfait car cette impression diminue déjà, mais il reste encore une curiosité qui provoque des discussions intéressantes durant lesquelles j’aime bien disséquer l’acronyme MOOC (Massive Open Online Course) dans sa version française CLOM (Cours en Ligne Ouvert et Massif) qui remet les choses dans le bon ordre.
Cours, le sujet est riche, mais ce n’est pas celui de ce billet.
en Ligne, c’est une caractéristique forte qui conduit à scénariser et produire des ressources et des interactions dans un cadre numérique.
Ouvert, dans le monde de l’informatique, cela signifie plus que « accessible à tous ». À la gratuité s’ajoutent deux notions : l’interopérabilité (il n’est pas nécessaire d’avoir recours à un logiciel spécifique) et la libre circulation (les documents sont diffusables sans restriction majeure).
Massif, c’est ça qui fait causer car c’est devenu possible.
Le « Cloud Computing » rend possible les services à très grande échelle. Ce n’est pas un hasard si open edx est conçu au départ pour être utilisé sur Amazon Web Service (l’un des premiers fournisseurs de Cloud). La puissance de calcul utilisable, répartie sur plusieurs serveurs, évolue en fonction de la nécessité et le client ne sait même pas combien de serveurs sont utilisés pour lui (par contre, il en connait le prix). Du coup, tout devient possible, et alors que je pensais travailler pour 359 étudiants, j’en ai peut-être 100 000.
C’est ce qui a surpris Sebastian Thrun, professeur à Stanford en 2011. Pour élargir l’audience de son cours, il le met en ligne et pense toucher 10 à 20 000 étudiants : il en débarque plus de150 000 ! Et cela change tout ! D’abord, il faut accepter l’idée de ne pas avoir prise sur « ses » étudiants : ils sont trop nombreux. Pas de tutorat, pas de correction (traditionnelle) de devoirs.
L’enseignant est dépassé par le nombre, ce qui n’est pas grave, car il s’aperçoit que « ses étudiants » n’ont pas besoin de lui au quotidien. Comme le dit Daphne Koller (co-fondatrice de Coursera) dans sa conférence TED, avec une telle quantité de participants, une question (même posée d’un lieu où il est 3 h du matin) reçoit une réponse en 20 minutes.
C’est donc une vraie révolution. Mais sommes-nous condamnés désormais à ne viser que des audiences géantes ? Le nombre d’inscrits devient-il le principal critère de réussite ?
Il n’est pas étonnant que le Massif devienne un objectif. Mais avant de se lancer dans un MOOC, il peut y avoir des étapes intermédiaires : mettre en place un cours en ligne, dans un premier temps dans un cadre en partie présentiel, ce qui permet d’observer les réactions, puis faire évoluer le dispositif, choisir de le rendre accessible à tous, et enfin, si utile ou nécessaire, l’installer sur une plateforme capable d’assurer une montée en charge quasi illimitée.
Aujourd’hui, cette démarche présente une faiblesse. Les plateformes pédagogiques traditionnelles sont beaucoup plus riches, plus souples, que les plateformes pour les MOOC, mais elles coincent lorsque le trafic augmente. Si je vise, à court ou moyen terme, l’installation sur une plateforme à très large audience, il faut que j’en accepte par avance les contraintes et que je renonce aux fonctionnalités, nombreuses, qui en sont absentes.
Les choses évoluent cependant dans le bon sens : d’un côté les plateformes type open edx gagnent en fonctionnalités ; de l’autre, Moodle, Claroline, Sakai et sans doute d’autres LMS (Learning Management System) tentent d’évoluer avec des technologies orientées « grand nombre ».
Et donc bientôt, nous pourrons remettre les questions dans le bon ordre : quels objectifs, quels contenus, quels scénarios, quelles interactions, quelles évaluations… Ce n’est qu’ensuite que se posera la question : pour quel nombre ?
Cet article est tiré d’un billet paru sur onef.fr/blog
Dernière modification le jeudi, 04 septembre 2014