Toutes les réformes entreprises pendant dix ans, du primaire à l ’université, ont porté en elles cette marque de fabrique, celle de la dénaturation de notre école et de ses valeurs : retrait massif des moyens, semaine de quatre jours et nouveaux programmes à l’école, mise en place du droit d’accueil, suppression des Rased, coupe sombre des budgets de l’école complémentaire, réforme du lycée professionnel, suppression des IUFM et mise en place de la loi L.R.U…
Pourtant après plus d’un siècle de construction, de croissance et de massification, notre système scolaire était loin d’être parfait et méritait certainement plus qu’une politique sectaire visant à rationaliser la dépense publique sans tenir compte des dommages collatéraux.
Est-ce un hasard si durant la même période les résultats de nos élèves, évalués lors des grandes enquêtes nationales et internationales, ont sérieusement fléchi ou que les inégalités scolaires ont sérieusement augmenté ?
Est-ce un hasard si la France se classe aujourd’hui 27éme sur 34 des pays de l’OCDE du point de vue de l’équité scolaire et que les écarts entre les résultats scolaires selon les lieux de scolarisation sont considérables ?
Est-ce une fatalité que 12% des jeunes âgés de 18 à 24 ans ont quitté en 2011 le système scolaire sans diplôme ou uniquement avec le diplôme national du brevet ?
Personne ne peut se satisfaire de la montée des inégalités scolaires, de la stagnation des taux de réussite aux diplômes et surtout de l’éviction, chaque année, de milliers de jeunes sans diplômes et sans qualification. (Plus de 120 000 par an !).
Ces « exclus de l’intérieur » peuvent légitimement se sentir léser.
Le signal d’alarme est aujourd’hui tiré dans une école qui reproduit et accentue les inégalités creusant encore davantage le fossé entre ceux qui ont le capital financier, culturel, éducatif et les autres.
Ainsi la perspective offerte à tous d’accéder à l’Ecole, d’y réussir pour obtenir une position sociale « avancée » mène encore bien souvent à l’exclusion, encore plus traumatisante puisque apparemment ces élèves ont eu leur chance.
Organisé sur un mode ancien, le système scolaire se dédouane ainsi à bon compte de sa responsabilité sur celle – incompétence, manque de travail…-des élèves en échec scolaire. Cela a été d’ailleurs le discours de Nicolas Sarkozy et de la droite : assimiler la responsabilité des élèves à la culpabilité de leur échec !
La démocratisation pleine et entière du système éducatif reste plus que jamais d’actualité dans un contexte politique plus favorable avec le retour de la Gauche aux responsabilités.
Force est de constater aujourd’hui que l’Ecole Républicaine est en danger soumise à une société elle-même en crise, ballotée par les nombreuses « réformes » entreprises depuis 2002 et les conséquences des coupes budgétaires qui ont affaibli l’institution scolaire.
Le diagnostic une fois posé réclame non pas une nouvelle réforme, un nouveau plan, des revendications qui ne s’attacheraient qu’aux moyens mais avant toute chose de réfléchir à la nouvelle voie que nous devons tracer : celle de la refondation, même si le mot fait débats.
La priorité accordée à la jeunesse et à l’éducation par François Hollande dans la campagne va trouver pour la durée du quinquennat sa traduction politique avec l’objectif de refonder l’école.
La refondation de l’école est avant tout un acte politique majeur visant à rompre avec dix ans de politique de désinvestissement. La dette éducative laissée par la droite évoquée Vincent Peillon, Ministre de l’éducation Nationale, sera évidemment longue à solder alors que de nombreux chantiers doivent s’ouvrir notamment par la priorité à donner à notre école primaire.
La loi en débat s’inscrit dans un projet global visant à la fois à un investissement massif absolument nécessaire, la création de 60000 postes et le recrutement de 150000 personnels sur cinq ans, après la purge 2002-2012 et une refondation structurelle du système éducatif en donnant aujourd’hui la priorité à l’école primaire avant de conforter le collège puis le lycée.
C’est dire si cette loi qui entame le renouveau de l’école s’inscrit dans la durée et devra pendant au moins cinq ans produire ses effets et être durablement poursuivie.
Ses objectifs et moyens clairement identifiés doivent demain améliorer les résultats de notre système éducatif et plus particulièrement la situation individuelle des élèves : maitrise par tous du socle commun, réduction par deux de la proportion des élèves qui sortent du système scolaire sans qualification, réaffirmation des objectifs liés à l’obtention du bac (80%d’une classe d’âge) et d’un diplôme du supérieur (50% d’une classe d’âge)..
Ce sera à l’aune de ces résultats que sera jugé d’ici cinq ans le bilan de l’action éducative du gouvernement et non sur le nombre de postes ouverts aux concours.
Au-delà des nombreuses mesures contenues dans la loi (celle liée à l’école numérique est à souligner) et de toutes celles qui entrent dans le cadre plus réglementaire, la réforme des rythme éducatifs par exemple, les débats qui commenceront demain seront l’occasion de souligner l’ambition du pays pour toute l’école et tous les élèves.
Cette ambition s’incarne avant tout dans une double refondation autour du retour de la pédagogie et de la formation des enseignants sacrifiée hier pour des raisons économiques et dogmatiques mais aussi une refondation axée sur la réussite éducative de nos enfants au-delà de la seule réussite scolaire.
Cinq enjeux vitaux sont donc devant nous pour demain incarner la refondation attendue par les enseignants et les parents.
Celui de la démocratisation de l’école à travers la lutte contre les inégalités à l’école, les inégalités socio- économiques, les inégalités territoriales.
Celui de la réussite scolaire et éducative à travers l’amélioration substantielle des résultats pour réduire la fracture scolaire, celle des « exclus de l’intérieur », des décrocheurs, et au bout du bout des laissés pour compte.
Celui de la réforme structurelle des niveaux d’enseignement, du collège au lycée que la droite a fragilisé sous couvert de le « réformer ».
Celui de la formation des enseignants, enjeu éminemment politique par la création en cours des ESPE pour donner une formation professionnelle et universitaire aux personnels éducatifs.
Celui du coût global de l’éducation, du local au national, en répondant à la question du financement partagé des politiques éducatives alors que l’application de la réforme des rythmes éducatifs offre l’occasion d’un formidable débat dans le pays.
Dernière modification le jeudi, 02 octobre 2014