Animé par Vincent LIQUETE, Professeur des universités en sciences de l'information et la communication à l'Université de Bordeaux, cette table ronde a réuni, Dominique QUERE, Chargé de mission « Poitiers, capitale de l’Education et de la Formation » et relations internationales. Il a en charge à l’IH2EF du développement autour de la formation des cadres administratifs au niveau national et international, Sarah CLARENS, Directrice Territoriale Adjointe Canopé, enseignant, formatrice conseillère pédagogique, puis Inspectrice. - Elle a fait le choix de rejoindre le réseau Canopé en tant qu’opérateur de la formation des enseignants et ses évolutions-, Anne LEHMANS, Professeure des universités - INSPÉ de l'académie de Bordeaux Institut national supérieur du professorat et de l’éducation (INSPE), chargée de mission numérique à l’ESPE de l’académie de Bordeaux.

Vincent LIQUETE 

En préambule, je commencerai par un propos de Robert McNamara, homme d’affaire devenu secrétaire d’Etat américain à la défense, datant de 1968 : « l'enseignement qui est normalement l'un des plus gros employeurs de chaque pays et l'une des seules industries qui n'ait pas subi de révolution technologique ».  Un peu plus de 50 ans de ça il y avait une sorte de périmètre spécifique du monde éducatif. 50 ans après les choses ont bien changé : l’école est un domaine de changement social, politique et économique.

Juste aussi en préambule, politiques publiques, réformes, certification... On peut dire clairement que la formation et notamment la formation des enseignants est devenue un véritable territoire dans lesquelles les GAFA, les industries culturelles, les Start-up, ont investi en visant sur l’avenir, sur des modèles économiques rentables, au sens d’efficacité mais aussi de rentabilité économique.

Autour de cette question on essaiera de répondre aux problématiques des possibilités et des opportunités pour la formation professionnelles associées à l’arrivée de ces technologies, notamment en formation initiale et continue, et de voir les enjeux et les perspectives se dégageant au regard des expériences des intervenants.

Vincent LIQUETE : La première question est celle du sens 

Qu’est ce qui a fondamentalement changé au regard de vos expériences en termes de relation pédagogique dans le cadre de la formation des enseignants ? Quelles en sont les incidences clés ?

Dominique QUERE 

L’IH2EF (ex ESEN, Ecole Supérieure de l’Education Nationale) est l’Institut des Hautes Etudes de l'Education et de la Formation. Il a pour vocation de former les cadres de différents ministères, défense nationale, ministère de l'Intérieur, enseignement scolaire et enseignement supérieur, pour la formation initiale et continue. Concrètement on parle des chefs d'établissement donc les principaux, les proviseurs, n parle des inspecteurs (primaire et secondaire), de cadres administratifs. On accueille entre 15et 20000 stagiaires tous les ans.

Pour cette première question, l’effet de la covid, cela a été dit fréquemment, a conduit au recours à des plateformes d'apprentissage à distance. Elles ont dû marcher à plein régime parce qu'il y avait une nécessité de formation de nos cadres, d'accompagnement des différentes transformations du système éducatif qu'il fallait aborder de façon professionnelle.

A ce titre là on a entamé un grand chantier sur l'hybridation. Quand on parle de chantier d'hybridation, il s’agit à la fois d’une professionnalisation de nos ingénieurs de formation pour développer des parcours de formation qui soient autre chose que la simple juxtaposition de petites capsules. Il s'agissait de les agencer les unes avec les autres et de créer des systèmes d'évaluation des systèmes.

On a lancé ce chantier de l'hybridation de nos formations qui tienne compte de l'engagement de nos cadres.

C'est un public particulier : nos cadres n'ont pas le temps par essence de se former ils sont pris par un quotidien extrêmement exigeant en établissement ou en circonscription : bien souvent ce sont des toutes petites capsules de temps qu'ils réussissent à dégager. En prenant appui sur ces éléments là on s'est engagé pour pouvoir produire des parcours à distance qui fonctionnent de cette façon. Et, au-delà du numérique, on a commencé à faire un changement dans notre ingénierie de formation de façon globale.

C'était aussi travailler sur ce qui n'est pas numérique, c'est-à-dire la partie présentielle. Ainsi, Aujourd'hui faire venir des intervenants de grande qualité dans un lieu donné, ce n’est pas suffisant :  nos cadres viennent de partout et les faire se déplacer pour simplement écouter des orateurs, si brillants soit-il, aujourd'hui, ça n'a plus de sens. On réussit à le faire de façon quasiment plus confortable depuis chez soi ou à travers une vision assez qualitative.

En revanche ce qui ne peut pas être remplacé c'est tout ce qui s'appuie sur les autres compétences, de ce qui va relever des échanges, des interactions entre les personnes. Les cadres qui viennent se former à l'Institut doivent ressortir non seulement avec des compétences professionnelles et des acquis liés à des connaissances : on souhaite leur faire vivre des temps d'engagement au contact des autres. On parlait de réalité virtuelle ; on reparlera de ces questions d'engagement dans la formation.

On travaille sur l'ontologie des espaces, sur la façon dont on peut accompagner les dynamiques de groupe.

Vincent LIQUETE : J'aime bien rappeler que rarement dans une temporalité aussi courte on a vu une structure être appelée, à travers et le changement du monde social mais aussi des injonctions ministérielles, à une telle transformation en un minimum de temps.

A l'échelle des ateliers Canopé qu'est-ce qui a fondamentalement changé dans la relation à la formation des enseignants ?

Sarah CLARENS

Je crois qu’il y a en fait deux niveaux du réseau Canopé. C'est un réseau national, et en même temps il y a une déclinaison locale au sein des ateliers Canopé. Les ateliers Canopé travaillent autour de la formation des enseignants, en lien direct avec l'institution, c'est-à-dire avec l'école académique de la formation continue, son directeur les DASEN et les chargés de mission.

En même temps le réseau Canopé produit des capsules, suivant différentes plateformes, qui vont permettre une autoformation, c'est-à-dire quelque chose qui ne va pas rentrer dans un parcours de formation fléché par l'institution. On navigue entre deux et on est une sorte de pierre angulaire. Je crois que l’on a intérêt dans notre positionnement à servir la formation institutionnelle et aussi à servir des enseignants qui ont envie de passer par une autoformation.

Pour moi ce qui a changé, c'est la mise à disposition de capsules. En fait, quel temps un enseignant peut-il accorder à la formation après une journée de 6h de classe quand on est dans le 1er degré, ou même si elle est moindre dans le second degré avec une densité, une tension à faire la classe, à être face à élève ?

L'autoformation, les microcapsules, le micro Learning... que l'on met à leur disposition leur permet de tisser leur propre parcours de formation, ce que la covid a mis en exergue. Mais il y avait déjà eu des plateformes d'autoformation. Il y a une flexibilité spatiale, une flexibilité temporelle, une flexibilité des besoins. Est-ce qu'on choisit du micro Learning ? Est-ce qu'on choisit du macro Learning ? Est-ce qu'on va suivre un MOOC certifiant ou est-ce qu'on va juste aller voir un sketchnote animé ?

Un collègue a travaillé à l'ingénierie de la rédaction d'une microcapsule d'une minute et demi pour définir quelque chose de très complexe. Je pense que c'est ce qui ce qui va être novateur ; on commence à avoir des enseignants qui vont aller chercher eux-mêmes de quoi se former. Les questions qui se posent ce sont les écueils par rapport à ça.

Le dernier rapport du Sénat pose un chiffre qui est assez alertant : 54000 organismes de formation en ligne ont vu le jour. Comment un enseignant fait-il pour se diriger pour choisir la bonne formation, celle qui répond à ses besoins, mais aussi qui répond à l'institution, à une politique et à une éthique.

Le réseau Canopé reste un partenaire de l'éducation nationale en ce sens-là, on peut être l'un de ces accompagnements de l'autoformation.

Cette autoformation-là n'est pas prise en compte par l'institution et c'est là aussi que l’on est sur un devenir.

Comment on va pouvoir rendre compte de cette autoformation, ce temps qui est consacré mais qui n'est pas compté, inhérent à un développement professionnel ? Comment l'institution va-t-elle le prendre en compte ? Comment le métier d'enseignant va aussi évoluer : est-ce qu'on peut rester un enseignant 42 ans ? Peut-être est-ce qu’on ne doit pas seulement se lancer dans une formation institutionnelle qui répond à des injonctions, à des besoins qui sont quantifiés ? Est-ce qu’on n’a pas nos propres besoins et notre propre développement personnel professionnel et comment on va associer let reconnaître les deux ?

On a des plans de formation institutionnels auquel réseau Canopé participe et on a aussi des enseignants qui vont se diriger vers une autoformation qui devient un habitus un développement professionnel, passer de la formation continue à la formation tout au long de la vie. Je terminerai sur ce qui est novateur : on pourrait penser que le distantiel va mettre de la distance entre les gens, mais on voit qu'il commence à avoir 8 % des enseignants qui appartiennent à une communauté, un réseau social professionnel sur lequel ils vont interagir. Cela aussi on l’accompagne, on valorise et on développe l'esprit critique des enseignants sur la source de ces plateformes et de ces communautés apprenantes.

Dominique QUERE 

Merci Sarah. Est-ce que je peux me permettre une petite incise. On peut proposer des microcapsules de de formation sur des temps très courts mais ce n'est pas non plus ce qui va se substituer à tout type de formation. Le changement, c’est peut-être des modalités de plus en plus complexifiées.

Anne LEHMANS :

Je voudrais peut-être avoir un point de vue un peu plus sociologique.

Nous sommes chargés à l’INSPE de la formation initiale des enseignants, un tout petit peu de la formation continue. Vous avez bien montré tous les deux à quel point tout avait changé avec la formation à distance. L'épisode covid a profondément changé les choses. On reviendra peut-être tout à l'heure sur la question des espace-temps des apprentissages.

Pour nous à l’INSPE, profondément, parce que très concrètement, on a maintenant des enseignants et des étudiants qui se satisfont tout à fait de la formation à distance et notamment des classes en zoom. Non seulement ils s'en satisfont, mais ceux qui alors qu’il y a quelques années étaient extrêmement critiques sur la formation à distance et considéraient que c'était une hérésie pédagogique aujourd'hui ne réclame plus que ça. Avec les étudiants c'est la même chose.

Quand cela permet à des gens qui sont très loin d’accéder à de la formation, alors que sans cela c'est impossible, tant mieux. La formation en distance a vraiment changé beaucoup de choses et je pense que l’on n’a pas encore tout à fait traité ce que ça impliquait du point de vue pédagogique, du point de vue de la relation au temps.

On disait qu’il faut peut-être penser vraiment à une diversification des propositions de temporalité des apprentissages, mais on en est encore loin : on est encore dans des structures de maquettes extrêmement formelles, extrêmement figées et c'est difficile d'y revenir.

Je voulais quand même revenir sur la question sociologique, celle que souligne François Dubet qui nous dit qu’aujourd’hui le gros problème qui se pose aux étudiants qui arrivent dans les métiers de l'enseignement est celui de l'autorité de l'école.

C'est vraiment une des premières questions, notamment des stagiaires : comment je fais pour assoir mon autorité ?  Le numérique a ajouté la difficulté de la complexité : en fait il amène les familles, il amène le monde extérieur dans l'école, et qu'est-ce qu'on fait avec l'autorité de l'enseignant, mais aussi avec la possibilité pour les élèves d'aller chercher de l'information. Je ne dis pas du savoir mais de l'information, ailleurs, pour éventuellement construire des connaissances. Cela complique beaucoup les choses.

L'accompagnement des étudiants qui se lancent dans ces métiers doit les sensibiliser à cette complexité, sans construire trop de stress, mais en soulignant qu'il y a non seulement des dimensions didactiques - parce que jusqu'ici on est quand même très concentré sur la didactique dans la formation des enseignants - mais aussi des dimensions non seulement pédagogiques mais aussi éthiques, politiques, économiques, sociales, psychologiques, etc.. Cela apporte des nouvelles couches d'exigence dans la formation : je dirais que ce qui a changé c'est la complexité, le fait qu'il faut rassurer, le fait aussi que les enseignants ne peuvent pas rentrer dans ce métier sans s'interroger sur les pratiques, sur les représentations, sur les imaginaires de leurs élèves qu'ils ont parfois tendance, surtout quand ils entrent dans le métier à mettre à distance.

Les événements très dramatiques qui focalisent toute l'attention de l'éducation nationale sur le harcèlement et le numérique montrent à quel point on a du mal à traiter ces problématiques de façon réfléchie et trouver des problèmes qui ne disparaissent pas avec l’évènement et qui vont s’entasser, de la sidération à la mise à distance sur la relation d'adolescents au numérique et à des dispositifs d'information de communication. Il faut commencer à sensibiliser les étudiants dès le début.

Vincent LIQUETE Je vous avais suggéré quelques questions et puis, en vous écoutant, je vais en rajouter une tout simplement.

C’est la question du continuum, continuum professionnel des logiques des institutions, de la connaissance réciproque et de l’articulation des curseurs des formations présentées.

Chacun a ses logiques extrêmement pensées, réfléchies, très élaborées, mais comment assurer un continuum de formation. Je ne suis pas persuadé, quand je prends ma casquette de d'acteurs de l'INSPE, qu'on ait les bons niveaux d'information sur les ateliers. Je ne suis pas persuadé qu'en tant que cadre, quand on est en responsabilité, on sache exactement où est le curseur à l'institut. Et, de la même manière, je ne suis pas sûr que vous ne construisiez pas aussi une partie de vos accompagnements formatifs sur des images ou des dominantes qui sont peut-être très éloignées de ce qu'on fait véritablement en formation initiale. Comment articulez-vous ceci à l'échelle de vos institutions respectives en 2023 ?

Dominique QUERE 

La question est vaste et appelle plusieurs degrés. Celle de l'articulation logique sur le continuum enseignant-formateur cadre d'un côté, et celle sur finalement la façon dont on va construire une ingénierie de formation pour les acteurs de l'éducation de l’autre.

Le continuum professionnel c'est un défi parce que l’on a des acteurs qui sont assez différents et qui poursuivent chacun les logiques dédiées propres à leur public. Mais les initiatives permettent de croiser l'expertise, croiser les compétences. A Poitiers se trouve le siège de Canopé, celui le siège du CNED qui s'occupe des élèves à distance, celui de l’IH2EF, de l’école académique de la formation continue. Les personnes qui travaillent sur ces questions d'hybridation croisent leurs connaissances, leurs compétences, leur process d’ingénierie. Ce sont les mêmes problématiques liées à la formation. On espère trouver une harmonisation, un continuum sur ces aspects de l’ingénierie :  par exemple on s’est inspiré du guide du micro-Learning de Canopé.

Sarah CLARENS

Côté Canopé réseau je dirais qu’il existe des tentatives de continuum par exemple avec l'école académique de la formation de Poitiers, localisée à Chasseneuil au siège du réseau Canopé. On essaie symboliquement spatialement d'assurer un continuum sur la formation des cadres. On entame la 3e année de collaboration avec l’IH2EF où l’on forme en même temps, sur les mêmes thématiques, suivant des modalités assez proches un certain nombre de de chefs d'établissement dans l'Académie de Limoges, de Poitiers de Bordeaux.

Pour ce qui vient plus de la base que d’en haut, sur les initiatives locales, par petits pas, on travaille sur les résidences en établissement, cherchant à faire dialoguer les besoins des enseignants et les besoins du chef d'établissement, en accompagnant des initiatives ou on embarque des collectifs. Pour en revenir à la question de l'hybridation ou de l'autoformation et de la formation à distance, il y a des pans de la formation qui ne peuvent se passer de ces essentiels pour pouvoir construire ensemble des gestes professionnels. Il faut tendre vers des formations qui impliquent les acteurs.

Anne LEHMANS

Aujourd'hui est un exemple de moment où on rencontre et on partage. On voit bien que l’on a beaucoup de choses à se dire : de plus en plus on travaille les uns avec les autres. A l’INSPE interviennent systématiquement dans le parcours dont je suis responsable des médiateurs de Canopé, des enseignants de terrain, des représentants de toutes ces communautés. Pour moi c’est essentiel. Un autre point peut-être à souligner c'est la relation recherche-formation et aussi le continuum université-terrain des classes et des pratiques d'enseignement, autour de projets. Là aussi on progresse.

Vincent LIQUETE

Vous avez remarqué, et je m'adresse à l'auditoire, que l’on n’a parlé ni d'outils ni de dispositif ni de couche logicielle, ni de calculette, ni de boulier, ni d’IA.

Par rapport là aussi à vos missions respectives, est-ce qu'il y a des dispositifs – au sens le plus large- émergents autour de la technologie dans vos institutions respectives ?

Sarah CLARENS

Je reprendrais les propos de Michelle qui parlait d’intelligence collective augmentée. Par le biais de l’IA on va être confronté à des problèmes qui vont concerner la formation initiale des enseignants, continue, des cadres et, au-delà, de la communauté éducative élargie. On ne va être pas être capable de faire les choses tous seuls et, dans ce continuum, là on va être obligé de le faire ensemble.

On va être obligé de se mettre autour de la table et de travailler ensemble, à parité d'estime, en n’étant pas d'accord : c'est ce qui est riche. On va se découvrir et avancer ensemble et ça je crois que c'est vraiment le propos de Michelle sur l'intelligence collective augmentée.

Anne LEHMANS

Ce qui en train de beaucoup bouger c'est la considération des espaces d’apprentissages, que ça soit dans la classe, ou que ce soit dans la formation des enseignants ou des cadres.

Un exemple de dispositif est celui de la télé présence qui s'est imposé dans l'éducation de façon massive par des choix politiques.  Cela semble intéressant de se demander ce que la télé présence peut apporter, ou encore la comodalité, c’est-à-dire la diversité des modalités d'apprentissage de communication, peut permettre.

Une autre piste concernant les espace-temps et leur diversification, ce sont les FABLABS, des d'endroits qui ne sont pas la classe, qui sont même hors de l'école, et dans lequel on voit construire des apprentissages plutôt à base de bricolage et non de transmission. Cela nous oblige à réfléchir à l'environnement d'apprentissage, également à la façon dont les élèves restituent, documentent ce qu'ils apprennent, qui constitue des traces des choses, et à ce qui est la complexification des ressources et des technologies immersives, notamment à l’INSPE de Bordeaux avec la vidéo 360.

Vincent LIQUETE

Une dernière question. En lien avec vos expériences respectives y aurait-il des fausses pistes, au sens où il pourrait sembler y avoir une voie alternative qui s'avère être une impasse, créer des risques, à partir desquelles on se réoriente un petit peu, on se pose éventuellement, ou alors on réinvestit ?

Dominique QUERE 

Je vais reprendre une phrase de mon directeur qui aime à dire qu'en fait pédagogie et numérique sont un couple stérile. On peut passer des heures et des heures à parler de l'intérêt du numérique dans la pédagogie : en fait ça marche tellement bien que finalement ça ne fera pas avancer le système.

On réussira à avoir des gens qui vont s'y impliquer, à faire émerger des dispositifs intéressants de formation mais ce n’est pas sur ça qu'on va faire progresser la lutte contre les certaines inégalités, par exemple ce qui va permettre à des publics plus fragiles d'accéder à des poursuites d'études plus ambitieuses. En revanche numérique et didactique des disciplines, il y là des choses qui sont intéressantes.

Sarah CLARENS

Le réseau Canopé est devenu un organisme de formation. On a des formateurs à disposition, avant c’étaient des médiateurs. Auparavant on montrait les outils : ceux-ci sont devenus moins importants.

Accompagner sur le terrain à distance ou en présentiel, c’est se mettre à côté des gens, les accompagner dans tous les niveaux de compétence. Il faut que dans la formation on accepte un dialogue entre le prescrit, les références, mais aussi les outils le technique et le côté artisan, d'accompagner au plus près de tous les besoins.

Anne LEHMANS

La fausse piste est peut-être de considérer que les outils vont répondre à toutes les questions et résoudre tous les problèmes.

Les deux dispositifs dont j’ai parlé, la télé présence et les FABLABS, n’apportent rien en tant que tels, voire compliquent et sont coûteux. La fausse piste c'est l'idée qu’en investissant on va changer quelque chose. Par exemple il n’est pas sûr que les TBI dans les classes du primaire aient fait faire des progrès considérables à la pédagogie. L’idée que la tablette allait changer quelque chose dans l’envie de lire relève de cette illusion. Chaque fois que l’on parle d’un outil comme d’une solution, c’est problématique. Ces outils en revanche peuvent changer les choses de manière extrêmement intéressantes selon l’usage que l’on en fait.

La table ronde en intégralité