Et pourtant elle revient en force. Certes la désaffection des citoyens pour le devoir électoral encore récemment constaté et déploré ne plaide pas en faveur de cette thèse mais c’est un trompe-l’œil qui masque simplement le nécessaire chantier de reconstruction de la démocratie sur des bases nouvelles.
La pandémie de Covid 19 a déjà vu le retour de « l’état nation »*, de l’état providence.
Au delà de l’accent martial « nous sommes en guerre », c’est la politique qui a dit et fait le « quoiqu’il en coûte » en se portant au secours du social et de l’économique dont la suprématie qui semblait inéluctable se trouvait brutalement mise à mal. C’est la politique qui a confiné des millions de gens ici et dans le monde ; c’est la politique qui a uni les pays européens pour lutter contre la maladie et contre ses effets sur le quotidien des populations et cela malgré des histoires, des points de vue et des intérêts au mieux différents et plus souvent encore divergents…sans parler de « zéro covid » que l’on a pu voir ailleurs.
A cette occasion, c’est la notion de frontière qui est aussi revenue au premier plan.
Elle que l’on croyait presque abolie par la libre circulation des biens, des personnes et des idées, par la puissance des communications mondiales véhiculées instantanément par les outils numériques. On croyait les barrières culturelles, générationnelles ou sociales…on les découvre tout bonnement terrestres, telles que la politique les construit depuis toujours, les ferme, les transgresse ou les défend.
Comme si cela ne suffisait pas, la guerre a fait irruption en Europe. C’est la politique qui envahit l’Ukraine avec l’ambition folle de rebâtir un empire déchu au détriment des plus élémentaires considérations économiques ou humaines ; c’est la politique qui rassemble les pays européens et l’OTAN autour de la défense d’un état souverain et autour de la souveraineté des états ; c’est la politique qui rend le « vieux machin » à nouveau désirable pour qui n’en est pas membre mais se sent menacé. C’est encore la politique qui gère les incidences mondiales de cette crise géopolitique (l’adjectif est approprié).
Ce vendredi 23 juin la cour suprême des Etats Unis d’Amérique a révoqué le droit à l’interruption volontaire de grossesse.
C’est une décision éminemment politique même s’il s’agit, comme le dit le Président Joe Biden, « d’une erreur tragique qui ramène littéralement le pays cent cinquante ans en arrière ». Les ondes de cette révolution conservatrice dans une des plus vielles démocraties du monde se répercutent jusque dans notre pays et c’est la politique qui envisage de modifier la constitution française pour rendre inaliénable le droit à l’avortement même s’il n’est pas ici directement menacé.
En filagramme, nous vivons une crise écologique et environnementale dont les effets sur la biodiversité et le climat sont de plus en plus visibles. Au delà des lobbys et des chapelles qui ont occupé toutes ces années le devant de la scène, il est maintenant acquis que la destruction de l’environnement ou au contraire sa préservation relève de choix politiques. C’est la politique qui peut et doit prendre en charge la transition énergétique sous tous ses aspects économiques, sociaux et culturels, tout comme c’est la politique qui doit et devra gérer les désordres causés par le réchauffement climatique : catastrophes naturelles, migrations massives de populations…
Au vu de ces exemples et avec quelques autres en réserve, la politique a du pain sur la planche.
Elle ne bénéficie pas, pour l’instant, de la pleine confiance des citoyens pour mener à bien les missions qui lui reviennent pourtant en propre mais des signes que l’on croyait oubliés permettent de croire en une renaissance. Ainsi Marine Miller et Margherita Nasi signent dans le journal Le Monde daté de dimanche 26 et lundi 27 juin un article titré : « Grandes écoles : des remise de diplômes politiques ». A l’X (école polytechnique), lors de la diffusion, pendant la cérémonie, du message du « parrain » de leur promotion, le PDG de TotalEnergie, la moitié des diplômés lui ont tourné le dos quand d’autres ont sifflé.
L’un de ces diplômés, Benoit Halgand a déclaré sur scène : « J’aurais pu rejoindre sans problème ce monde capitaliste que j’avais beaucoup côtoyé, accepter un poste qui me donnerait accès à tous les privilèges du polytechnicien : l’argent, le pouvoir, le prestige. J’aurais pu croire à ces promesses de RSE (responsabilité sociétale des entreprises) et de croissance verte, croire que j’allais changer les choses de l’intérieur …avant que ce soit le système qui change mon intérieur. Je souhaite bon courage à ceux qui tentent cette voie, mais personnellement, je ne souhaite pas être un pion utile du système. »
Vous avez dit « politique » ?
*Nation démocratique, le retour, le recours (educavox.fr)
Dernière modification le dimanche, 20 novembre 2022