Un premier bilan a été fait par la Sous Direction des "systèmes d'information et des études statistiques" (SIES) du Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, et publié dans la "Note flash" numéro 06 d'avril 2020 ( téléchargeable gratuitement sur le site du SIES).
Nous vous en présentons les informations principales tout en vous précisant que le bilan présenté par le SIES est strictement statistique et descriptif. Les analyses qui en sont tirées dans le texte de cet article sont écrits sous la seule responsabilité de l'auteur.
1. Progression du nombre des lycéens ayant validé au moins un vœu :
93,5%des 658145 lycéens scolarisés sur le territoire français ont confirmé au moins un voeu sur la plateforme Parcoursup. Les autres (6,5% de l'ensemble) ont préféré frapper à la porte de formations "hors Parcoursup" situées en France ou à l'étranger. Ces chiffres témoignent d'une progression relativement importante par rapport à ceux de l'année 2019 : ils étaient alors 20000 de moins à avoir validé un vœu au moins sur Parcoursup.
Cette progression est très probablement la conséquence de la forte augmentation du nombre des formations qui sont désormais inscrites sur Parcoursup : 1107 formations jusque là "hors Parcoursup" ont décidé de rejoindre cette famille cette année, portant leur nombre à près de 17000. Parmi ces dernières figurent des formations fortement attractives telles l'université Paris-Dauphine, la plupart des Instituts d'études politiques, les Instituts de formation aux soins infirmiers, les écoles de formation au diplôme d'Etat d'assistant(e) des services sociaux, nombre d'écoles de commerce et management, etc. Petit à petit, Parcoursup accroît son "territoire" et tend à devenir une sorte de guichet unique pour les pré inscriptions en première année de l'enseignement supérieur.
Autre indicateur intéressant : en moyenne, les lycéens ont exprimé cette année 10,1 voeux par tête. C'est un tout petit peu plus que l'an dernier : les lycéens avaient alors exprimés 10 voeux par têt en moyenne. Il est intéressant de noter que les futurs bacheliers généraux et technologiques expriment en moyenne le même nombre de voeux (10,8 par tête), alors que les élèves des classes terminales professionnelles en font nettement moins : en 2020, ils n'ont exprimé que 6,9 voeux par tête. Cet écart est logique car les bacheliers généraux et technologiques ont propension à frapper à presque toutes les portes, alors que les bacheliers professionnels se concentrent presque exclusivement sur les formations supérieures professionnelles courtes (BTS surtout, IUT, écoles spécialisées en deux ou trois ans...).
2. Augmentation de la demande de mobilité :
La part des candidats ayant exprimé au moins un vœu pour une formation située hors de leur académie de résidence est passée de 66% en 2019, à 69% en 2020. Elle est en progression régulière depuis l'ouverture de la plateforme Parcoursup en 2017. Cette demande de mobilité émane particulièrement des élèves de la voie générale (76%), moins de ceux qui sont en voie technologique (66%) et professionnelle (51%). Elle concerne aussi bien les filières sélectives (pour lesquelles il n'existe pas de secteur d'affectation), que les licences simples non sélectives des universités, pourtant en grande partie sectorisées, mais pour lesquelles le Ministère fait en sorte que, d'année en année, une part croissante des effectifs d'étudiants admis bénéficient d'une dérogation au principe de sectorisation.
L'explication principale de ces écarts selon le type de baccalauréat préparé tient en grande partie au fait que les élèves de chacune de ces trois voies appartiennent à des catégories socio-professionnelles qui, en moyenne, ne sont pas les mêmes.
Les élèves de la voie générale sont proportionnellement plus nombreux à appartenir à des catégories socio-professionnelles aisées, ceux de la voie professionnelle sont plus fréquemment membres de familles appartenant à des catégories sociales défavorisées, et ceux de la voie technologique occupent une position intermédiaire. Or, le fait de faire ses études supérieures en dehors de son académie de résidence à un coût (dépenses de logement, transports, vie quotidienne ...) que les familles les plus démunies n'ont fréquemment pas les moyens de prendre en charge. Ce qui vient corroborer cette analyse est que ce bilan met en évidence le fait que les candidats boursiers sont significativement moins nombreux à demander une formation située en dehors de leur académie de résidence, alors que les non boursiers le demandent nettement plus. Or les boursiers appartiennent par définition aux catégories socio-professionnelles les moins aisées.
3. Le choix des filières d'enseignement supérieur n'est pas le même selon le type de baccalauréat préparé :
Les futurs bacheliers généraux sont 56% à demander une orientation vers une formation universitaire, alors que les élèves de la voie technologique ne sont que 18% dans ce cas, et ceux de la voie professionnelle 7%. Corrélativement, le secteur des études supérieures professionnelles courtes (BTS, IUT, DCG, écoles en deux ou trois ans...) fait l'objet d'une nette préférence pour les futurs bacheliers professionnels (86% de ceux qui choisissent de prolonger leurs études, dont 76% pour les seuls BTS), technologiques (75%, dont 50% pour les seuls IUT ), les élèves de terminale générale n'étant que 28% dans ce cas.
Ces différences sont parfaitement logiques. Les élèves des voies technologiques et professionnelles ont désormais bien compris que les études en université ne leur offrent que des perspectives fort médiocres de réussite : 4% seulement des bacheliers professionnels et 20% des bacheliers technologiques entrés en filière licence simple parviennent à se doter d'un grade de licence, alors que c'est le cas de plus de 60% des bacheliers généraux. On comprend donc que la plupart d'entre eux aient une préférence pour les études supérieures courtes, qui leur réussissent nettement mieux.
Ajoutons un autre facteur explicatif qui est le fait que les bacheliers technologiques et professionnels bénéficient d'une politique de quotas de places réservées en BTS (pour les "pros") et les IUT (pour les "technos") qui explique en partie le fait que les BTS soient choisis par 76% des élèves de terminale professionnelle, et les IUT par 50% de ceux de la voie technologique. Il convient enfin de prendre en compte le fait que les étudiants parvenus à se doter d'un BTS ou d'un DUT sont de plus en plus nombreux à parvenir ensuite à rejoindre des filières plus longues via les procédures dites "parallèles", ce qui incite les plus ambitieux de ces élèves des voies professionnelles et technologiques à jouer la carte très stratégique qui consiste à viser des diplômes de l'enseignement supérieur long, en commençant par une première étape d'études supérieures professionnelles courtes, alors conçue comme un tremplin vers des études supérieures plus longues, et non comme une fin en soi.
Parmi les formations universitaires, la plus demandée demeure celle de droit (16%), suivie par la nouvelle formation Pass (portail d'accès aux études de santé) qui a recueilli 11% des voeux, les licences du secteur économie-gestion (8%), celle de psychologie (8%), et celle de STAPS (sciences et techniques des activités physiques et sportives : 7%). Loin derrière dans l'ordre des choix : celles d'AES, de langues, sciences, mathématiques, lettres modernes....
4. Une trop forte proportion de candidats ne demandent qu' une ou deux filières de formation supérieure :
Malgré les nombreuses incitations émanant des personnels qui, dans les lycées, sont en charge d'accompagner les familles en matière d'orientation (professeurs principaux et autres personnels d'enseignement, psychologues de l'Education nationale et conseillers d'orientation divers, membres de l'équipe de Direction ...), plus de la moitié des lycéens (57%) n'expriment sur Parcoursup qu'un ou deux voeux et ils sont 29% à n'exprimer qu'un seul vœu ! Malgré une forte diminution du nombre de ceux qui n'expriment qu'un ou deux voeux par rapport à l'an dernier (en 2019, ils étaient 66% dans ce cas), ce chiffre est considéré comme étant encore trop élevé car il fait courir des risques importants et évitables à certains candidats.
Rappelons que chaque candidat a le droit d'exprimer dix voeux, pouvant s'étendre à vingt en cas de "voeux multiples". Allonger sa liste de voeux est donc largement possible, et ne fait courir aucun risque aux candidats puisque chacune des formations demandées par un candidat est strictement tenue dans l'ignorance des autres voeux de ce même candidat. En outre, les lycéens recevront une réponse pour chacun des voeux exprimés, et en cas de multiples réponses "oui" ou "oui si", c'est au candidat qu'il appartient de choisir la proposition retenue.
Le risque, lorsqu'on n'exprime qu'un très petit nombre de voeux, et tout particulièrement lorsqu'une liste de voeux n'est composée que de formations sélectives ou universitaires à capacités d'accueil limitées, c'est de ne recevoir ensuite que des réponses négatives.
On a alors certes droit à une deuxième chance à l'occasion de la phase complémentaire, mais uniquement pour les formations qui disposent de places restées vacantes au terme de l'étape précédente. Il est clair que l'offre sera alors bien moins abondante qu'en début de la phase des réponses, y compris en ce qui concerne les formations non sélectives. Il en résulte que de nombreux candidats ne recevront dans ce cas qu'une ou des propositions d'affectation concernant des formations moins intéressantes que celles qui auraient pu leur être proposées lors de l'étape précédente s'ils avaient augmenté le nombre de leurs voeux. Certains candidats choisissent de ne demander qu'un tout petit nombre de formations sélectives, et se retrouvent ensuite sans aucune proposition. En 2019, ce fut le cas de 2% de l'ensemble, un peu plus de 12000 d'entre eux.
Il convient donc de renouveler avec encore plus d'insistance le conseil de ne pas prendre le risque de n'élaborer qu'une très courte liste de voeux, et en particulier de ne pas se limiter à une liste de formations sélectives.
Bruno Magliulo
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