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La Fondation « Ius et Politia » a tenu un colloque inaugural le 3 avril autour de deux thématiques : l’enseignement et la recherche. Les études de Droit très attractives accueillent chaque année plus de 200 000 étudiants pour 63 universités qui sont concurrencées par un nombre croissant d’établissements privés.

Vives inquiétudes

La Fondation « Ius et Politia » gère le site de référence Univ-Droit (publications de juristes, parutions spécialisées en libre accès, formations juridiques…) et le site consacré à l’Université Numérique Juridique Francophone – cours en ligne. A ce premier colloque consacré aux missions de l’enseignement et de la recherche, enseignants-chercheurs et avocats ont fait part de leurs vives inquiétudes sur les nombreux établissements privés. « On essaie de faire des gens prêts à l’emploi » a regretté l’avocat Jean-François Mérienne. Le professeur Jean-Christophe Saint-Pau s’est interrogé sur le contenu de l’enseignement de ces établissements privés. Il a rappelé que les professions juridiques sont réglementées et accessibles après des études universitaires en Droit. Les intitulés comme « Bachelor » ou « Mastère » portent à confusion et ne sont pas des diplômes d’Etat - le coût est souvent très élevé alors qu’une inscription à l’université est de l’ordre de 200 à 300 euros par an.

Nombre de Masters en Droit proposent des formations à visées professionnelles, il y a d’ailleurs de moins en moins de Masters généralistes mais il faut passer le cap de la sélection. Des étudiants choisissent des formations de repli ou sont en période d’attente après un échec en Licence 3. 

Face à la massification, 20 % des étudiants sont inscrits en Droit, la question de la professionnalisation des formations devient un sujet d’actualité. Nombre d'étudiants de première année ne continueront pas dans le cursus du Droit. Laurent Gamet, professeur de l’Université Paris-Est Créteil, a indiqué que son université expérimente une Licence 1 professionnalisante. Il a suggéré la création de Licences professionnelles, elles sont désormais de durée variable de 1 à 3 ans. Si cette voie est davantage développée, les intervenants sont unanimes, il faudra davantage de moyens humains et financiers - les diplômes à finalités professionnelles comme les BTS ou DUT/BUT bénéficient d’enseignements avec des effectifs limités. Or l’université connaît un déficit d’encadrement. 

L’enseignement de l’Histoire du Droit est menacé par le manque de professeurs, en constant recul. Au niveau du Master, le Droit public porteur d’emplois perd en vivier.

Des propositions 

Les enseignants-chercheurs s’interrogent sur la progression pédagogique proposée en première année ; les cours de début de première année sont-ils trop théoriques ? Les cours magistraux en amphithéâtre constituent un défi important. Quels formats proposer ?

Ce qui semble théorique couvre des activités en lien avec l’exercice de professions juridiques. La dissertation est en fait un exercice pratique – cette dimension n’est pas toujours perçue par les étudiants. Pour Yann-Arzel Durelle-Marc, maître de conférences, il faut « saisir où l’on trouve les informations et connaître les schémas d’organisation, ce qui permet ensuite de raisonner ». 

Il a été proposé d’adosser des DU à des Licences, et de réfléchir au développement de doubles diplômes très demandés par les étudiants. Autre point traité : l’introduction de la notion d’éthique pour préparer aux problèmes déontologiques et aux relations interprofessionnelles.

Yves Gaudemet, professeur émérite et membre de l’Institut de France, est revenu sur la question du monopole de la collation des grades. Par Décret apparaissent dans le Journal Officiel des intitulés indiquant des équivalences au titre d’une Licence. Comme Jean-Christophe Saint-Pau, Yves Gaudemet appelle à la vigilance et au soutien des autorités.

La Fondation « Ius et Politia » qui vise à promouvoir l’enseignement et la recherche en Droit et en Science politique proposera deux Prix (innovation et recherche) et deux colloques annuels – le prochain colloque traitera du statut de l’enseignant-chercheur. Abritée par l’Institut de France, cette Fondation a été soutenue à sa création par Anne-Sophie Barthez, Directrice générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle. Anne-Sophie Barthez est intervenue pour rappeler le principe de non hiérarchisation des vœux pour les demandes de Masters avec la nouvelle plateforme Mon Master afin d’éviter l’autocensure. Le calendrier est commun à toutes les universités, dès qu’une place est libérée elle sera affectée à un autre étudiant.

Fatma Alilate

https://academiesciencesmoralesetpolitiques.fr/fondations/fondation-jus-et-politia/

Dernière modification le mercredi, 31 mai 2023